Assemblée : la suppression des ZFE reportée après la suspension des débats sur la loi simplification

Un comble. Rares sont les textes dont le parcours parlementaire est aussi complexe que celui sur la loi... «simplification». Alors qu’un vote solennel était officiellement prévu mardi prochain à l’Assemblée, le scrutin n’aura finalement pas lieu de sitôt. Et pour cause : les débats se sont éternisés cette semaine entraînant, pour la deuxième fois, le report sine die de l’adoption du projet. L’examen du texte avait déjà été suspendu mi-avril par les deux semaines de vacances parlementaires, mais le gouvernement avait alors réussi à faire de la place dans l’agenda, cette semaine, pour poursuivre les discussions. Cela n’aura finalement pas suffi.

Mardi, lors de la conférence des présidents, le gouvernement a donc proposé d’ouvrir l’Hémicycle vendredi, pour que les parlementaires puissent poursuivre leurs travaux... En vain. Quant à la semaine prochaine, elle sera dédiée à l’examen de textes issus d’une initiative parlementaire. Avant que s’ouvrent dans la foulée les débats sur les deux textes qui concernent la fin de vie. De quoi menacer de renvoyer aux calendes grecques le texte simplification, qui avait fait l’objet de débats agités en commission, avec la suppression des contestées zones à faibles émissions.

Le gouvernement veut une reprise d’ici fin mai

«C’est un peu délicat... On ne sait pas trop quand ça reprendra», avoue, déconcerté, un fin connaisseur du micmac parlementaire, résigné par ces dernières semaines. Et de reprendre, désabusé : «C’est du Tetris, il faut mettre des ronds dans des carrés». Effectivement, depuis l’adoption des textes budgétaires en début d’année, le Palais Bourbon subit un véritable embouteillage parlementaire. «Le gouvernement blinde le calendrier pour ne pas être accusé de ne rien faire, les députés d’opposition posent des centaines d’amendements, et nous, on se retrouve à ne plus savoir quel jour ni à quelle heure sont examinés les textes», déplore un député macroniste.

Reste que le gouvernement ne désespère pas de reprendre le plus vite possible les discussions sur sa loi de «simplification de la vie économique». Lors des questions au gouvernement, mercredi, le ministre MoDem des Relations avec le Parlement, Patrick Mignola, a fait savoir que l’exécutif espérait une adoption du texte «au moins à la fin du mois» de mai.

Parmi les objets les plus scrutés du texte figurent les fameuses «zones à faible émission» (ZFE), que les députés LR et RN sont parvenus, avec l’aide d’une partie de la gauche et des macronistes, à supprimer en commission spéciale. Ce dispositif, mis en place par le gouvernement il y a quelques années, restreint l’accès des villes aux véhicules les plus anciens. Très contestées, les ZFE sont devenues le symbole de la lutte contre la pollution de l’air pour les uns, qui s’y accrochent ; et l’illustration de normes environnementales inapplicables et déconnectées du terrain pour les autres, qui s’y opposent.

L’exécutif cherche un compromis

Face à la fronde, emmenée notamment par Laurent Wauquiez, le gouvernement de François Bayrou a décidé d’opérer un recul significatif. La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher a donc déposé un amendement de compromis qui vise à laisser à une quarantaine d’agglomérations d’au moins 150.000 habitants la liberté d’instaurer de telles mesures, tant qu’elles ne dépassent pas régulièrement des seuils réglementaires de qualité de l’air. Seules une partie du Grand Paris et de la métropole de Lyon resteraient concernées par l’obligation : y seraient visés les véhicules les plus polluants au-delà de Crit’Air 3 (essence de plus de 20 ans et diesels de plus de 15 ans). Aujourd’hui, à la suite de la loi de 2019 élargie en 2021, les maires de ces villes sont contraints d’instaurer progressivement une ZFE, même s’ils peuvent faire adopter une série de dérogations ou n’effectuer aucun contrôle.

Attentifs aux critiques contre le dispositif qu’ils ont eux-mêmes contribué à promouvoir, certains macronistes ont consenti à changer d’avis. «J’ai voté contre la suppression en commission mais je vais être solidaire et je voterai l’amendement de repli de la ministre en séance publique», prévoit notamment un député Renaissance. De quoi sauver une partie du dispositif ZFE ? Rien n’est certain dans une Assemblée sans majorité. Pour l’instant, l’examen de l’amendement d’Agnès Pannier-Runacher attendra donc encore quelques semaines. Au mieux.