Ces instances qui nous ont agacés en 2024 : avec les affaires Swiatek et Sinner, le tennis s’est totalement décrédibilisé dans «sa lutte» contre le dopage
Durant les fêtes de fin d’année, la rédaction des sports du Figaro vous livre une série sur les personnalités qui ont agacé en 2024. Pour des raisons diverses et variées.
Deux numéros un mondiaux, impliqués dans des affaires de dopage cachées au grand public. Des contrôles opaques et une iniquité de traitement dans les suspensions. N’en jetez plus ! Le tennis a décidément de nombreux trous dans la raquette dans sa lutte contre le dopage. Rien de nouveau sous le soleil, cela dit. Une enquête du Daily Mail publiée en juin 2022, révélait que la Fédération internationale de tennis (ITF) laissait les joueurs organiser leurs propres contrôles antidopage et gonflait le nombre de tests effectués. Les joueurs étaient, selon cette enquête, même prévenus quatre jours avant leurs contrôles… Et pour « lutter » contre le dopage, le tennis a sa propre institution, l’Agence internationale pour l’intégrité du tennis (ITIA). Si elle répond aux règles de l’Agence mondiale antidopage (AMA), elle n’en dépend pas directement. L’ITIA fixe ainsi ses propres règles dans son Tennis Antidoping Programme (TADP). C’est le seul sport d’envergure à procéder ainsi. Sa volonté réelle d’éradiquer le dopage ne saute clairement pas aux yeux et les deux grosses affaires qui l’ont secoué 2024, ont mis en lumière ses dysfonctionnements.
Contrôles opaques
Avec un numéro un mondial (Jannick Sinner) et une numéro 2 (Iga Swiatek) qui s’en sortent impunément, ou du moins sans trop de dégâts. La quadruple lauréate de Roland-Garros Swiatek a été suspendue un mois à l’automne pour un contrôle positif à une substance interdite, la trimétazidine. Dans le plus grand secret. L’Italien Jannik Sinner en mars 2024 a subi deux contrôles antidopage positifs au clostebol (anabolisant) à huit jours d’intervalle. L’ITIA ne l’a révélé que cinq mois plus tard, après avoir clos la procédure et lui avoir infligé une maigre sanction : un retrait des points et de gains pris au Masters 1000 d’Indian Wells, tournoi durant lequel il a été contrôlé…
Pour sa défense l’Italien avait expliqué avoir subi une contamination par un membre de son staff. L’ITIA avait accepté ses explications. L’Agence mondiale antidopage (AMA), moins. Elle a annoncé avoir déposé un appel dans ce dossier explosif auprès du Tribunal arbitral du sport (TAS). Le prodige de 23 ans reste ainsi sous la menace d’une suspension d’un à deux ans. L’ITIA a par ailleurs jugé qu’il n’y avait «pas de faute ou de négligence importante» de la part d’Iga Swiatek. Raison pour laquelle l’agence a suspendu la Polonaise seulement un mois, le minimum.
Iniquité de traitement
Ces deux tests positifs passés sous silence pendant des mois, ont provoqué un grand malaise. En tant que stars, Sinner et Swiatek peuvent faire immédiatement appel, construire leur défense avec des juristes de premier plan et faire analyser chaque médicament et complément alimentaire dans un laboratoire agréé par l’AMA pour traquer les contaminations. Mais tous les joueurs et joueuses ne bénéficiaient pas de pareille clémence. Et le deux poids, deux mesures, n’a jamais été aussi vrai.
Demandez à l’ancienne numéro un mondiale Simona Halep, désormais en fin de carrière, suspendue dans un premier temps pendant quatre ans pour un contrôle positif identique à celui de Sinner... Le Suédois Mikael Ymer a été, lui, suspendu huit mois pour trois no-shows (manquement aux règles antidopage), alors qu’il n’a jamais été contrôlé positif. Nikola Bartunkova, joueuse tchèque de 18 ans et finaliste du tournoi junior de Wimbledon 2023, a été contrôlée positive à la trimétazidine à deux reprises au printemps, comme Swiatek. Ne bénéficiant pas de l’assistance d’un avocat de la défense, elle a été suspendue six mois par l’ITIA... Le joueur de double italien Stefano Battaglino a été contrôlé positif au clostebol comme Sinner et a également déclaré que la contamination était due à un traitement d’un physiothérapeute. Mais Battaglino n’a pas réussi à rendre son histoire aussi crédible que celle de Sinner. Suspendu en septembre pour quatre ans, le joueur de 26 ans, sans grade du circuit, va probablement titrer un trait sur sa carrière. Selon que vous serez puissant ou misérable... La liste est longue.
« Je m’interroge simplement sur la façon dont le système fonctionne (…) Pourquoi certains joueurs ne sont-ils pas traités de la même manière que d’autres? Peut-être qu’il y a des raisons de classement derrière cela, ou peut-être que d’autres ont plus de soutien financier derrière eux ou des équipes juridiques plus fortes ». Si c’est Novak Djokovic, en personne, qui le dit…