En Italie, le monde du cinéma se mobilise pour éviter que les salles obscures de Rome ne tombent entre les mains des groupes immobiliers

C’est la controverse du moment à la rubrique culture en Italie : le sort des salles de cinéma fermées à Rome. La région Lazio, celle de la capitale, veut autoriser la reprise et le changement complet d’activité de ces salles, mais le monde du cinéma se mobilise.

À Rome depuis la crise du Covid, une centaine d’écrans se sont éteints, il en reste un peu plus de 200 dans la ville. En Italie en général, la fréquentation des salles a fortement baissé ces dernières années. 2 000 écrans ont disparu à travers le pays ces 20 dernières années, bien avant même la pandémie donc.

Que faire des bâtiments à l’abandon, parfois depuis plusieurs décennies à Rome, et propices à tous les trafics ? Actuellement, la loi régionale est très protectrice : qui rachète un cinéma fermé doit consacrer 70% de l’espace à des activités culturelles. La région veut modifier la loi. Au bout de dix ans sans activité, les lieux pourraient changer complètement d’affectation.

Pour lutter contre ce projet, une pétition a été lancée, qui réunit des noms célèbres, de Matteo Garrone à Paolo Sorrentino. La crainte est que des grands groupes immobiliers s’emparent des cinémas actuellement désaffectés mais aussi de ceux qui sont ouverts. Ces groupes ont les reins assez solides pour fermer également ces salles-là, attendre les dix ans et transformer ces lieux en surface commerciale. 

La France enviée par ses voisins

La discussion est en cours : le président de région assure qu’il est prêt à modifier sa loi. En gardant par exemple une part d’activité culturelle mais plus faible qu’aujourd’hui dans les établissements rachetés. Les grands noms du cinéma mobilisés se disent prêts à se regrouper pour racheter eux-mêmes certains lieux, en offrant aussi sur place d’autres services et activités.

L’exemple fréquemment cité est un endroit, il est vrai, assez magique pour les amateurs : le cinéma Troisi, dans le quartier du Trastevere. À l’abandon, il a été repris par une fondation : un seul écran, un bar et à l’étage, une salle d’étude avec terrasse très prisée des étudiants. Le tout est ouvert jour et nuit. En quelques années, le Troisi est devenu le cinéma à une seule salle le plus fréquenté d’Italie. Dernier détail : se pencher sur ce sujet c’est mesurer à quel point la France est enviée par ses voisins. Les cinéphiles romains donneraient cher pour avoir une offre de salles aussi exceptionnelle que leurs homologues parisiens.