Foot : on vous résume l'affaire Michel Platini-Sepp Blatter
Le feuilleton judiciaire arrive-t-il à sa conclusion ? Michel Platini, ancien président de l'UEFA, et son homologue à la Fifa, Sepp Blatter, sont de retour devant les tribunaux, lundi 3 mars. Acquittés en première instance en 2022 dans une affaire d'escroquerie, les deux anciens dirigeants du football mondial seront jugés en appel, à Muttenz dans le canton de Bâle (Suisse) lors d'un procès qui ira jusqu'au 25 mars. Franceinfo: sport fait le point sur une affaire qui a débuté il y a presque dix ans.
L'origine de l'affaire : Sepp Blatter accusé d'un "paiement déloyal" de 1,83 million d'euros à Michel Platini
En septembre 2015, le procureur général de Suisse ouvre une procédure pénale pour "gestion déloyale" et "abus de confiance" contre Sepp Blatter, alors président de la Fédération internationale de football (Fifa). Le Suisse, aujourd'hui âgé de 88 ans, est accusé d'avoir effectué en 2011 "un paiement déloyal" au détriment de la Fifa, sans trace écrite ou contractuelle, de 1,83 million d'euros en faveur de Michel Platini, désormais président de l'UEFA et désireux de briguer la plus haute fonction à la Fifa, pour un travail de conseiller effectué entre 1999 et 2002.
Des suspensions lourdes du pouvoir sportif à l'encontre des deux hommes
En décembre 2015, la chambre de jugement de la commission d'éthique de la Fifa suspend les deux dirigeants de toute activité dans le football pour huit ans. La sanction est réduite deux mois plus tard à six ans, et l'ancien meneur de jeu de Saint-Etienne démissionne dans la foulée de son poste de président de l'UEFA, occupé ensuite et jusqu'à aujourd'hui par Aleksander Ceferin. Sa suspension passe même à quatre ans après son recours en 2016 devant le Tribunal arbitral du sport (TAS), qui reconnaît la "validité" du contrat oral entre la Fifa et Michel Platini, mais "n'est pas convaincu par la légitimité" du versement.
Les deux hommes acquittés par la justice suisse en première instance en 2022
En novembre 2021, le ministère public de la Confédération helvétique (MPC) dépose un acte d'accusation contre Michel Platini et Sepp Blatter dans cette affaire. Le parquet confirme leur "renvoi en jugement" pour plusieurs délits, ce qui mène au procès des deux dirigeants.
Le 8 juillet 2022, sensation au Tribunal pénal fédéral suisse. Alors qu'ils encouraient jusqu'à cinq ans de prison et que le parquet avait requis un an et huit mois de prison avec sursis, les deux hommes sont acquittés des chefs "d'escroquerie, gestion déloyale, abus de confiance et faux dans les titres". "L'acquittement total est la seule issue correcte de cette procédure pénale", s'était félicité Dominic Nellen, l'avocat de Michel Platini, dans les colonnes du Monde. Un tribunal neutre a enfin constaté qu'aucun délit n'avait été commis dans cette affaire. Mon client est complètement blanchi et soulagé en conséquence."
Le ministère public fait appel, Platini obtient la récusation des juges
Le ministère public suisse a fait appel de cet acquittement en octobre 2022, appel auquel la Fifa s'est jointe. En avril 2024, Michel Platini a obtenu la récusation de la totalité de la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral suisse - juges et greffiers -, une première victoire pour ses conseils qui espéraient alors "un acquittement clair" lors de son procès en appel. Le procès d'appel se déroulera donc ce lundi dans un autre tribunal suisse, où trois magistrats et un greffier ont été tirés au sort pour former cette Cour extraordinaire.
Une guerre de pouvoirs en toile de fond
Cette affaire est intervenue alors même que la Fifa était plongée dans une série de révélations de corruption et d'arrestations, éclaboussant de nombreux dirigeants dans le monde à la suite d'enquêtes notamment menées par le FBI. Elle avait également sonné le glas des ambitions de Michel Platini dans les hautes instances du football mondial. Président de la puissante UEFA, grand favori pour succéder au Suisse à la tête de l'organisation du football mondial, l'ancien n°10 des Bleus n'avait alors pas pu briguer la présidence de la Fifa.
C'est son ancien bras droit à l'UEFA, Gianni Infantino, qui s'était emparé du poste en février 2016, pour lequel il a été réélu en 2023 pour quatre ans, alors qu'il était le seul candidat en lice. Un homme contre lequel le Français avait déposé une plainte auprès de la justice française en novembre 2021, pour "trafic d'influence". Le parquet avait préféré renvoyer l'affaire vers la Suisse puisque sont reprochés "des faits commis en Suisse par des Suisses". "Cette décision (...) est révoltante. Je sais que la Suisse n'enquêtera pas : ma première plainte déposée en Suisse avait été classée sans un seul acte d'enquête et sur des motifs absurdes. Le tribunal pénal suisse m'a blanchi [...] : je veux savoir qui sont les responsables de ce complot et que ceux qui y ont participé soient condamnés. Quels qu'ils soient !", avait clamé le champion d'Europe 1984.
Tout n'est sans doute pas élucidé dans cette affaire. Le 25 février 2025, Le Monde révèle que le Parquet national financier français (PNF) "s'est montré sceptique quant à la thèse du 'reliquat de salaires'. Il a suivi une autre piste, en lien avec le choix du Qatar comme pays hôte du Mondial 2022 [candidature pour laquelle Michel Platini a donné sa voix lors du vote], et ouvert une information judiciaire en 2019 sur l'attribution du tournoi à l'émirat", selon le quotidien français.