Vittorio Teresi, juge italien antimafia : « Giorgia Meloni cherche à contrôler la justice »

Depuis l’invalidation par la justice italienne de l’accord migratoire avec l’Albanie, qui prévoit d’externaliser la rétention des demandeurs d’asile, l’extrême droite au pouvoir fait feu de tout bois pour dénoncer les « juges rouges ». Ce thème – classique en Italie depuis Silvio Berlusconi – prend un nouveau tour. Sa réforme de la justice sous le bras, la présidente du Conseil, Giorgia Meloni (Fratelli d’Italia), n’hésite pas à s’en prendre à l’indépendance du pouvoir judiciaire à la manière de ses homologues polonais et hongrois.

Les attaques ad hominem contre les magistrats se multiplient : leurs noms, leurs adresses sont livrés en pâture sur les réseaux sociaux, les exposant à des menaces de mort. C’est le cas de la juge romaine Silvia Albano, qui s’est opposée à la déportation des migrants en Albanie.

Le juge Vittorio Teresi, dont l’engagement dans la lutte contre la mafia lui a valu d’être placé sous protection, analyse cette régression de l’État de droit. Un recul démocratique qui fait peser un sérieux risque contre la protection juridictionnelle des plus faibles tout en protégeant les forts. Héritier des juges Giovanni Falcone et Paolo Borsellino, tous deux assassinés pour avoir révolutionné les méthodes d’investigation contre la mafia, Vittorio Teresi dénonce les liens persistants entre les groupes criminels et les forces politiques italiennes. Il préside le Centre d’études Paolo et Rita Borsellino.

Comment décririez-vous les attaques actuelles du gouvernement contre la magistrature ?

Il s’agit d’une instrumentalisation. Les objectifs poursuivis diffèrent des objectifs proclamés. L’offensive du gouvernement se base sur la nécessité de protéger au maximum les droits des citoyens. En réalité, sous prétexte de garantir la justice, le gouvernement de Giorgia Meloni cherche à réduire son indépendance afin de la contrôler et de l’influencer.

Le gouvernement n’a jamais fait la démonstration de son attachement à l’indépendance de la magistrature en tant que valeur démocratique à sauvegarder. Il la considère davantage comme un obstacle à abattre afin de parvenir au contrôle de la justice par le politique.

Giorgia Meloni accuse la magistrature d’interférer dans les affaires politiques. Sur quoi se basent ces accusations ? Que répondez-vous ?

Il reste 85 % de l’article à lire, la suite est réservée aux abonné.es.
Profitez d’un accès illimité aux contenus en ligne et
soutenez une rédaction jeune, libre et engagée !

Abonnez-vous à l’Humanité à partir de 11€/mois