La France va devenir le premier actionnaire de l'opérateur européen de satellites Eutelsat
La France réinvestira 717 millions d'euros dans le groupe Eutelsat, pour en devenir le premier actionnaire, ont officialisé l'entreprise et l'Élysée, jeudi 19 juin.
Deuxième opérateur mondial de satellites en orbite basse, qui permettent de faire fonctionner des services de télécommunications, Eutelsat est souvent présenté comme une alternative européenne à Starlink, de l'entreprise américaine SpaceX, propriété d'Elon Musk.
Avec une constellation de plus de 600 satellites en orbite basse depuis sa fusion avec le britannique OneWeb en 2023, le groupe avait assuré, par la voix de son ancienne directrice générale, être "la seule alternative à Starlink en orbite basse".
Cette annonce, faite à la veille d'une visite d'Emmanuel Macron dédiée à l'espace au salon aéronautique du Bourget, s'inscrit dans le cadre d'une augmentation de capital plus large, à hauteur de 1,35 milliards d'euros, annoncée par le groupe.
"La course est maintenant. C'est pour cela qu'on doit se positionner maintenant et investir maintenant. Sinon, l'ensemble du marché sera pris et la France et l'Europe seront demain dépendantes d'autres puissances", a commenté l'Élysée auprès de l'AFP.
Déjà actionnaire à hauteur de 13%, l'État devrait détenir, au terme de l'opération qui devrait aboutir "d'ici la fin de l'année 2025", 29% du capital d'Eutelsat, juste en dessous du seuil de 30% qui l'aurait obligé à déclencher une OPA.
"Avec cette opération, la France et l'Europe continuent de bâtir une filière spatiale compétitive, innovante et souveraine", a ajouté le ministre de l'Économie, Eric Lombard.
"Dépendance de l'Europe"
L'opération "représente une étape cruciale dans la feuille de route stratégique et financière d'Eutelsat, lui garantissant les ressources nécessaires à la mise en œuvre de sa vision stratégique", a indiqué l'entreprise, qui projette aussi de refinancer sa dette.
De nouveaux fonds qui devraient permettre le renouvellement de la flotte de satellites mais aussi la préparation au lancement de la constellation européenne Iris², réseau de 290 satellites multi-orbitaux qui devrait offrir des services de connexion d'ici 2030.
Le groupe, qui exploitait historiquement des satellites géo-stationnaires utilisés pour des services météo ou pour la télévision, a assis son statut d'acteur de premier plan dans les satellites de communications.
Mais face à la flotte d'environ 6 000 satellites d'Elon Musk, Eutelsat, qui réserve ses services aux entreprises et aux gouvernements, veut jouer la carte de la souveraineté.
Une position portée par un agenda français et européen inquiet des dépendances aux technologies américaines, alors que Musk avait qualifié les services de Starlink de "colonne vertébrale" de l'armée ukrainienne.
"La guerre en Ukraine a apporté la preuve de l'importance des infrastructures spatiales pour la résilience de nos communications, et ce qu'elles soient civiles ou militaires", a abondé le cabinet d'Eric Lombard. "Elle a aussi mis en lumière la dépendance de l'Europe à des solutions technologiques non européennes". Des préoccupations qui portent leurs fruits.
Mercredi, Eutelsat a annoncé au salon du Bourget la signature d'un accord-cadre sur dix ans avec l'armée française dans le domaine des communications militaires spatiales, pour un montant maximal d'un milliard d'euros.
L'entreprise, qui récoltera également des fonds auprès de trois de ses actionnaires, l'armateur français CMA-CGM, l'opérateur indien Bharti Airtel ainsi que le Fonds stratégique de participations (FSP) détenu par sept assureurs français, a indiqué que des discussions "avec d'autres investisseurs, y compris le gouvernement britannique", étaient toujours en cours.
Avec AFP