De plus en plus d’inégalités et de pauvreté. En 2023, 9,8 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté monétaire en France métropolitaine, révèle l’Insee ce lundi. Un chiffre sensiblement en hausse par rapport à l’année précédente. Selon l’institut, le taux de pauvreté (c’est-à-dire la proportion d’individus vivant avec moins de 1 288 euros par mois) a augmenté de 0,9 point pour atteindre 15,4 %. Du jamais vu depuis 1996, date de la première étude de l’Insee sur le sujet.
« Après redistribution, la non-reconduction de mesures exceptionnelles de soutien au pouvoir d’achat mises en œuvre en 2022 (notamment indemnité inflation et « prime exceptionnelle de rentrée ») a pesé sur le niveau de vie des plus modestes », avancent les auteurs de cette étude. Ces difficultés croissantes pèsent notamment sur les familles monoparentales. Selon les données de l’Insee, plus d’une famille monoparentale sur trois vit sous le seuil de pauvreté. « La revalorisation de l’allocation de soutien
familial de 50 % fin 2022 (...) n’a pas compensé l’effet de l’arrêt des aides exceptionnelles versées à une part élevée de familles monoparentales en 2022, notent les auteurs de l’étude. La revalorisation en deçà de l’inflation des allocations logement, qui sont perçues par près de la moitié de ces ménages, a également pesé sur leur niveau de vie. »
En parallèle, le niveau de vie des ménages les plus aisés a nettement augmenté, bien aidé par « l’augmentation des revenus financiers impulsée par la hausse des taux d’intérêt et à l’augmentation des revenus d’investissement, notamment des placements et assurance-vie », note l’Insee. Pour établir une comparaison, en 2023 les 20% les plus modestes ont perçu 8,5 % de l’ensemble des revenus, et les 20 % les plus aisés, 38,5 %, soit 4,5 fois plus.
Un échec pour Emmanuel Macron
Ces nouveaux chiffres viennent peser un peu plus sur le bilan social d’Emmanuel Macron, régulièrement taxé par l’opposition de « président des riches ». Le président de la République avait pourtant fait de la lutte contre la pauvreté une priorité de son premier quinquennat. « Il n’y aura pas de réussite française si chacune et chacun n’y a pas sa place, si la pauvreté, pour mettre un nom sur cette réalité, si toutes celles et ceux qui vivent dans la misère, dans l’exclusion, qui sont privés de cette route auguste que peuvent emprunter quelques-uns n’ont pas aussi leur place», affirmait-il sur un ton solennel devant le Parlement réuni en congrès au lendemain de son élection le 3 juillet 2017.
Un an plus tard, le chef d’État s’enflammait dans une courte vidéo devenue rapidement virale. « La politique sociale, regardez : on met un pognon de dingue dans des minima sociaux, les gens ils sont quand même pauvres. On n’en sort pas. Les gens qui naissent pauvres, ils restent pauvres. Ceux qui tombent pauvres, ils restent pauvres. On doit avoir un truc qui permette aux gens de s’en sortir », s’agaçait-il devant ses conseillers, provoquant la colère des réseaux sociaux et de l’opposition. De son côté, Emmanuel Macron en profitait pour réaffirmer ses positions sur la pauvreté. Lors de son discours du 13 juin prononcé en ouverture du congrès de la mutualité française à Montpellier, le chef d’État affirmait préférer la prévention aux aides « curatives ».
S’il se gardait de faire des « promesses d’estrade », Emmanuel Macron plaçait de nouveau le sujet au centre de ses préoccupations. En septembre 2018, au lendemain d’une après-midi de maraude, le président présentait une « stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté ». Ce plan chiffré à plus de 8 milliards d’euros prônait notamment « une politique déterminée de sortie de la pauvreté par le travail (...) avec un objectif clair : aucun accompagnement social sans perspective d’accès à l’emploi. »