Incendie de Marseille : "J'ai fait ce que j'ai pu, je n'avais plus d'eau"
"C'est grâce au bassin des poissons rouges que j'ai sauvé ma maison !" : Dominique Russo a des sanglots dans la voix en racontant comment il a lutté une partie de la nuit contre le feu dans le nord de Marseille, pendant la nuit du mardi 8 au mercredi 9 juillet, muni de seaux... et de la seule eau des poissons.
Dans le haut de la Montée du Pin, à l'Estaque, deux maisons ont entièrement brûlé. Elles venaient d'être achetées par deux jeunes couples. Sur le jardin ne restent que des arbustes calcinés et trois vélos, dont celui d'un d'enfant, ont fondu sous la chaleur des flammes.
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À quelques mètres en contrebas, Dominique Russo, 59 ans, montre les dégâts sur la maison familiale qu'il venait de rénover et dans laquelle il avait emménagé, le 28 juin, avec sa femme et sa belle-mère de 93 ans : façade noircie, fenêtres explosées, volets brûlés. Le salon jonché de débris de verre comme l'intérieur des placards sont recouverts de suie noire. Le climatiseur a entièrement fondu.
La maison n'a plus de courant, le poteau électrique, brûlé, est tombé sur le mur d'enceinte.
"J'ai fait ce que j'ai pu, je n'avais plus d'eau"
"Au début, on ne voulait pas quitter la maison, mais à 15 h, quand on a commencé à entendre les crépitements autour de nous, avec ma femme on a fait descendre ma belle-mère de 93 ans. Mais par l'escalier (qui dessert une partie de ce quartier pentu NDLR), ça a été compliqué...."
Arrivé chez son frère, dans le bas de l'Estaque, Dominique Russo a vue sur sa maison, et découvre sa serre en flammes. "Je n'ai pas pu résister, je suis remonté avec mon frère et mon cousin, on a été retardé par une voiture en feu dans la montée, des policiers nous ont suivis, et arrivés ici, on a commencé à essayer de repousser le feu avec un jet d'eau, un petit pipi qui ne servait pas à grand-chose".

Mais, rapidement, l'eau s'arrête. La maison n'a pas de compteur et est équipée d'une jauge qui venait d'être réduite à 800 litres par jour.
"Du coup, on a pris des seaux, et avec l'eau du bassin des poissons rouges, on a arrosé, arrosé. Les policiers sont restés avec nous une grosse heure, et après, à trois, on est restés jusqu'à 2 h du matin, à la lumière d'une petite lampe solaire du jardin."
"On courait dans tous les sens, je n'ai jamais couru autant que ça.. J'ai fait ce que j'ai pu, j'avais plus d'eau... Je me suis excusé auprès de ma belle-mère, qui est née dans cette maison, mais j'ai pas pu faire plus", dit-il des larmes dans les yeux.
Dominique Russo n'en veut pas aux pompiers : "Il y avait des feux partout dans le département, ils étaient submergés, et ici, avec leurs camions ils ne pouvaient pas passer". En revanche, "je ne comprends pas qu'on n'ait pas une bouche d'incendie à côté".
"Depuis le dernier incendie en 2016, on sait que c'est un site à risques. On a demandé plusieurs fois une bouche d'incendie, et ça n'a pas été fait ! On aurait pu se défendre !", ajoute-t-il la gorge nouée.
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"Tous les travaux étaient finis, il nous restait un peu de nettoyage et du rangement", lâche-t-il. "Là je vais rassembler nos papiers, et appeler les assurances, mais j'ai peur..."
Une voisine, épargnée par le feu, passe pour inviter les Russo a déjeuner. Un autre apporte des bouteilles d'eau, propose de venir chez lui prendre une douche. Dominique Russo sourit enfin.
Avec AFP