« Il s’appelle Benoît Jacquot » : Judith Godrèche, l’icône qui ne voulait plus se taire

Elle ne l’avait encore jamais nommé elle-même, laissant ce soin à d’autres, qu’ils soient journalistes ou appartiennent à ce petit monde du cinéma français où tout, décidément, se sait, mais où bien peu se dit. Ou se disait. Car Judith Godrèche a décidé de nommer Benoît Jacquot, ce réalisateur avec qui elle a eu une relation – mais peut-on employer ce terme ? – alors qu’elle avait 14 ans et lui 40. « La petite fille en moi ne peut plus taire ce nom », a-t-elle écrit dans la soirée du samedi 6 janvier sur son compte Instagram.

Elle se taisait encore parce qu’après des années à s’être effacée elle-même, comme elle le dit, du paysage cinématographique hexagonal, l’actrice et réalisatrice y est revenue en force avec sa mini-série Icon of French Cinema, en partie inspirée, sur un mode ironique, de sa propre vie et diffusée depuis le 28 décembre sur Arte. « Je ne voulais pas qu’on pense que je règle mes comptes à travers ma série », expliquait-elle en novembre dans un entretien au magazine Elle.

Coïncidence ? On a vu ressortir sur les réseaux sociaux un documentaire de 2011 sur les Ruses du désir : l’interdit, réalisé par le psychanalyste Gérard Miller, où l’on voit Benoît Jacquot évoquer tranquillement sa relation avec celle qu’il appelle « cette Judith ». Il y prétend, face caméra, qu’elle avait alors 15 ans (âge de la majorité sexuelle), non 14, et que l’interdit, « elle n’en avait rien à foutre, et même ça l’excitait beaucoup ».

« La peur de ne plus travailler, de ne pas être soutenue »

Le cinéaste aujourd’hui âgé de 76 ans ajoute, avec un sourire en coin qui rend son propos encore plus troublant, que faire du cinéma, « c’est une sorte de couverture pour des mœurs de ce type-là » et que, dans le milieu, « on peut sentir une certaine estime ou une certaine admiration pour ce que d’autres aimeraient sans doute bien pratiquer aussi ». Ces images, Judith Godrèche les a vues : « Non, Benoît Jacquot, répond-elle, une fille comme elle avait 14 ans, et non ça ne l’excitait pas ».

Elle ajoute qu’elle va « réfléchir. Où, quand, comment tout dire », malgré « la peur de ne plus travailler, de ne pas être soutenue ». Mais voilà : le flot de soutiens qu’elle a reçus depuis montre que, dans les suites de l’affaire Depardieu, les femmes victimes de la domination masculine, en particulier dans le milieu du cinéma, ne sont plus aussi faciles à « effacer » que jusqu’à présent.