«La technologie a réduit mes courbatures» : chez Monoprix, des salariés expérimentent des exosquelettes

Depuis septembre, les salariés de ce Monoprix du 11e arrondissement de Paris ne portent plus seuls les charges lourdes. Pour mettre en rayon les transpalettes de fruits et légumes (18 kg) et les packs d'eau (9kg), ces employés expérimentent, comme dans trois autres magasins en France, le port d'un exosquelette. À savoir une «structure mécanique articulée», pensée pour lutter contre les troubles musculosquelettiques, pour un coût qui avoisine les 5.000 euros. 

«Notre expérimentation résulte d'un accord de qualité de vie au travail, signé avec nos partenaires sociaux», fait part Philippe Pirion, DRH à Monoprix. Dans ce magasin parisien, des aménagements étaient déjà mis en place pour permettre aux salariés «d'être le moins possible exposés aux charges lourdes», témoigne la directrice de ce Monoprix. «Concrètement, tous les salariés se relaient et cela concerne des tâches qui ne durent jamais plus d'une heure», abonde la directrice. Mais les vendeurs de la structure accueillent volontiers une nouvelle aide pour travailler. «La technologie a réduit mes courbatures», témoigne Irène, une salariée, après s'être consacrée à la mise en rayon de charges lourdes.

Alors que le concepteur de l'exosquelette promet «une réduction de l'activité musculaire des épaules et un soulagement du dos», notre test en magasin confirme certains avantages. Il est notamment impossible de récupérer un pack d'eau au sol, sans nécessairement plier les jambes et garder le dos droit. La levée d'une charge vers un étalage en hauteur ne demande effectivement qu'un effort musculaire moindre. «Les concepteurs cherchent à ce que les efforts physiques liés à la manutention soient en partie compensés par leurs exosquelettes», précise Laurent Kerangueven, expert d'assistance conseil à l'Inrs, «mais cela ne supprime pas pour autant le port de charge qui reste toujours intégralement supporté par le salarié ».

Les risques pour la santé du travail sur des charges lourdes

Car selon l'Institut national de recherche et de sécurité (Inrs), les risques générés par le port de charges lourdes peuvent causer des «contusions, des douleurs dorsales ou encore des déchirures musculaires, pouvant aller jusqu'à la reconnaissance de maladies professionnelles». Selon l'Assurance maladie, les TMS sont à l'origine de plus de quatre maladies professionnelles reconnues sur cinq. C’est pourquoi, Monoprix a espoir que le recours à l'exosquelette sera «une des solutions» pour garder ses salariés en bonne santé. 

Mais gare à la solution magique. Si les exosquelettes «peuvent soulager les salariés», ils sont également susceptibles d'entraîner de nouvelles contraintes. Par exemple, des irritations cutanées liées au système de fixation de l'exosquelette, un impact sur l'équilibre ou un transfert de contraintes vers une autre partie du corps. «Il est d'ailleurs nécessaire d'agir avant tout sur l'organisation du travail», prévient Laurent Kerangueven. «Vous pouvez notamment limiter le poids des charges transportées, aménager les zones de stockage pour limiter les manutentions ou sensibiliser les salariés aux risques de TMS», ajoute-t-il. Selon l'expert, le recours à l'exosquelette ne doit être qu'un complément à des actions de prévention collective. Conscient de ce problème, Monoprix témoigne d'un usage «ciblé sur des tâches extrêmement précises et bien identifiées».  

«Le risque zéro n’existe pas», précise Philippe Pirion, «mais chaque année nous faisons un bilan social, en passant en revue tous les dangers auxquels sont exposés nos salariés». Grâce à ce mode de fonctionnement, l’entreprise dit avoir réduit les risques. Le DRH de Monoprix prend l’exemple des «chariots à charge constante», un système qui permet que le poids des marchandises soit toujours à hauteur des hanches. Expérimentés en 2021, ces chariots sont maintenant généralisés dans «quasi tous les magasins».