La liste des livres prohibés selon les directives de Donald Trump ne cesse de s’allonger. Selon une note du secrétaire d’État à la Défense Pete Hegseth, dévoilée par le Washington Post, les établissements scolaires gérés par son ministère doivent « immédiatement » retirer de leurs rayonnages tous les ouvrages qui traitent, de près ou de loin, de la diversité ou de l’inclusion. Sont notamment concernés « les livres susceptibles de promouvoir l’idéologie du genre ou l’idéologie de l’égalité face aux discriminations », est-il précisé.
Dans les quelque 160 établissements scolaires gérés par le ministère de la Défense à travers le monde, qui reçoivent près de 70 000 élèves, pour la plupart enfants de militaires, le tri a déjà commencé. Selon la presse anglo-saxonne, des titres traitant de la place de l’immigration dans l’histoire américaine, la biographie d’un soldat transgenre de la Guerre civile, des précis de psychologie ou d’éducation sexuelle ont déjà été retirés. Mais aussi l’histoire d’une petite fille qui détestait ses taches de rousseur...
« C’est un grand choc pour moi », a témoigné l’actrice américaine Julianne Moore, auteur de Freckleface Strawberry, (que l’on peut traduire par Tête de fraise). Son livre pour enfants, écrit en 2007, « a été banni par l’administration Trump des écoles dirigées par le département de la Défense des États-Unis », a-t-elle annoncé sur les réseaux sociaux.
Freckleface Strawberry, livre inspiré par sa propre vie, raconte l’histoire d’une petite fille de sept ans tout ce qu’il y a de plus normal, excepté qu’elle déteste sa chevelure rousse et son visage constellé de taches de rousseur. « C’est un livre que j’ai écrit pour mes enfants et pour d’autres enfants afin de leur rappeler que nous luttons tous, mais que nous sommes unis par notre humanité et notre fraternité », souligne Julianne Moore, dévastée.
« Il m’est pénible de constater que des enfants comme moi [...] n’auront pas accès à un livre écrit par quelqu’un dont l’expérience de vie est si semblable à la leur »
Julianne Moore
L’actrice américaine, qui était à l’affiche du film de Pedro Almodovar, La Chambre d’à côté, est d’autant plus accablée qu’elle connaît bien la vie militaire. Son père, Peter Moore Smith, a passé sa carrière dans l’armée et est un vétéran de la guerre du Vietnam. Elle-même a étudié à la Frankfurt American High School, lycée géré par le ministère de la Défense qui fonctionnait autrefois à Francfort, en Allemagne. « Il m’est pénible de constater que des enfants comme moi, qui grandissent avec un parent dans l’armée et qui fréquentent une école militaire, n’auront pas accès à un livre écrit par quelqu’un dont l’expérience de vie est si semblable à la leur, regrette Julianne Moore. Je ne peux m’empêcher de me demander ce qui est si controversé dans ce livre d’images pour qu’il soit interdit par le gouvernement américain. » « Je suis vraiment attristé et je n’aurais jamais pensé voir cela dans un pays où la liberté de parole et d’expression est un droit constitutionnel », s’est alors indignée Julianne Moore sur ses réseaux sociaux.
Selon le Guardian , le ministère de la Défense a envoyé un mémorandum aux parents dont les enfants sont scolarisés dans écoles du Pentagone. Cette note indique que l’accès aux bibliothèques est suspendu pendant une semaine afin de mener un « examen de conformité » des livres que l’administration accuse d’« endoctrinement radical ».
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Un représentant démocrate du Maryland s’est également fait l’écho de l’incompréhension des parents d’enfants devant l’application sans discernement de ces directives. Jamie Raskin relate un échange qui a eu lieu dans une de ces écoles d’où avaient été décrochés les portraits de la militante pour le droit de vote des femmes Susan Anthony et de Martin Luther King, Au parent qui demandait pourquoi le portrait de Leonard de Vinci n’avait, lui, pas été retiré, l’école aurait répondu «parce qu’il s’agit d’un vrai personnage historique».