Une mystérieuse pièce métallique retrouvée au Danemark questionne la provenance du casque de Sutton Hoo

À qui appartient le légendaire casque de Sutton Hoo ? Retrouvé en 1939 sur un site archéologique du Suffolk, au Royaume-Uni, ce casque de fer recouvert de cuir, daté du VIIe siècle, suscite de nombreuses interrogations chez les historiens. Sa provenance, notamment, reste très mystérieuse. Qui de l’Angleterre, de la Suède, de l’Allemagne ou du Danemark peut en revendiquer la propriété ? Au moment de sa découverte, le casque de Sutton Hoo, considéré comme l’un des plus grands trésors de son époque, était brisé en 500 fragments. Le British Museum avait alors décidé de sa restauration, avant de le conserver et de l’exposer dans son enceinte des années après.

Les plaques décoratives en bronze où figurent des scènes de combats, ou encore des animaux, font référence aux styles nord européen et romain antérieurs. L’hypothèse d’une provenance suédoise ou du sud de l’Allemagne a donc longtemps été privilégiée, car les motifs représentés étaient similaires à ceux des casques et bijoux retrouvés dans ces régions. Cette hypothèse a d’ailleurs été renforcée par la présence, dans les 260 instruments de musique, bijoux, vaisselle, armes et armures retrouvés dans le Suffolk en 1939, d’artefacts semblables aux trésors scandinaves. Jusqu’à cette année.

Découverte d’un tampon métallique

Le 27 mars dernier, des chercheurs danois ont révélé à la BBC avoir étudié un tampon métallique déterré en 2023 par l’archéologue local Jan Hjort sur l’île de Tåsinge. Ce petit objet en alliage de cuivre, qui ne mesure que cinq centimètres sur quatre, arbore un motif ressemblant « de manière frappante » aux figures de cavaliers estampées sur le casque de Sutton Hoo, selon les experts du musée national du Danemark. Les archéologues le décrivent comme un dé. Ils l’ont même rebaptisé « Patrice ». Il s’agirait, en fait, d’un outil d’estampage utilisé dans les procédés de fabrication comme la métallurgie. La pièce permettrait de créer une empreinte dans le métal plus mou, d’où la présence de motifs sur ses faces.

Le mystérieux tampon, retrouvé sur l’île danoise de Tåsinge, arborant des motifs similaires à ceux présents sur le casque de Sutton Hoo. Nationalmuseet

Même s’ils ne sont pas identiques à ceux du casque de Sutton Hoo, les symboles identifiés sur le dé présentent de nombreuses similitudes : oreilles, naseaux, queues de chevaux, crinières... Les spécialistes confirment à la BBC que le design du tampon est « le parallèle le plus proche jamais identifié ». D’autant plus que les scènes frappées sur le casque font exactement la même taille que les côtés du tampon métallique. L’armure viendrait-elle de l’étranger ? Les Anglo-Saxons auraient-ils adopté les techniques scandinaves pour le confectionner ? Mystère...

Fabriqué dans un atelier de métallurgie danois ?

Côté danois, on revendique la propriété du trésor. L’archéologue, préhistorien et conservateur du musée national du Danemark, Peter Pentz, révèle que l’île de Tåsinge, où a été retrouvé le casque de Sutton Hoo, aurait abrité un atelier de métallurgie au VIIe siècle. « Je dirais que ce dé provient du même atelier ou du même environnement que le casque de Sutton Hoo dont la production a probablement eu lieu ici ou dans le cadre d’échanges commerciaux », remarque-t-il. Le chercheur attend toutefois une numérisation 3D détaillée de certains motifs de ce tampon très usé qui ont été fragmentés en plusieurs morceaux et qui heurtent sa théorie à « certains obstacles ».

« Il est difficile de déterminer exactement les relations et la dynamique de pouvoir qui existaient entre le Danemark, la Suède et la communauté de Sutton Hoo à cette époque, sur la base d’une seule découverte »

Laura Howarth, responsable de l’archéologie à Sutton Hoo

L’étude, menée par Peter Pentz, attire la sympathie de ses confrères qui ne manquent pas de partager leur enthousiasme. « Il semble désormais probable que le casque ait été fabriqué dans le sud de la Scandinavie à la fin du VIe ou au début du VIIe siècle, ou du moins qu’il ait été fortement influencé par le style artistique de cette région », se réjouit auprès de LiveScience Howard Williams, archéologue à l’université de Chester. Helen Gittos, historienne médiéviste à l’université d’Oxford, ajoute dans ce même article que l’hypothèse du danois « renforce l’idée de l’interconnexion entre les élites militaires de cette époque dans le nord-ouest de l’Europe ». 

À nos confrères de la BBC, Laura Howarth, responsable de l’archéologie à Sutton Hoo, aujourd’hui propriété du National Trust, semble plus mesurée : « Il est difficile de déterminer exactement les relations et la dynamique de pouvoir qui existaient entre le Danemark, la Suède et la communauté de Sutton Hoo à cette époque, sur la base d’une seule découverte. » En attendant d’en savoir plus sur cette mystérieuse histoire du casque de Sutton Hoo, le musée national du Danemark à Copenhague exposera dès ce mois d’avril le tampon.