L'ancien directeur du FBI a-t-il appelé au meurtre de Donald Trump avec une photo de coquillages ?

C'est une photo de plage qui n'en finit pas de faire des vagues outre-Atlantique. L'ancien directeur du FBI (de 2013 à 2017) se trouve depuis jeudi 15 mai au centre d'une polémique politique aux États-Unis après avoir posté – puis supprimé – une photo.

Dans cette publication légendée "formation sympa de coquillages pendant ma promenade sur la plage" ("cool shell formation on my beach walk"), l'ancien directeur du FBI avait partagé une photo de coquillages dans le sable représentant les nombres "86 47".

Le premier, 86, fait référence à l'argot américain et était utilisé à l'origine dans la restauration pour dire qu'un article était en rupture de stock. Puis il a évolué pour signifier "jeter", "se débarrasser de" ou "refuser de servir" un client, selon le dictionnaire américain de référence Merriam-Webster. Ce mot était notamment utilisé pour désigner le refus de servir des personnes ivres.

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La même source précise que "parmi les sens les plus récents adoptés figure une extension logique des précédents, avec le sens de 'tuer'". Mais le dictionnaire n'aborde pas cette évolution sémantique "en raison de sa relative récence et de sa rareté d'usage".

Le nombre 47 ferait simplement référence au 47e président des États-Unis – Donald Trump, donc.

"James Comey vient d'appeler à l'assassinat du président Trump"

Toujours est-il qu'en quelques heures, le message de James Comey a été interprété par plusieurs républicains comme un appel à assassiner Donald Trump. À commencer par son fils, Donald Trump Jr. qui commente sur X la publication de l'ancien patron du FBI : "James Comey appelle tranquillement à l'assassinat de mon père. Voilà celui que les médias démocrates vénèrent. Dément !!!"

Le chef de cabinet adjoint à la Maison Blanche, Taylor Budowich, dénonce quant à lui un message "qui peut clairement être interprété comme un 'contrat' sur le président en exercice des États-Unis – un message gravé dans le sable". "Ceci est profondément préoccupant pour nous tous et fait l'objet d'un traitement sérieux", ajoute-t-il.

L'affaire est traitée avec gravité par les autorités fédérales, à l'instar de la ministre de la Sécurité intérieure, Kristi Noem. Tout en expliquant sur X que "l'ancien directeur déshonoré du FBI James Comey vient d'appeler à l'assassinat du président Trump", elle précise que son ministère et le Secret Service – le service chargé de la protection du président – "mènent l'enquête sur cette menace".

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L'actuel directeur du FBI, Kash Patel, déclare quant à lui que ses services "fourniront tout le soutien nécessaire" pour enquêter, précisant que ce n'est pas sa "compétence principale" mais bien celle du Secret Service – qui confirme étudier le message polémique.

Toutes ces accusations ont une résonance particulière moins d'un an après la tentative d'assassinat de Donald Trump, à l'été 2024. Face au tollé de réactions, James Comey, en plus de supprimer rapidement sa publication, s'est justifié dans un autre message publié sur Instagram.

"J'ai posté plus tôt une photo de coquillages que j'ai vus aujourd'hui (jeudi) lors d'une promenade sur la plage, pensant qu'il s'agissait d'un message politique. Je ne savais pas que certaines personnes associaient ces nombres à la violence", écrit-il. "Cela ne m'avait jamais traversé l'esprit, mais je m'oppose à toute forme de violence, alors j'ai supprimé la publication."

"Forme de résistance silencieuse pour l'Amérique anti-Trump"

Cette explication n'a pas convaincu le principal intéressé, Donald Trump, qui a réagi vendredi lors d'une interview accordée à Fox News avant de quitter Abu Dabi, après un voyage de quatre jours au Moyen-Orient.

"Il savait exactement ce que cela signifiait. Un enfant sait ce que cela signifie. Si vous êtes directeur du FBI et que vous ne savez pas ce que cela signifie ? Cela signifie assassinat. Et c'est dit haut et fort", a déclaré le président américain, qui a ajouté que James Comey "a été attaqué si durement parce que les gens m'apprécient et apprécient ce qui se passe dans notre pays. Et il appelle à l'assassinat du président."

En attendant de connaître les résultats de l'enquête du Secret Service, le média américain Distractify donnait déjà des clés de compréhension du mystérieux code "86 47", en mars dernier. Associé à une "forme de résistance silencieuse pour l'Amérique anti-Trump", ce nombre s'est retrouvé dans plusieurs vidéos publiées sur les réseaux sociaux ces derniers mois, notamment sur TikTok, comme "un exemple parmi d'autres d'actions que peuvent mener ceux qui sont mécontents de l'action du gouvernement américain".

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Une réminiscence de ces nombres se retrouve aussi lors du mandat de Joe Biden, lors duquel des opposants politiques pouvaient porter des accessoires, comme des t-shirts floqués "86 46", appelant à "destituer" celui qui était alors le 46e président des États-Unis.

En tout cas, l'opposition de James Comey à Donald Trump – qui l'avait limogé au bout d'un an de son premier mandat, arguant qu'il n'était plus capable de diriger efficacement le FBI – aura été tout sauf silencieuse… comme le sont rarement ses promenades (politiques) à la plage. Une précédente photo publiée sur Instagram, en octobre dernier, en atteste : celui qui est maintenant auteur de romans policiers a alors "vu à la plage" un coquillage bleu sur lequel était peint en blanc "Vote Harris".