"L'UE doit innover" : Bruxelles propose une alliance pour contourner les droits de douane américains et refonder l'Organisation mondiale du commerce
C'est une annonce que personne n'avait vu venir. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a proposé, jeudi 26 juin, lors d'un sommet européen à Bruxelles (Belgique), "une coopération structurée" entre l'UE et les 12 pays membres de l'accord de partenariat transpacifique, notamment le Royaume-Uni, l'Australie, le Mexique et le Japon. Cette proposition est intervenue après une revue des négociations commerciales en cours avec d'autres pays, dont les Etats-Unis, avec qui les discussions patinent, rapporte le site Contexte. A terme, une telle coopération pourrait même remplacer l'Organisation mondiale du commerce (OMC), mise à mal par Donald Trump.
Ce nouvel attelage aurait pour but de "redessiner un ordre commercial mondial fondé sur des règles, réformant, voire remplaçant" l'OMC, détaille Politico. L'institution, fondée en 1995, composée de 166 membres et basée à Genève (Suisse), est censée faire respecter les règles encadrant le commerce mondial. Mais son fonctionnement est largement remis en cause par les Etats-Unis. L'Organisation mondiale du commerce est en effet paralysée depuis 2019, depuis la décision de Washington de bloquer des nominations internes, rendant le système de règlement des contentieux inopérant, rappelle Euronews. Les grandes négociations commerciales, sur la pêche notamment, sont bloquées depuis des années. Les multiples décisions d'imposer des droits de douane du jour au lendemain, depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, n'ont rien arrangé.
"L'UE doit parfois être imprévisible"
La proposition européenne est ambitieuse. Elle vise, à terme, à remplacer l'OMC. "Nous pouvons considérer cela comme le début d'une refonte de l'OMC... pour montrer au monde que le libre-échange avec un grand nombre de pays est possible sur une base fondée sur des règles", a expliqué la cheffe de l'exécutif européen lors d'une conférence de presse, rapporte The Guardian. Les Etats-Unis ne seraient pas invités à participer à cette nouvelle négociation et le choix serait laissé à l'UE et aux pays du partenariat transpacifique d'ouvrir la porte, a prévenu Ursula von der Leyen.
Le détail du fonctionnement de cette future "coopération" n'a pas encore été précisé. Mais la proposition a rencontré un écho favorable auprès des chefs d'Etats et de gouvernements européens présents à Bruxelles. L'UE doit "être innovante... et même parfois imprévisible – comme nos amis de l'autre côté de l'Atlantique", a commenté le Premier ministre polonais Donald Tusk, dont le pays est à la tête de la présidence tournante du Conseil européen.
"Si l'OMC est aussi dysfonctionnelle qu'elle l'est depuis des années et qu'elle le reste, alors nous, qui continuons à considérer le libre-échange comme important, devons trouver autre chose."
Friedrich Merz, chancelier allemandcité par l'AFP
Avant de lancer une alternative à l'OMS, les Européens devront boucler un dossier encore plus urgent : arracher un accord commercial avec les Etats-Unis. La Commission, qui négocie directement avec Washington, examine en ce moment une proposition américaine. Mais le temps presse, des droits de douane de 25% sur l'acier et l'automobile et de 10% sur la plupart des autres produits touchent déjà les entreprises européennes et Donald Trump a fixé une date limite du 9 juillet. Au-delà, il pourrait doubler à 20% le taux par défaut sur les importations en provenance de l'UE, voire les porter à 50% comme il l'a déclaré en mai.