Côte d’Azur : après l’interdiction des gros bateaux de croisières par Christian Estrosi, la résistance s’organise

Côte d’Azur : après l’interdiction des gros bateaux de croisières par Christian Estrosi, la résistance s’organise

Une centaine de bateaux de croisières font escale chaque année à Villefranche-sur-Mer, commune voisine de Nice. Gérard Labriet / Photononstop via AFP

Des professionnels craignent pour leur activité si les touristes des croisières ne font plus escale à Villefranche-sur-Mer. L’arrêté d’interdiction va être contesté en justice.

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Des restaurateurs, des commerçants, des hôteliers, des chauffeurs de taxis, des dockers et des responsables de l’Union maritime se sont réunis, jeudi en fin d’après-midi à Villefranche-sur-Mer (Alpes-Maritimes), pour contester l’interdiction des gros bateaux de croisières décidée soudainement par le maire de Nice et président de la métropole, Christian Estrosi, la semaine dernière. Ces professionnels craignent pour leur activité, alors que les escales de ces paquebots touristiques génèrent selon eux des retombées estimées entre 10 et 15 millions d’euros.

Vendredi dernier, Christian Estrosi (Horizons) a signé un arrêté pour empêcher les croisières de plus de 900 passagers de débarquer sur les communes de la métropole niçoise, une manière de les dissuader de venir sur cette partie du littoral azuréen. En réalité, seule la commune de Villefranche-sur-Mer est concernée. L’édile niçois dénonce «le surtourisme» et «la pollution» qu’engendrent ces «immeubles flottants» et veut s’inspirer de Venise, qui les a interdites depuis août 2021. Une centaine de croisières viennent chaque année dans cette rade près de Nice, l’un des endroits les plus prisés de la Côte d’Azur.

Près de 200 personnes se sont retrouvées malgré la pluie dans une salle aménagée dans la citadelle villefranchoise, en présence du président de l’Union maritime du 06, Nicolas Plumion, et du maire, Christophe Trojani. Ils ont voulu rappeler qu’une charte «croisière durable» est déjà appliquée pour réguler le nombre de navires, élaborée et signée avec la métropole. Seulement 80 escales sont programmées pour 2025 alors qu’il y en avait près de 200 en 2010, ont-ils rappelé.

Référé suspension

Selon Nicolas Plumion, l’arrêté du maire de Nice «masque une approche locale erronée, incohérente et sans concertation». «L’économie bleue est ainsi stigmatisée et sacrifiée, mettant en péril de nombreuses entreprises locales et les emplois qui en dépendent», a-t-il résumé. «Ce ne sont plus les bateaux qui fument mais des décisions arbitraires qui nous enfument», a-t-il encore imagé.

Plus encore que les restaurateurs, commerçants et hôteliers, l’Union maritime explique que cette interdiction impactera aussi les dockers, les guides, les autocaristes et les services portuaires, notamment ceux chargés des navettes entre la croisière et le quai.

«On se croirait à un meeting», a ironisé le maire Christophe Trojani, qui s’est dit «très étonné de l’ampleur de cette histoire». «Je ne suis pas là pour défendre la croisière, mais pour défendre Villefranche-sur-Mer», a-t-il expliqué. «On a trouvé un équilibre entre respect de l’environnement et activité économique», a-t-il affirmé, en dénonçant «le fait du prince», allusion à la décision de Christian Estrosi, jurant qu’il n’était «au courant de rien». «À Villefranche, on n’a de leçons à recevoir de personne», a-t-il lancé. L’édile a prévenu qu’il allait prochainement saisir la justice avec un référé suspension.

«Il va falloir se battre»

«On s’est autorégulé, on n’a pas attendu un arrêté et un teasing du sommet des océans (qui se tiendra à Nice en juin, NDLR), pour agir», a insisté Nicolas Plumion. «Il va falloir se battre», a-t-il assuré. Avec le maire, ils ont encore défendu «l’industrie française des bateaux, à Saint-Nazaire» et assuré que la CGT des dockers les soutenait, la preuve pour eux que «ce sujet n’est pas politique». Ils se sont encore étonnés d’être visés alors que dans le même temps, une extension de l’aéroport de Nice est en train d’être construite.

L’association internationale des compagnies de croisière s’était aussi dite «stupéfaite» par cette interdiction. «Dans l’intérêt des acteurs de l’économie locale ainsi que des voyageurs qui souhaitent découvrir cette région, nous exhortons les autorités à reconsidérer cette décision», avait-elle indiqué dans un communiqué. Cet arrêté, signé par Christian Estrosi devant les caméras, fera l’objet d’un contrôle de légalité de la préfecture des Alpes-Maritimes avant de potentielles suites judiciaires.