Captain America : Brave New World avec Harrison Ford, les USA de Trump et Musk dans un miroir (à peine) déformé
On respire ! Après une série de mauvais films testostéronés aux « multivers », qui auront fini par lasser la patience des spectateurs, Marvel relève la tête et offre un nouveau blockbuster digne de ce nom, bien ancré sur la terre ferme. Quatrième film dédié au super-héros patriote portant la bannière des États-Unis en guise de costume Captain America : Brave new world, porte un titre qui fait clairement référence au roman d’anticipation d’Aldous Huxley, Le meilleur des mondes. Voilà qui ne manque pas d’ironie, aux vues du pire des mondes décrit durant les deux heures de spectacle continuel, bourré de castagne et de course-poursuite menées à mille à l’heure.
L’intrigue ne s’embarrasse pas de fioritures. Elle met en scène une Amérique de comic-books soumise à des menaces immenses venues d’ailleurs. Une météorite géante s’est écrasée dans l’océan. Au cœur de cette île surgie des étoiles, se trouve un nouveau minerai miracle : l’Adamantium. Les États-Unis cherchent à faire alliance avec le Japon, la France et l’Inde pour exploiter cette mine d’or à ciel ouvert.
Pour camper le nouveau Président des États-Unis, Marvel est allé chercher Harrison Ford, l’éternel Indiana Jones de Spielberg ou le Han Solo de Star Wars. Le symbole est fort. À 82 ans, toujours vaillant, Ford incarne Thaddeus Thunderbolt Ross, un général jusqu’au-boutiste qui dans le MCU (Marvel Cinematic Universe) n’a jamais vraiment eu bonne réputation. Il apparaissait déjà - avec une belle grosse moustache - sous les traits de William Hurt dans les précédents films de la saga (de Hulk aux Avengers). Père de Betty Ross (Liv Tyler), la fiancée à Bruce Banner/Hulk, Ross affirme avoir changé. Le peuple américain l’a donc élu président. Ce chef d’État manie la poigne de fer dans un gant de velours.
Le piège se referme
Quant à Captain America, lui aussi a changé. Il ne s’agit plus de Steve Rogers, grand surhomme blond aux yeux bleus incarné à l’écran par Chris Evans, mais bien d’Anthony Mackie, qui joue le rôle de Sam Wilson. Ce nouveau Captain America noir s’est vu passer le flambeau par Steve Rogers en personne quelques années auparavant. Il a même eu droit à sa propre série télé sur Disney+ (Falcon et le Soldat de l’hiver, diffusé en 2021).
Brave New World ajoute à cela une menace supplémentaire en la personne d’un prisonnier mystère, détenu dans les sous-sols d’une base militaire top secrète. Le docteur Samuel Sterns, biologiste cellulaire (Tim Blake Nelson) a tout du savant fou. Il aida jadis Bruce Banner à maîtriser temporairement les effets des rayons gamma qui le transformaient en Hulk. Mais il finit par basculer du côté obscur de la Force. Dans ce quatrième film, il joue les éminences grises en manipulant les cerveaux à distance. Et surtout celui d’Harrison Ford, dont les amateurs savent déjà que son personnage de Thaddeus Ross se métamorphosera en « Red Hulk » à un moment ou à un autre.
Le spectateur n’a jamais vraiment le temps de s’ennuyer dans ce blockbuster d’espionnage rythmé, mêlant allègrement politique-fiction, action décomplexée, super-héros renouvelés, et effets spéciaux ébouriffants. Ce que fait ici Marvel est plutôt malin. Dès les premières minutes, le nouveau Captain America se voit offrir de travailler avec le président des États-Unis. Malgré tous les griefs qu’il garde contre l’ancien général de l’US Air Force sans pitié, Sam Wilson accepte de collaborer avec Thaddeus Ross. Le piège se referme. Une farandole de complots en cascade va s’ensuivre.
Le réalisateur de ce quatrième volet, Julius Onah (The Cloverfield Paradox, Luce) s’amuse à dresser des parallèles entre l’Amérique d’aujourd’hui et celle décrite dans son film pop-corn. Il n’est qu’à penser à ce génie fantasque au cerveau surpuissant qui manipule dans l’ombre un homme d’État ambivalent et va-t'en guerre... Tout cela rappelle sans être jamais trop appuyé l’actuel tandem Elon Musk/Donald Trump. On comprend ainsi que les comics issus de la pop culture n’ont jamais cessé d’offrir depuis leur naissance dans les années quarante un miroir assez fidèle (quoique déformé) de la situation sociopolitique traversée par l’Amérique au fil des décennies.
Captain America Brave new world ne fait pas exception à la règle. En sortant de ce blockbuster qui s’affiche ouvertement comme un pur divertissement bourré d’adrénaline, on ne peut s’empêcher de reconsidérer son titre : « Le meilleur des mondes ». Et si la sombre dystopie futuriste d’Aldous Huxley disait vrai ?