Guerre dans la bande de Gaza : que contient l'accord d'association entre l'UE et Israël que les Européens veulent réexaminer ?
Les dirigeants européens haussent le ton. Face à la situation humanitaire catastrophique et l'intensification des opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza, l'Union européenne (UE) va lancer un réexamen de son accord d'association avec Israël, a annoncé sa cheffe de la diplomatie, Kaja Kallas, mardi 20 mai. Cette décision fait suite à la requête des Pays-Bas, soutenue par 17 pays sur les 27 Etats membres, qui ont demandé à la Commission de vérifier dans quelle mesure le gouvernement israélien respectait bien les engagements prévus par ce texte, en vue d'une potentielle révision.
Cette annonce "reflète une incompréhension totale de la réalité complexe à laquelle Israël est confronté", et "encourage le Hamas à rester sur ses positions", a réagi dans la soirée le porte-parole de la diplomatie israélienne. "Ces accords comportent une dimension politique et une dimension commerciale, donc ni Israël ni l'Union européenne n'ont intérêt à y mettre fin, mais la situation des civils [à Gaza] nous oblige à avancer d'un cran supplémentaire", a expliqué le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, sur France Inter mardi.
Un accord visant à "encourager la coopération régionale"…
Signé en juin 2000 par les pays membres de l'UE et Israël, cet accord d'association est la base juridique qui encadre les relations commerciales entre les deux parties. Sa vocation, précisée dans son article 1, est de "développer (…) une convergence croissante des positions sur les questions internationales" des pays membres et de l'Etat hébreu, d'"encourager la coopération régionale en vue de consolider la coexistence pacifique et la stabilité économique et politique", et de "promouvoir la coopération dans d'autres domaines présentant un intérêt réciproque".
Contenant 85 articles, cet accord encadre notamment les échanges de produits agricoles et agroalimentaires, de capitaux, de services, de marchés publics et des investissements, ainsi que les droits de propriété intellectuelle et commerciale. Le texte évoque également la coopération des Européens et des Israéliens "dans les domaines de la prévention de la détérioration de l'environnement, de la lutte contre la pollution et de l'utilisation rationnelle des ressources naturelles".
… et conditionné au respect des droits de l'homme
Toutefois, l'article 2 conditionne cet accord au "respect des droits de l'homme et des principes démocratiques, qui guide leur politique intérieure et internationale et constitue un élément essentiel du présent accord". Une exigence qui semble en contradiction avec les agissements du gouvernement israélien dans la bande de Gaza. Lundi, Benyamin Nétanyahou a annoncé sa volonté de prendre "le contrôle de tout le territoire" palestinien, concédant, pour des "raisons diplomatiques", à autoriser l'entrée d'une "quantité de base de nourriture destinée à la population", pour éviter des "images de famine de masse" risquant de saper le soutien de "pays amis".
Des déclarations dénoncées par plusieurs pays occidentaux, dont la France, qui ont averti qu'ils ne resteraient "pas les bras croisés" face aux "actions scandaleuses" d'Israël dans l'enclave palestinienne. Faute d'amélioration de la situation des civils à Gaza, "nous devons hausser le ton", a affirmé la Suède. En outre, une note d'analyse rédigée par le représentant spécial de l'UE pour les droits de l'homme, rendue en juillet 2024 et citée par Le Monde, fait état d'un usage excessif de la force, de punition collective, de déplacement de masse répété, de destructions massives, d'attaques contre les hôpitaux ou encore de détentions arbitraires.
En annonçant une potentielle renégociation de cet accord, l'UE dispose d'une arme économique de poids : elle est le premier partenaire commercial d'Israël, représentant près d'un tiers des échanges de marchandises du pays avec les pays étrangers en 2024. De son côté, l'Etat hébreu n'est que le 31e partenaire commercial de l'UE, représentant ainsi près de 0,8 % du total des échanges de marchandises de l'UE avec des pays étrangers en 2024 et le troisième partenaire commercial de l'UE dans la région méditerranéenne, après le Maroc et l'Algérie, selon la Commission européenne.