Pas de pays sans paysans dans la France du XXIème siècle
Gérard Le Puill
Alors que trop de prix agricoles demeurent excessivement bas au départ de la ferme, plus de la moitié des chefs d’exploitation ont plus de 50 ans et installer des jeunes est de plus en plus difficile. Pour sensibiliser les consommateurs, des visites pédagogiques sur l’agriculture durable sont organisées sur des exploitations ce week-end dans de nombreux départements.
Demain et dimanche, tandis que les médias audiovisuels seront concentrés sur les obsèques du pape François et chercheront à connaître l’identité de la personne appelée à lui succéder au Vatican prochainement, les Centres d’Initiatives pour Valoriser l’Agriculture et le Milieu rural (CIVAM) organiseront « des visites pédagogiques sur l’agriculture durable en direct des fermes ». Quelques 700 fermes seront ainsi ouvertes aux visiteurs dans de nombreux départements. « Plus que des portes ouvertes, notre ambition est d’expliquer concrètement et directement dans nos fermes la mise en application de pratiques durables dans un esprit convivial et festif. Ceci afin que le consommateur prenne toujours plus conscience de l’impact de ses décisions en matière d’alimentation. En 2025, 2 nouveaux départements rejoignent l’aventure nationale : l’Ariège et la Saône-et-Loire», lit-on dans le texte de présentation.
Alors que la gestion de l’eau sera le thème dominant de cette 32ème édition, il convient de rappeler que département de l ’Ariège est souvent confronté aux sécheresses et au manque d’eau tandis que, ces dernières jours, des inondations ont causé de gros dégâts dans les départements de Corrèze, Dordogne, Gironde et Charente-Maritime sur les terres agricoles à commencer par les récent semis de maïs. Le réchauffement climatique en cours fait croître les sécheresses en nombre et en intensité, ce qui se traduit par des baisses de rendement quand on produit du grain ou de l’herbe. Les fortes pluies et les orages de grêle augmentent en nombre et en intensité et contribuent aussi à réduire les rendements agricoles.
Trois versions de la loi Egalim sans influence véritable sur les prix
Tandis que les parlementaires français ont voté depuis 2018 trois versions successives de la Loi Egalim promise par le président Macron à Rungis le 11 octobre 2017 pour intégrer le coûts de production dans la formation des prix payés aux paysans , le prix de la tonne de maïs sur le marché de Creil ne cotait que 185 euros le 15 avril. Ce prix est régulièrement inférieur à 220 euros la tonne depuis septembre 2023 alors qu’il dépassait les 280 euros de moyenne durant les six premiers mois de 2022. Les prix ont chuté quand la Commission européenne et les gouvernements des pays membres de l’Union européenne ont autorisé l’Ukraine à exporter des volumes importants de maïs et de blé en Europe sans droits de douane. Le prix de la tonne de blé tendre qui sert à produire du pain ne cotait que 203 euros le 15 avril rendu à Rouen pour l’exportation alors qu’il valait plus de 310 euros en 2022 avant la suppression des droits de douane sur le blé ukrainien exporté dans l’Union européenne.
Il faut avoir ces éléments en tête pour bien saisir l’importance de certaines évolutions mise en exergue dans le dossier de presse du CIVAM. Il nous dit que « le changement climatique bouleverse d’ores et déjà certaine productions et la transition n’est plus seulement écologique ou agro-écologique, elle devient alimentaire. En vingt ans, la France a multiplié par deux le volume des denrées alimentaires importées, tandis que 43% de nos terres agricoles sont dédiées à l’export ». C’est notamment le cas du blé dont le prix au départ de la ferme ne couvre plus les coûts de production. Ces prix bas risquent de perdurer car les stocks de report de fin de campagne aux États-Unis et en Russie seront en forte hausse par rapport à la demande solvable au moment de la moisson de l’été 2025.
La gestion de l’eau, un enjeu majeur de ce siècle
Concernant la gestion de l’eau, le document du CIVAM précise qu’elle est « indispensable à la culture des végétaux, à l’abreuvement des animaux, à la transformation des produits qu’ils soient carnés, végétaux ou en laitages. Parce que la gestion de l’eau tant sur le plan quantitatif que qualitatif est un des enjeux fondamentaux d’une approche durable en agriculture, de nombreux agriculteurs, notamment au sein du CIVAM, réfléchissent depuis des années à mieux gérer. Réutilisation d’eau de pluie, procédés de maintien d’humidité dans les sols et économie d’arrosage, ou encore émergence de nouvelles filières agricoles moins gourmandes et plus résistantes à la sécheresse. Ce sont ces pratiques que les paysan-nes CIVAM mettent en place au quotidien et qu’ils proposent de faire partager aux visiteurs lors de cette édition 2025. « Autour de l’eau » est un thème national pour sensibiliser le grand public sur cet enjeux environnemental , qui permet également de fédérer les différentes fermes participantes autour d’un sujet commun et de renouveler le parcours des visites en proposant un « fil rouge » entre les différents territoires ».
Le dossier de presse précise que chaque visiteur pourra visiter librement les fermes ouvertes ces deux jours sans inscription préalable et gratuitement. « Le public est ainsi incité à découvrir la grande diversité de productions : élevages traditionnels ou de races rustiques comme le porc noir gascon, mais aussi cultures variées, maraîchage, plantes aromatiques ou céréales jusqu’aux plus confidentielles comme la production de champignons, agriculture de montagne, aquaculture, agriculture urbaine. Le paysage agricole est vaste et cette opération met en lumière la diversité des productions propres à chaque département ».
Tandis que la souveraineté alimentaire des peuples va devenir un des grands enjeux de ce siècle, l’initiative du CIVAM interpelle de manière positive les consommateurs que nous sommes tous. Car nous sommes tous concernés du fait que le nombre de paysans de cesse de diminuer faute d’un revenu suffisant tiré de leur travail par la majorité d’entre eux.
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