À la Teste-de-Buch, face à la dune du Pilat, les panneaux « Interdiction de stationner » bordent désormais la route menant au sable. Trois ans après les feux dévastateurs de 2022, qui ont ravagé plus de 30 000 hectares de forêt girondine, dont 7 000 autour de la dune, le site emblématique du littoral atlantique peine à retrouver son équilibre. Le premier incendie avait été déclenché par l’embrasement d’une camionnette sous les pins.
L’unique parking du site classé, rénové mais non agrandi, a été repensé avec une large zone piétonne ensablée et des panneaux explicatifs. «C’est un site naturel ouvert, on ne peut pas le limiter, mais on doit trouver un point d’équilibre», rappelle Nathalie Le Yondre, présidente du syndicat mixte de gestion. La stratégie actuelle mise sur la médiation, la communication et l’étalement de la fréquentation.
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Un mythe touristique fragilisé
En haut de la plus grande dune d’Europe, à 101 mètres d’altitude, touristes et écoliers venus de toute l’Europe savourent la vue sur le Cap Ferret, l’océan Atlantique, et… les bungalows reconstruits en contrebas. Sur les cinq campings détruits, deux n’ont rouvert que partiellement, un autre est toujours fermé, ses travaux gelés depuis mars 2024.
Sur ce dernier, censé renaître « aux normes » comme promis par Emmanuel Macron en 2022, les aménagements en béton et les murs de soutènement ont semé la discorde. «La route du paradis commence ici... mais là, ils détruisent, ils bétonnent», regrette le chef-cuisinier d’un restaurant de plage.
Jacques Storelli, président d’une association environnementale à l’origine de recours juridiques, s’indigne : «Le site a été foutu en l’air et la remise en état sera très compliquée. Les autorisations de reconstruction délivrées en 2023 sont ahurissantes.»
Un rapport de 2024 de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable fustige une politique d’aménagement jugée « déplorable », estimant que la reconstruction a «pris le pas sur la préservation paysagère». En réaction, le syndicat mixte a suspendu la candidature du site au label « Grand Site de France ».
Économie locale vs. écologie : une fracture
Vital Baude, conseiller régional écologiste, déplore «une occasion manquée». Selon lui, «il aurait fallu envisager le site comme un monument naturel et pas comme un équipement touristique. Mais l’émotion a pris le dessus, l’État n’a pas voulu se dédire.»
Le terrain continue d’évoluer. La dune, longue de près de 3 km, recule chaque année vers la forêt. «L’ancienne piscine du camping est aujourd’hui sous le sable», raconte Franck Couderc, gestionnaire du camping de la Dune – celui des Flots Bleus du film Camping avec Franck Dubosc.
Seul responsable à s’être exprimé, il confie : «On est tous ouverts à partir. De toute façon, dans 15 ans maximum, on disparaîtra. En attendant, on représente 300 emplois directs et indirects dans la zone.» Et de répondre aux critiques : «Nos détracteurs nous présentent comme obnubilés par le fric, mais ici, on se limite, c’est notre kif d’être dans un espace réduit, humain, sans surpopulation.»
Une trentaine de mobile-homes posés après les incendies ont été fermés par l’administration, mais sont «en train d’être régularisés».,La mairie de La Teste-de-Buch, qui affirmait en 2022 qu’«un euro dépensé par campeur» générait «trois euros sur tout le territoire», reste désormais silencieuse.
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