VIDEO. "Notre statut d'humanitaires n'est pas respecté" : à Gaza, des civils, mais aussi des médecins "pris pour cible de manière répétée" par l'armée israélienne

En janvier 2025, après quinze mois de guerre, près de 47 000 habitants de Gaza ont été tués, selon l’Organisation mondiale de la santé. Les analyses de l’agence satellitaire de l’ONU montrent que près de 70% des zones urbaines, 95% des écoles et plus de 40% des hôpitaux ont été dévastés.

L’ampleur des bombardements a causé une hécatombe de blessés dans la population. Parmi eux, une majorité de femmes et d’enfants. Dans cet extrait de "Complément d'enquête", un médecin en mission à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, témoigne des conditions très périlleuses dans lesquelles les équipes de Médecins sans frontières ont tenté de les soigner. Pour garder des preuves de ces situations extrêmes, il a conservé les photos et les vidéos des deux missions qu’il a effectuées à Rafah.

Un enfant blessé ou tué toutes les 10 minutes, selon l'UNICEF

Dans un hall de mariage pourtant notifié à l'armée israélienne comme lieu de refuge pour la population civile, un obus de tank de l'armée israélienne a traversé la pièce (heureusement sans exploser) et causé la mort d'une fillette de 6 ans, raconte le Dr Léo Cans. Lui-même n'avait "jamais vu autant d’enfants orphelins, autant d’enfants brûlés". Selon l'UNICEF, durant cette guerre, un enfant a été tué ou blessé toutes les dix minutes.

"Quand vous voyez qu’il y a une telle proportion de civils, de femmes et d’enfants dans ces hôpitaux, vous vous dites que nécessairement, les bombardements sont indiscriminés."

Dr Léo Cans, médecin chef de mission à Médecins sans frontières

dans "Complément d'enquête"

En travaillant pour Médecins sans frontières, Léo Cans a pourtant l'habitude des zones de conflit. Mais "normalement, en contexte de guerre, c’est principalement des combattants qui sont soignés, ou qui sont tués. Là, ce n’est pas le cas !", dit-il, affirmant avoir vu arriver "dans les afflux massifs de blessés (...) plus de civils que nulle part ailleurs". Selon l'OMS, ces quinze mois de guerre ont fait plus de 110 000 blessés dans la population civile. 

Dans ce conflit, outre les civils, des humanitaires aussi ont été attaqués. Léo Cans raconte une évacuation qui a tourné au drame, le 18 novembre 2023.

"On s’est fait tirer dessus par l’armée israélienne alors qu’on devait être protégés et qu’on avait tout mis en œuvre, donné toutes les informations nécessaires à cette protection."

Ce jour-là, alors que les bombardements se rapprochent de l’hôpital Al-Shifa de Gaza City (aujourd’hui détruit) où elles travaillaient, les équipes de MSF demandent à être évacuées en urgence. L'armée israélienne leur fournit un itinéraire, une date et une heure de départ pour le sud de la bande de Gaza. Mais à la sortie de Gaza City, elles tombent sur un checkpoint qui refuse de les laisser passer. Elles préviennent alors l'armée israélienne qu'elles font demi-tour.

"Et sur le chemin du retour, poursuit le médecin, à une centaine de mètres du bureau, les équipes ont vu les chars israéliens devant eux qui ont commencé à tirer. Alaa, qui était dans la deuxième voiture, a été touché à la tête et il est mort quasiment sur le coup. Un membre de sa famille a reçu un éclat de carrosserie dans l'abdomen, et il est mort plusieurs jours après."

Deux jours après cette évacuation ratée, un membre de l'équipe, voyant "les chars tirer sur les véhicules MSF" a pu sortir sur le balcon pour filmer. Sur les images, on peut voir que les véhicules sont très clairement identifiés. Selon Léo Cans, cette situation s'est répétée plusieurs fois.

Extrait de "Benyamin Nétanyahou : un chef d'Etat hors limites ?", un document à voir dans "Complément d'enquête" le 6 mars 2025.

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