Après une saison chaotique - entre un Tournoi des six nations « mal embarqué, mais bien terminé », et une tournée en Argentine marquée par les débordements judiciaires -, pour faire le deuil d’une Coupe du monde à domicile achevée dès les quarts de finale, l’heure est venue pour le XV de France de se projeter à nouveau. « Nous sommes sur le chemin pour 2027 », a répété Fabien Galthié ce jeudi, en conférence de presse. Une nouvelle quête, qui commence samedi (21 h 10, TF1) face au Japon, avec l’objectif d’être, enfin, sacrés rois du monde en Australie dans trois ans.
Pour l’atteindre, on pensait que le sélectionneur allait privilégier la continuité, lui dont le mantra, pendant quatre ans, fut de privilégier les mêmes joueurs afin de gonfler leur capital expérience. Surprise, donc, de constater le virage pris. Terminé la (p)référence aux joueurs dit “premium”. Quelques cadres sont décrochés. Ainsi Gaël Fickou et ses 90 sélections, rétrogradé sur le banc des remplaçants après 48 titularisations d’affilée (depuis le 1er février 2019). Ainsi Charles Ollivon et Romain Taofifenua, hors de la feuille de match. Ainsi Jonathan Danty ou Cameron Woki, même pas dans le groupe des 42.
«Ce n’est pas une rupture»
Fabien Galthié et son staff ont changé de cap. Tevita Tatafu (22 ans, 0 sélection), Emmanuel Meafou (26 ans, 2), Alexandre Roumat (27 ans, 4), Émilien Gailleton (21 ans, 3) ou encore Léo Barré (22 ans, 4) seront titulaires au coup d’envoi du premier test de la tournée de novembre. En comptant les remplaçants, 7 des 23 Bleus opposés aux Brave Blossoms n’ont pas participé à la Coupe du monde il y a un an. Un renouvellement d’un tiers.
Le sélectionneur a pris son temps pour tenter d’expliquer les tenants et aboutissants de ce choix inattendu. « C’est l’équipe qui nous semble la plus en forme du moment. La notion de vécu importe toujours, mais il y a surtout de jeunes joueurs qui poussent pour intégrer les 23. Ça crée de l’émulation avec les joueurs avec qui on a voyagé pendant cinq saisons. » Où est passé celui qui justifiait de reconduire les mêmes parce que « l’équipe de France, ce n’est pas “Koh-Lanta” » ? « Je le maintiens. Mais j’ai toujours dit, aussi, qu’on poussait tous les joueurs à venir chercher ce maillot… »
Et de préciser le fond de sa nouvelle philosophie. « Ce n’est pas une rupture, mais une évolution naturelle. Il n’y a pas de zone de confort en équipe de France. » Un message à double détente. Encourager les jeunes à saisir leur chance. Piquer les anciens pour qu’ils se remettent en question. « On veut conserver nos meilleurs joueurs de ces cinq dernières années. Mais, pour cela, il faut qu’ils puissent se régénérer afin de continuer à progresser. Et non stagner, voire baisser. Quel que soit leur âge, ils peuvent encore capitaliser sur leur potentiel et revenir prochainement sur la feuille de match. Ce sont des compétiteurs, je suis sûr qu’ils vont nous montrer qu’ils sont toujours là. »
Des décisions momentanées ou amenées à durer ?
Car, Galthié l’assure, les bannis ne l’ont pas mal pris et redoublent d’engagement aux entraînements. « On parle d’une équipe de France sur le chemin menant à la Coupe du monde, pas d’un projet individuel. Les joueurs sont alignés avec nos décisions. » Des décisions momentanées ou amenées à durer ? « Attention, on ne parle pas d’eux à l’imparfait ! Pas un de ces joueurs n’est sur une voie qui ne mènerait plus au XV de France. Ils sont toujours en course, en capacité de reprendre le maillot, martèle le sélectionneur. Il y a une rotation, une saine émulation, mais on compte sur eux. On a besoin d’eux, de leur vécu, pour voyager dans notre vision à trois ans. »
Peuvent-ils espérer revenir dès la semaine prochaine, pour le choc face à la Nouvelle-Zélande ? La gêne est palpable. « Sur le principe, on ne peut pas fermer une porte à quelqu’un. Tout le monde doit penser qu’il peut jouer. Après, il y a quand même une cohérence dans l’enchaînement des matchs. Celui contre les All Blacks ne sera que le deuxième rendez-vous de notre saison… » Les cadres ne vont pas tout de suite être remis sur le mur bleu.