Mayotte : l’acheminement des vivres continue, des habitants attendent encore de l’aide

«On a soif. On a faim.» Face à une aide qui arrive au compte-goutte, les habitants de Mayotte s'impatientent, au lendemain du départ d'Emmanuel Macron qui a constaté l'immensité des besoins de l'archipel dévasté par le cyclone Chido. Et le bilan humain provisoire n’a toujours pas évolué. Le ministère de l’Intérieur a recensé 35 décès, 2432 blessés et 78 blessés graves, alors que les autorités craignent des chiffres beaucoup plus importants. Le Figaro fait le point sur la situation à Mayotte, en ce samedi 21 décembre.

Approvisionnement en eau et nourriture

«La priorité des priorités, c'est le combat pour l'eau potable, l'eau de consommation», a affirmé le chef de l'État face au risque de déshydratation qui menace les sinistrés, isolés et parfois privés de nourriture. Vendredi, Emmanuel Macron s’est rendu à Tsingoni, commune enclavée de l’ouest de Grande-Terre, l’île principale de l’archipel. Loin de Mamoudzou, les secours, l’eau, l’électricité et la nourriture tardent toujours à arriver. «On veut de l’eau», l’ont imploré plusieurs habitants.

Sur X, Bruno Retailleau a assuré vendredi que «tout est mis en place pour permettre de distribuer 600.000 litres d’eau par jour», soit un peu moins de deux litres par personne, dans un territoire où il fait actuellement plus de 30 degrés.

Samedi, 220 tonnes d’eau et 80 tonnes de nourritures ont été réparties dans toutes les communes de l’île, informe le ministère de l’Intérieur. Et entre 100 et 150 conteneurs de nourriture et d’eau vont être acheminés par le navire de la compagnie CMA-CGM. Par avion, 31 tonnes de nourriture et 108 tonnes d’eau sont également arrivées ce samedi.

Ravitaillement en eau à Acoua par voie aérienne, suite au passage du cyclone Chido. Déchargement par les sapeurs-sauveteurs de la sécurité civile et les gendarmes de la section aérienne de la gendarmerie. Ministère de l’Intérieur

Si le réseau d’eau des communes reste perturbé, la distribution commerciale, elle, se fait normalement. «Aucune pénurie d’eau en bouteilles n’est prévue grâce à l’arrivée de stocks par bateau», précise cette même source. Une cellule de planification logistique a donc été créée afin de gérer l’ensemble des commandes.

Mais dans certains quartiers, les Mahorais attendent toujours de l’aide. «On boit l’eau des citernes mais elle est salée. Il n’y a pas le choix, sinon on va mourir», explique Adjilani Asadi, qui n’a lui non plus vu aucun fonctionnaire en une semaine dans le quartier de La Geôle, à Mamoudzou.

Électricité, routes entravées, l’hôpital opérationnel à 50%...

L’électricité est en cours de rétablissement, indique le ministère qui ne prévoit pas de retour à la normale avant plusieurs semaines.

Les axes routiers ont tous été dégagés en deux jours, après avoir été très entravés par des chutes d’arbres et de débris divers. Et sept stations-service sur huit sont ouvertes.

L’activité hospitalière de Mayotte reprend peu à peu. L’hôpital est opérationnel à 50% et une opération de bâchage du toit est en cours afin d’augmenter rapidement les capacités d’accueil des patients.

Arrivée des sapeurs-sauveteurs de la sécurité civile en renfort, suite au passage du cyclone Chido à Mayotte. Ministère de l’Intérieur

«Pendant des mois, Mayotte ne vivra pas en situation normale»

S’il a assuré auprès de plusieurs médias locaux parer à «l’urgence», le chef de l’État a également averti que «pendant des mois, Mayotte ne vivra pas en situation normale». Les écoles ne pourront pas toutes rouvrir à la rentrée du 13 janvier, a-t-il notamment averti. «Mais on veut pouvoir apporter une solution à toutes les familles» à cette date, a-t-il assuré, évoquant entre autres la scolarisation d’élèves à La Réunion voisine.

Décès d’un gendarme

Un capitaine de la gendarmerie, Florian Monnier, est mort ce vendredi 20 décembre après avoir été déployé à Mayotte. L’officier, affecté au centre national des opérations de la direction générale de la gendarmerie nationale à Issy-les-Moulineaux, dans les Hauts-de-Seine, a été envoyé en renfort pour aider à la reconstruction de l’île. Bruno Retailleau, ministre démissionnaire de l’Intérieur, a présenté ses «plus sincères condoléances à sa famille, ses proches ainsi qu’à l’ensemble de ses camarades».

D’ici jeudi, 800 personnels de la sécurité civile seront acheminés sur l’île, ainsi que 400 gendarmes. Samedi, 50 volontaires supplémentaires de la Croix-Rouge française décolleront de la métropole pour rallier Mayotte.

Polémique

Jeudi soir, au centre de la foule, micro en main, Emmanuel Macron avait répondu aux accusations d’inaction de l’État face à la catastrophe pointées par la population locale. «N’opposez pas les gens ! Si vous opposez les gens on est foutu, parce que vous êtes contents d’être en France. Parce que si ce n’était pas la France vous seriez 10.000 fois plus dans la merde!», avait-il scandé avec vigueur, sous les huées des Mahorais. «On ne peut pas vouloir être un département français et dire que ça ne marche pas quand la France est en solidarité. Il faut que tout le monde se respecte. On tiendra jusqu’au bout si on est une équipe», avait-il également soutenu, le ton grave.

Le président a dénoncé un rassemblement organisé par l’extrême droite visant à «insulter la France». «Hier soir, on va être clair : des responsables du Rassemblement national ont jugé bon d’organiser un rassemblement militant et d’insulter la France en disant qu’elle ne faisait rien. Et j’ai dit la vérité», s’est-il défendu, dans son interview parue dans la presse locale après la polémique. Et d’ajouter : «Je ne peux pas laisser des gens insulter notre pays comme ça et, parce que c’est la France, le président se fâche !»