Mayotte : des «dizaines de milliers de personnes» probablement «ensevelies sous les tonnes de boue», alerte Estelle Youssouffa
Au moins 34 morts et environ 2500 blessés. Près de 10 jours après le passage du cyclone Chido à Mayotte, ce bilan, toujours provisoire, établi par l’Institut national de gestion des risques et désastres, est en réalité largement supérieur, selon l’élue Estelle Youssouffa. La députée Liot de la première circonscription de Mayotte estime que le cyclone du 14 décembre, le plus dévastateur qu’ait connu l’île depuis 90 ans, aurait entraîné en réalité «plusieurs dizaines de milliers» de disparus en ravageant les quartiers informels peuplés d’immigrés illégaux.
«90% de Mayotte est détruite, 90% des habitations n’ont plus de toit. On n’a pas d’eau, pas de nourriture, les secours ont encore du mal à arriver dans les zones», s’est alarmée lundi matin Estelle Youssouffa, interrogée sur France Inter, avançant un bilan humain démultiplié par la surpopulation dans les bidonvilles. «On ne connaît pas le nombre de personnes décédées. On évalue à plusieurs dizaines de milliers de personnes les disparus puisque ces zones, qui étaient extrêmement densément peuplées et sont aujourd’hui quasiment vides», a déclaré l’élue.
«Aider les vivants», la priorité
Dans le département le plus pauvre de France, les secours sont depuis à pied d’œuvre pour rétablir les services essentiels comme l’eau, l’électricité et les réseaux de communications. Les autorités, qui craignent un nombre de victimes très élevé, ont diligenté une mission de recherche pour retrouver les disparus. Ceux-ci, relève Estelle Youssouffa, «ne se sont pas évaporés». «Aucun corps n’a été ramené par la mer, il n’y a plus de végétation pour que les gens aillent dans les forêts. Par déduction, ces personnes sont ensevelies sous les tonnes de boue, de détritus et de tôles», raisonne-t-elle. «C’est dramatique, et c’est cela que les uns et les autres doivent accepter».
Dans ce cadre, la députée estime que la priorité est d’«aider les vivants», «sauver les survivants» en venant au secours des blessés «sur l’ensemble de l’île» et «pas uniquement dans les bidonvilles». «Je demande désespérément qu’on envoie l’armée pour essayer d’éviter qu’on bascule dans l’anarchie», a encore déclaré Estelle Youssouffa, décrivant des scènes de pillages en marge des dégâts. «On est en train de piller les quelques maisons qui n’ont simplement plus de toit. Il n’y avait pas assez d’aide, il n’y a pas assez de secours», a-t-elle alerté.
Coïncidence du remaniement
L’élue se dit par ailleurs «profondément indignée» par la classe politique dont «l’obsession générale» est «le remaniement» ministériel alors que l’île «est dans une grande détresse humanitaire». L’annonce du nouveau gouvernement pourrait tomber ce lundi soir, le jour même où la France observe un deuil national fixé par le président Emmanuel Macron en solidarité avec Mayotte. «En fait, on s’en fout de Mayotte. Et ça, franchement, c’est grave», déplore la députée.
Un peu plus tôt ce lundi matin, c’est le sénateur (RDPI) de Mayotte Saïd Omar Oili qui, sur FranceInfo, avait exprimé sa désapprobation sur une éventuelle coïncidence entre la nomination du gouvernement et l’hommage aux victimes de l’ouragan. «Comme d’habitude, on passe au second rang», avait-il lâché, estimant que «les Mahorais seront une deuxième fois touchés et meurtris» par ce manque de considération. Depuis, l’Élysée a fait savoir que l’annonce d’un gouvernement n’aurait pas lieu avant 18 heures en raison de ce deuil national décrété pour Mayotte.