«Ce qui est dingue et inquiétant, c’est de se dire que l’on peut se faire agresser de la sorte en pleine journée, dans une rue passante», observe Me Emilie Lopez. Le 14 janvier, en fin de matinée, sa cliente a été victime d’une sordide agression sexuelle à Cannes (Alpes-Maritimes). Nul ne sait ce qui lui serait arrivé si des passants n’avaient pas mis en fuite son agresseur après l’avoir entendue hurler. Âgé de 39 ans, le suspect a été jugé en comparution immédiate vendredi devant le tribunal correctionnel de Grasse.
Au moment des faits, vers 11h30 rue Georges Clémenceau, la victime, une enseignante de 48 ans, est témoin d’une scène curieuse tandis qu’elle chemine à pied. Elle aperçoit un homme qui aborde une jeune fille de façon pressante. «Il essayait de la toucher tout en lui parlant», rapporte Me Lopez. Se sachant regardé, l’homme change alors de cible. «Il va s’en prendre à ma cliente, lui demander de l’argent tout en essayant de la toucher, comme avec la jeune fille», poursuit l’avocate. La quadragénaire décide aussitôt de partir.
Sidération
Mais l’homme se met à la suivre, même lorsqu’elle change de trottoir. Paniquée, elle se met à courir. L’individu la rattrape et la coince dans une ruelle. Il l’empoigne, la jette au sol, lui arrache le haut de ses vêtements. «Il lui a sorti la poitrine et l’a touchée», détaille Me Lopez. Malgré la violence des faits et l’état de sidération qui s’empare d’elle, la malheureuse ne se laisse pas faire. Elle se débat, tente de porter des coups à son agresseur, hurle. Plusieurs témoins accourent alors, mettant l’homme en fuite. «Ma cliente leur a dit qu’il fallait le suivre à tout prix pour l’arrêter», abonde l’avocate.
C’est ainsi que l’un des témoins voit le suspect s’engouffrer dans un logement, à quelques encablures. Prévenue, la police débarque et l’interpelle. Entre-temps, l’homme s’est mis au lit comme si de rien n’était et fait mine de dormir lorsque les fonctionnaires l’appréhendent. Placé en garde à vue, il joue la carte de l’amnésie, dit avoir tout oublié. D’origine géorgienne, l’homme se dit chimiste au chômage. Il n’est sur le sol français que depuis quelques semaines, un mois tout au plus.
Un regard «déterminé»
Dans le box des prévenus vendredi, il ne changera pas de version, jurant n’avoir aucun souvenir des faits. «C’est tellement plus facile, on n’a pas à répondre aux questions comme ça. En revanche il s’est quand même excusé. Étonnant pour quelqu’un qui ne sait pas ce qu’il a fait...» relève Me Lopez. Dans sa plaidoirie, l’avocate lui a par ailleurs rappelé que la victime, elle, n’oublierait jamais. «Elle a parlé de son regard lors de l’agression, déterminé. Un regard qui, depuis, la suit partout», rapporte le conseil de l’enseignante.
Suivant les réquisitions du procureur de la République, le prévenu a été condamné à quatre ans de prison ferme avec mandat de dépôt. Il a par ailleurs écopé d’une interdiction définitive du territoire national et d’une inscription au fichier des auteurs d’infractions sexuelles. S’agissant de la victime, elle n’aurait «pas encore réalisé» selon son avocate. «Tout est allé très vite, or on sait qu’en la matière les traumatismes sont évolutifs et protéiformes. Elle se dit surtout que ça aurait pu être quelqu’un d’autre», conclut-elle.