Ce nouveau Vent Vert qui rend rouge de colère les fans de Balmain
Comment s'emparer du patrimoine olfactif pour le moderniser - entendez : séduire la Gen Z - sans toutefois le trahir ? C'est le travail d'équilibriste auquel se confrontent régulièrement nombre de parfumeurs. Certains optant pour une simple mise en adéquation avec les nouvelles contraintes réglementaires sur les ingrédients afin de respecter au mieux la formule originale quitte à paraître rétro, voire ringard. D'autres préférant, à l'inverse, évoquer l'« esprit olfactif » pour mieux l'ancrer dans l'air du temps jusqu'à s'attirer les foudres des aficionados les plus chevronnés. Dernier exemple en date : Balmain, qui lance, sous la direction artistique d'Olivier Rousteing, à la tête de la maison de couture depuis 2011, une collection de huit eaux de parfum mixtes (250 € les 50 ml) dont quatre inspirées des archives : Carbone (2010), Ébène (1983), Ivoire (1979) et Vent Vert (1947), véritable chef-d'œuvre de la parfumerie d'après-guerre.
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« Il ne s'agit ici que de réinterprétations, insiste Nathalie Berger Duquene, directrice générale de Balmain Beauty. Olivier a suivi une formation olfactive pour accompagner le processus créatif de près et impulser sa vision. Pour Vent Vert, il voulait surtout rendre hommage à la nature, et ce nom-là s'y prêtait parfaitement. Cette version joue sur la dualité entre la fraîcheur du vert de mandarine et la rondeur du jasmin. » Mais, stupeur : plus de trace de galbanum ! Cette note végétale puissante qui, surdosée à 8 % par la très culottée Germaine Cellier, signait avec radicalité la fragrance de 1947 et ouvrait ainsi la voie à toute une série de parfums « verts » - No 19 de Chanel, Fidji de Guy Laroche, Eau de Campagne de Sisley, voir récemment LV Lovers de Louis Vuitton.
C'est dommage car sans cette note typique, cette version n'est finalement qu'un bouquet de fleurs blanches.
Une fan de l’original
Bien loin de l’original
Pierre Balmain se plaisait à dire qu'il l'avait pensé pour une femme sportive, aimant à la folie le grand air, le soleil et la mer. « La première fois que je l'ai senti, j'ai été stupéfaite par ce souffle vert et cette note d'herbe tout juste coupée, c'était phénoménal !, se souvient une fan de l'original. Mais il n'y a ici ni surdosage ni note figurative. Ne reste qu'un lointain esprit de verdeur. C'est dommage car sans cette note typique, cette version n'est finalement qu'un bouquet de fleurs blanches. Un très beau parfum, certes, mais bien loin de l'original si acidulé et piquant. » De franchement vert, ce Balmain n'a finalement que le flacon, dont le design architecturé reprend celui de la première fragrance de la maison, Élysées 64-83, lancée en 1946 - cette fois, dans un matériau strié opaque. Gageons que les plus jeunes ne s'offusqueront pas de ces libertés et retrouveront dans les huit compositions de cette collection (misant toutes sur la dualité d'ingrédients maximalistes) l'esprit et la mode Balmain par Rousteing