Intelligence artificielle : entre incitation et régulation, l'UE cherche encore sa place

L'Union européenne redouble d'efforts pour attirer les acteurs de l'intelligence artificielle sur son sol et elle y parvient. Les projets annoncés représentent des dizaines de milliards d'euros d'investissements. Mais il s'agit surtout, à ce stade, de combler le retard que l'Union européenne a pris vis-à-vis des Etats-Unis et de la Chine, avec notamment ChatGPT et DeepSeek.

Il y a des réussites européennes, comme MistraAI en France, des pôles d'excellence en Allemagne, aux Pays-Bas et surtout au Royaume-Uni, désormais hors Union européenne. Mais ce qui compte maintenant, aux yeux de la Commission européenne, c'est de passer au niveau supérieur. C'est dans cette optique que des annonces ont été faites en début de mois, pour séduire plus d'investisseurs dans le cadre de la boussole "compétitivité" que s'est donnée l'Union.

Réformer le marché des capitaux privés, l'épargne notamment, pour les flécher davantage vers le financement des secteurs innovants, en premier lieu l'intelligence artificielle. Il y a aussi la volonté de simplification avec la création d'un nouveau régime européen de sociétés particulièrement intéressant dans le domaine de la tech, car les investisseurs s'installent souvent dans plusieurs pays à la fois. Le statut de société unique leur permettra de ne plus jongler entre les différents régimes légaux des États membres. Et enfin un Fonds européen pour la compétitivité doit être créé, mais ses contours et son financement restent à préciser. Sera-t-il alimenté par les Etats membres ou par d'éventuels nouveaux emprunts en commun au niveau européen ? C'est toute la question.

Une réglementation équilibrée

L'Union s'est notamment dotée d'un Artificial Intelligence Act qui a justement commencé à entrer en vigueur début février. Il définit plusieurs niveaux de risques liés à l'intelligence artificielle, le plus grave étant celui d'une utilisation à des fins de surveillance généralisée d'une population ou à des fins de maintien de l'ordre. D'autres usages sensibles feront l'objet d'une surveillance renforcée dans quelques mois, à mesure que le règlement entrera en vigueur : l'IA dans l'éducation, par exemple, ou encore dans la gestion des ressources humaines dans les entreprises.

Le reste se verra appliquer un encadrement plus léger. L'Union européenne veut ainsi faire passer le message qu'elle ne veut pas s'immiscer dans tout. Elle veut aussi laisser le champ libre aux investisseurs tout en se protégeant des dérives constatées, notamment en Chine pour ce qui concerne l'ordre public et la notation sociale des citoyens. La stratégie européenne se veut équilibrée entre incitation et régulation pour permettre à l'IA d'être générative, pas seulement de contenus, mais aussi d'emplois.