30 juillet 1928 : à Amsterdam, entrée en jeu des «athlétesses»

En partenariat avec RetroNews, le site de presse de la BnF.

C'est pour Le Figaro l'événement «pittoresque» de la journée. Ce 30 juillet 1928, les femmes ont pour la première fois le droit de fouler la piste olympique d'athlétisme. Elles n'avaient jusqu'ici participé aux olympiades que de façon disparate, à des épreuves de tennis, de natation ou de tir à l'arc.  Cette fois-ci, dans le stade olympique d’Amsterdam, elles concourent aux 100 et 800 mètres, hauteur avec élan, disque et relais 4x100 m.

Cette avancée majeure, les sportives la doivent à une Française, Alice Milliat, présidente de la Fédération Sportive Féminine Internationale. Cette institutrice et championne d'aviron a lancé les jeux mondiaux féminins et obtenu la reconnaissance de l'athlétisme féminin aux Jeux olympiques de 1928, au grand dam du baron de Coubertin, viscéralement opposé à toute «olympiade femelle».

Une silhouette nouvelle

Le père de l’olympisme moderne, qui juge le sport féminin «inesthétique» et «incorrect», est contredit: «l'athlétesse» a conservé toute son élégance, juge Le Figaro alors partisan de la féminisation des noms. Avec ses cheveux aussi courts que sa culotte, la sportive propose une «silhouette féminine nouvelle», «une femme neuve, à la démarche et aux attitudes de laquelle il faudra bien nous habituer», souligne Frantz-Reichel, journaliste au Figaro mais aussi ancien athlète, joueur de rugby, champion de boxe, gymnaste et président de multiples fédérations sportives. Ce n’est pas l’opinion de tous.

Des femmes au corps musclé et disgracieux, voilà la grande crainte de l'époque qui bride l'essor du sport féminin. Reichel, lui, est rassuré: outre quelques bonnes performances, une «force» et une «énergie» saluées, toutes les concurrentes se sont distinguées «par la proportion heureuse des lignes et l'harmonieux développement du corps».

Le journaliste observe que le sport olympique féminin a conquis les foules. Et fait étonnant, les athlétesses n'ont pas bénéficié «des indulgences dont on entoure les femmes dans la vie courante». Les deux «gracieuses et excellentes concurrentes allemandes» du 100 mètres ont été éliminées pour avoir provoqué «dans leur juvénile et impétueux désir de vaincre deux faux départs». Un pas vers l'égalité ? Le chemin est long encore. Le 800 mètres remporté par l’Allemande Lina Radke le 2 août crée la polémique alors que des images de femmes épuisées sont diffusées. L’épreuve leur est interdite jusqu’en 1960 et le marathon ouvert aux femmes plus tardivement encore, en 1984.