Visite d’Emmanuel Macron au Royaume-Uni : Keir Starmer "essaie de renouer des liens", selon Catherine Mathieu, économiste à l'OFCE
Emmanuel Macron est le premier dirigeant étranger qui visite le Royaume-Uni depuis la crise de 2020. Pour Catherine Mathieu, cette rencontre est le symbole de liens forts entre les deux pays et d'une volonté de Keir Starmer, nouveau Premier ministre britannique, de se rapprocher de ses voisins européens.
Ce texte correspond à la retranscription d'une partie de l'interview ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour regarder l'entretien en intégralité.
Lucie Chaumette : Ce genre de visites d'État au Royaume-Uni, c'est un privilège, c'est rare ?
Catherine Mathieu : C'est rare, c'est très rare. Déjà, les visites d'État, c'est rare. Ensuite, dans le cas présent, où on a eu beaucoup de tensions entre la France et le Royaume-Uni depuis le vote des Britanniques sur le Brexit, c'est important. Il y a deux ans, la France avait accueilli le roi Charles pour une visite d'État et c'est un peu un retour du côté britannique maintenant d'avoir cette visite française. C'est très important sur le plan diplomatique.
Comment il a réussi à faire ça Emmanuel Macron ? Qu'est-ce qui explique que ce soit le premier président français depuis le Brexit à être reçu et aussi le premier dirigeant européen finalement ?
Un élément important aujourd'hui est la situation géopolitique européenne avec cette guerre en Ukraine et le fait que les Britanniques, très tôt, se sont décidés à soutenir l'Ukraine et que la France a suivi. On a ces deux grandes nations militaires qui renforcent leurs liens. Ces liens s'étaient fragilisés pendant l'épisode du Brexit, mais on sait qu'il y a des relations très fortes entre le Royaume-Uni et la France depuis des siècles, même s'il y a souvent des conflits entre les deux pays.
Est-ce que vous avez le sentiment que l'arrivée en tant que Premier ministre de Keir Starmer a aussi permis de resserrer un petit peu ces liens, notamment sur les questions de défense avec Emmanuel Macron ?
Alors, sur les questions de défense, je ne pense pas. Déjà, les conservateurs, Boris Johnson, lorsqu'il était Premier ministre, puis Rishi Sunak, qui avait pris sa suite, et Liz Truss aussi, avaient tous la même position par rapport à l'Ukraine et à ce que devaient faire les Britanniques dans le conflit entre l'Ukraine et la Russie. Donc, ça, ça ne change pas les choses. Ce qui change aujourd'hui, avec l'arrivée de Starmer, qui est au pouvoir depuis un an maintenant, c'est que Starmer était en faveur de maintenir le Royaume-Uni dans l'Union européenne. Il a essayé, dès son arrivée à Downing Street, de réinitialiser les liens, c'est le fameux "reset", la réinitialisation des liens entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. On voit bien qu'il essaie de renouer des liens. Surtout sur le plan économique.
Et du côté du roi, de la famille royale, là, c'est quoi qui joue ? Ce sont les relations entre Emmanuel Macron et le roi Charles qui sont de bonnes relations ?
Je pense que ce sont de bonnes relations, mais de façon générale, la famille royale britannique joue un rôle important dans la diplomatie britannique. Lorsqu'on accueille un invité de marque au Royaume-Uni, la famille royale est là pour accueillir les invités étrangers.
La famille royale qui a aussi un lien particulier avec la France.
Oui, je crois que c'était particulièrement vrai pour la reine Elizabeth, mais le roi Charles semble poursuivre ce lien. Après, il y a sans doute des liens assez forts entre Emmanuel Macron et le roi Charles, par exemple sur les questions d'environnement. On sait que le roi Charles est très sensible à ces questions d'environnement depuis longtemps et que la France, avec l'accord de Paris, essaie de maintenir cette lutte pour la transition écologique à l'échelle mondiale. Le roi Charles est partisan de cela.
Emmanuel Macron, il fait cette visite d'État avant le président américain au Royaume-Uni. Je crois que Donald Trump, ce sera sûrement pour l'automne, mais il me semble qu'il n'y a pas encore de date définie.
Oui. Il avait été envisagé, il y a quelques mois, que Donald Trump soit le premier président étranger depuis l'arrivée de Keir Starmer au pouvoir à rendre visite au Royaume-Uni, mais apparemment, des contraintes d'agenda ont fait que...
Juste des contraintes d'agenda, officiellement en tout cas.
Je ne suis pas dans les coulisses, en particulier des relations entre le Royaume-Uni et les États-Unis. Mais on voit bien que, depuis l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, c'est assez difficile d'établir des relations avec ce président. En particulier, si je pense au Royaume-Uni, il y avait cette relation spéciale forte dont le Royaume-Uni était très fier. Et on voit bien qu'aujourd'hui, c'est plus difficile pour Keir Starmer de maintenir une relation stable avec les États-Unis que par le passé.
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