«Des gens vomissent en voyant où ils se sont baignés» : un mystérieux phénomène oblige des dizaines de piscines espagnoles à fermer

À Madrid,

« Le maître nageur a découvert les excréments lundi dernier en fin d’après-midi, raconte au téléphone Jose Manuel Martínez Robles, le maire de Segura de la Sierra, une commune andalouse de la province de Jaen, au sud de l’Espagne. On a dû suspendre les activités prévues et appliquer un traitement de choc ». La piscine de Cortijos Nuevos, le village appartenant à la commune de Segura, était propre dès le lendemain. Mais l’édile a décidé de faire patienter les nageurs 48 heures de plus. Une décision significative dans l’un des trois départements d’Espagne où les températures montent le plus haut. « On ne sait pas si c’est un accident ou si c’est intentionnel. Mais au cas où ce soit intentionnel, on a voulu marquer le coup et éviter d’alimenter un phénomène viral ».

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Phénomène ou « défi viral » selon le terme espagnol, c’est l’expression qu’utilisent les médias locaux depuis que des dizaines de piscines ont dû fermer leurs installations après avoir effectué des découvertes similaires. Un influenceur santé s’est insurgé contre cette « mode » répugnante, rappelant tous les risques associés à la pratique : « Salmonelle, hépatite A, rotavirus, noroviurs… égraine Enfermero Jorge Ángel sur TikTok. Et en plus, c’est dégoûtant ! Moi, si j’attrapais le coupable, je lui mettrais une amende, et en plus, une bonne diarrhée d’une semaine, qu’il ait les fesses qui piquent un peu ! ».

Fermeture de « plus de 300 piscines »

Mais une viralité discrète, puisque personne n’a jamais vu aucune vidéo sur TikTok ou Instagram, ni aucun message sur Facebook ni X, qui présenterait comme géniale et hilarante l’idée de déposer un étron dans le grand bain. Les médias espagnols répètent un même chiffre, sans jamais justifier d’où il provient : le phénomène aurait provoqué la fermeture de « plus de 300 piscines ». En cherchant dans la presse locale et régionale les listes de piscines concernées et leur localisation, Le Figaro a recensé une cinquantaine de cas distincts en juillet 2025. Par ailleurs, en Catalogne, la région où le plus grand nombre de fermetures a été rapporté, au moins un cas, à Berga, a été attribué à l’incident d’un garçonnet ne maîtrisant pas encore complètement ses sphincters. Les déjections par vandalisme existent, mais elles ne semblent pas répondre à une concertation sur les réseaux sociaux, et leur nombre démontrable est six fois inférieur au chiffre proclamé sans preuve.

À Orduña, en Biscaye, l’une des provinces du Pays basque espagnol, les responsables d’une ont dû fermer boutique… huit fois au mois de juillet ! Sans jamais identifier de responsable. « Tu trouves la merde et c’est impossible de savoir qui l’a laissée là. Des gens vomissent en voyant où ils se sont baignés, il faut désinfecter, faire des tests chimiques… On a même dû vider l’eau, ce qui occasionne des frais importants…».

Ces événements ont lancé les journalistes d’El Periódico de Catalunya  dans une enquête sur la méthode employée. Verdict, les « vandales », comme les appellent les maires à travers la géographie espagnole, ne travaillent pas sur place mais… à emporter. La méthode consiste à trimbaler à la piscine la matière fécale préparée et emballée au préalable. « Un individu met la matière fécale dans un sachet et le sachet dans la poche du maillot, puis le laisse tomber discrètement ; pendant qu’il procède, des amis l’entourent pour le cacher, et un autre filme la scène depuis le bord », témoigne anonymement un policier auprès du quotidien espagnol. Le profil type serait un jeune, souvent mineur, le plus souvent adolescent, presque toujours mâle, selon le même détective.

Hurlements

La découverte se manifeste souvent par des hurlements. La plus célèbre réaction est celle d’un TikToker au 4 millions d’abonnés. « Vous n’allez pas croire ce qu’il y avait dans la piscine, indique-t-il d’une voix aigüe face à la caméra. Je suis tombé sur un morceau de meeerde !!! ». Une vidéo reprise ensuite par les grands médias, dont le journal télévisé de Telecinco

La politique de communication dépend de chaque localité. À Ségovie, 100 kilomètres au nord de Madrid, la presse locale a informé d’une fermeture pour présence d’excrément, mais la Mairie n’a reconnu qu’un « acte de vandalisme ». Joint par téléphone, l’hôtel de ville laisse entendre que de plus amples précisions risqueraient d’inciter à la récidive.

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À Orduña, au Pays basque, c’est à peu près la politique inverse. Après huit fermetures partielles en une semaine, les tâches de nettoyage, désinfection et vérification de l’état de l’eau, un reportage de la télévision régionale et les conversations des administrées monopolisées par le scatologique sujet, le maire prend la parole pour menacer de fermer la piscine 48 heures. C’était il y a 15 jours, et plus aucun incident n’a été déploré depuis lors dans la commune.