Orages dans le Var : l’innondation brutale du Lavandou est-elle due à une urbanisation excessive ?

Alors qu’un orage diluvien s’est abattu en l’espace d’une heure sur le sud du Var, ravageant la ville du Lavandou et causant la mort de trois personnes, le maire anticipe déjà les polémiques. Gil Bernardi (LR) rejette toutes les accusations qu’il voit poindre concernant un mauvais aménagement du territoire. «La commune était plus que prête. Tous les réseaux d’évacuation étaient curés de manière impeccable, toutes les berges avaient été refaites», affirme-t-il. «Nous ne sommes pas de ceux qui bétonnent mais de ceux qui débétonnent. Notre PLU (plan local d’urbanisme, NDLR) est des plus malthusiens: nous avons enlevé de nombreuses zones constructibles pour les rendre à la nature.»

L’élu considère que face à un épisode pluvieux aussi important, les dégâts auraient été colossaux dans tous les cas. «Ni nous, ni personne ne sera jamais calibré pour une crue cinq-centennale ou millénaire», insiste-t-il, évoquant le débit d’eau faramineux qui s’est déversé dans la commune en une heure (250 mètres cubes d’eau par seconde, dit-il). La plupart des météorologues ont confirmé depuis hier le caractère exceptionnel de cet épisode pluvieux. Olivier Payrastre, chercheur en hydrologie et risque inondation à l’Université Gustave Eiffel de Nantes, confirme qu’au regard de ces précipitations, la «crue éclair» se serait produite, même en l’absence de toute urbanisation.

Nous ne sommes pas de ceux qui bétonnent mais de ceux qui débétonnent. Notre PLU (plan local d’urbanisme, NDLR) est des plus malthusiens.

Gil Bernardi, maire LR du Lavandou

«La crue s’est formée dans des petits cours d’eau situés en amont du Lavandou, dans une zone très naturelle et aucunement imperméabilisée. Elle serait survenue dans n’importe quel bassin-versant connaissant des précipitations d’une telle intensité», estime-t-il. En revanche, la pression de l’urbanisme en aval, donc dans la station balnéaire, a contribué à aggraver les conséquences de la crue. «Sur ce littoral méditerranéen, la côte est urbanisée en continu, les cours d’eau traversent des zones habitées, qui ont une grande vulnérabilité, c’est-à-dire fortement exposées au risque d’inondations», note-t-il. Le chercheur compare la situation de mardi dans le Var aux inondations d’octobre 2015 dans les Alpes-Maritimes, à Cannes et dans les villes voisines. Les dégâts étaient colossaux, vingt personnes avaient perdu la vie.

Parmi les facteurs aggravants de la crue, Olivier Payrastre évoque la présence de nombreux ponts dans le secteur du Lavandou. Ils peuvent, selon lui, augmenter les ravages : «Les ponts créent des phénomènes d’embâcle : des corps flottants, tels que des troncs d’arbres et des voitures, s’accumulent sous ces ouvrages et bouchent leur entrée. L’eau est donc contrainte de se répandre au-dessus du tablier du pont (la surface de l’ouvrage où se trouve généralement une voie routière, NDLR).» 

Les réseaux d’évacuation vite saturés

Face à ces débordements soudains, les réseaux d’évacuation des eaux ont immédiatement été saturés. Clément Gaillard, docteur en urbanisme, spécialisé dans la conception bioclimatique, considère qu’avec l’imperméabilisation des sols, le point d’engorgement est plus rapidement atteint. À cela s’ajoute, comme l’a affirmé l’adjoint au maire de Vidauban sur BMFTV ce mardi, la qualité du sol, peu absorbant dans cette région. «Vidauban est une cuvette sur un sol argileux qui ne boit pas beaucoup», affirmait-il, redoutant que cet événement exceptionnel se reproduise à l’avenir en raison du dérèglement climatique.

Pour Clément Gaillard, cette option est en effet loin d’être exclue : «La hausse des températures accélère l’évaporation de l’eau et augmente le taux d’humidité dans l’atmosphère. Davantage d’eau peut se condenser, cela augmente le potentiel d’épisodes pluvieux de taille.» Prises en tenailles entre la menace du changement climatique et une urbanisation longtemps menée de façon aléatoire et expansionniste dans les zones touristiques, les stations balnéaires méditerranéennes ont désormais de nombreux défis à relever pour éviter la répétition de tels drames.