« Pandora, c’est comme Desigual, je n’aurais jamais pensé en porter un jour » : le fabricant de charms devenu géant mondial séduit les Françaises
« Pour moi, Pandora, c’est comme Desigual, je n’aurais jamais pensé en porter un jour », répondait récemment Lisa à ses amies, qui ne croyaient pas que c’était la marque de ses bagues dorées. « Pour elles, seules les adolescentes allaient chez Pandora s’acheter des bracelets à breloques », nous explique la Parisienne de 31 ans, qui a changé de regard sur la marque depuis qu’elle a vu son film publicitaire digne de l’époque des super-modèles : esthétique léchée très années 1990 signée Fabien Baron (le directeur artistique des pubs Calvin Klein avec Kate Moss), casting de choix (les actrices Winona Ryder, Pamela Anderson, les tops Karen Elson, Vittoria Ceretti) et bijoux hautement désirables, que ce soit les créoles minimalistes, les manchettes design et même les fameux charms…
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Il faut un certain budget pour s’offrir un tel générique. Ça tombe bien, « Pandora, c’est trois bijoux vendus par seconde dans le monde, un chiffre d’affaires de 4,25 milliards d’euros en 2024 (soit le quatrième plus gros après Cartier, Tiffany & Co. et Van Cleef & Arpels, NDLR), 6 800 points de vente dans 100 pays et près de 900 millions de visiteurs chaque année, énumère fièrement Berta de Pablos-Barbier, sa directrice du marketing. Mais c’est surtout une marque de savoir-faire, dont l’histoire est injustement méconnue. »
Une histoire authentique qui nous ramène en 1982, à Copenhague, au Danemark, à la longue tradition d’orfèvrerie et de design. Sous l’influence du maître du genre Georg Jensen, le couple de trentenaires Per et Winnie Enevoldsen décide d’appliquer cet artisanat à des bijoux populaires. « Ils trouvaient la joaillerie triste, conventionnelle, élitiste et voulaient d’une marque qui se distingue par son design et ses petits prix, en privilégiant des créations en argent, reprend Berta de Pablos-Barbier. Lors d’un voyage en Thaïlande, ils découvrent le fait main local sur de petites pièces minutieuses et y établissent dès 1989 leurs ateliers. » La marque, alors nommée Populair Smykker (« des bijoux pour tous »), fait un carton.
En 2000, Per et Winnie ont l’idée du siècle : un bracelet comme un câble, sur lequel on peut accrocher des breloques symbolisant chaque étape de la vie. « Des cœurs, des animaux, des fruits et légumes, des initiales, etc., à 19 euros pièce, poursuit la dirigeante. Aujourd’hui, le concept paraît banal alors que, même place Vendôme, les grands joailliers proposent leurs charms, mais, à l’époque, l’idée est révolutionnaire. » Au siège de Copenhague, les équipes cherchent un nom pour ce bracelet, on raconte que la femme de ménage a l’idée de Pandora, en référence à la première femme, créée par Zeus, qui incarne tous les talents, les charmes et les passions. « Son idée leur a tellement plu qu’ils ont non seulement baptisé ainsi le bijou, mais ont aussi renommé leur marque ! »
Depuis 2010, Pandora est coté en Bourse et fournit ses 6 800 points de vente répartis dans une centaine de pays à travers le monde. « Nos boutiques se veulent accueillantes, conviviales, il n’y a pas de portier ! » Particulièrement prisées, les éditions collectors cosignées avec Disney (2016), Harry Potter ou encore la fondation Keith Haring (2022) sont finies et laquées, comme le reste, à la main par les artisans de Bangkok. « Les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Italie, nos trois marchés principaux hors Danemark, sont particulièrement friands de nos charms. En revanche, la France, pays du luxe où la culture de la joaillerie traditionnelle est très ancrée, est plus difficile à convaincre, poursuit l’Espagnole basée au Danemark, qui nous avoue même changer de bijoux lorsqu’elle se rend à Paris. Aujourd’hui, nous voulons montrer notre savoir-faire au-delà des charms à travers des pendentifs, des sautoirs de perles, des chaînes à médaillons. »
En 2021, la marque introduit des diamants de synthèse dans ses collections, et, depuis l’an dernier, elle utilise exclusivement de l’or et de l’argent recyclés. « Pour gagner en préciosité, mais rester cohérent avec nos valeurs de marque engagée envers la planète, ce qui est un critère d’achat pour les jeunes générations, insiste Berta de Pablos-Barbier. L’image de Pandora est en train de changer profondément, d’ailleurs, lorsque j’ai sondé ma fille de 17 ans avant d’accepter ce poste, en octobre dernier, elle m’a répondu que, les charms, c’était avant ! Que maintenant c’étaient les bagues, qu’elles s’offrent et accumulent entre amies. »