REPORTAGE. "La mortalité a drastiquement baissé" : au Cameroun, le succès des campagnes de vaccination contre le paludisme

Ils sont désormais 19 pays d'Afrique à vacciner les bébés en routine contre le paludisme. La vaccination a débuté à grande échelle il y a un an, car il existe désormais deux vaccins contre cette maladie qui, il y a encore trois ans, a tué 600 000 personnes dans le monde, en majorité des enfants de moins de 5 ans.

Un an plus tard, le Cameroun, l'un des pays les plus touchés par la maladie avec 11 000 morts en 2023, observe déjà des résultats probants.

Dans le village de Wouyang, les séances de vaccination sont régulières. Dehors, à l'ombre, alors que le thermomètre affiche plus de 40 degrés, plusieurs dizaines de mères sont venues faire vacciner leur bébé. "Tout ça prévient beaucoup plus le paludisme. Avec les doses, mon enfant n'a jamais attrapé le paludisme pour l'instant", assure Saratou, sa petite fille sur les genoux, qui vient pour la troisième dose de vaccin contre le paludisme. Parasite transmis par le moustique, le paludisme est ici une maladie redoutée par les parents. "Tout le monde connaît les problèmes de palu dans le village. Il y a des cas graves où l'enfant convulse. Et puis il a de la fièvre, avec parfois 39 à 40 degrés", explique Amadou Mana, agent de santé communautaire sur place.

Rendre accessibles les soins

L'accès aux soins est difficile ici, car le premier centre de santé est à huit kilomètres, accessible uniquement par une piste de sable. "Nous sommes un peu reculés des centres de santé et parfois, en menant l'enfant à l'hôpital, l'enfant décède en route", explique encore l'agent de santé. La population est demandeuse de ces premiers vaccins contre le paludisme, explique Linda Maiwanso, responsable régionale vaccination à l'Unicef. Les Nations Unies gèrent cette vaccination avec le gouvernement camerounais.

"Comme le paludisme est la maladie la plus connue, tueuse des enfants, quand les parents entendent qu'il y a des vaccins contre le paludisme, c'est de l'espoir qu'on retrouve auprès d'eux".

Linda Maiwanso, responsable régionale vaccination à l'Unicef

à franceinfo

Pour l'instant, la campagne de vaccination est un succès, selon le gouvernement camerounais. Dans ce district de la région du Sahel, dans l'extrême nord du pays, 70% des bébés ont reçu une première dose de vaccin contre le paludisme en 2024. "L'objectif, c'était 40 %. Donc, nous sommes allés au-delà des objectifs. Ça veut dire que le message est passé tout doucement et que l'adhésion est en train de grimper. Au fur et à mesure que le temps passe, ça monte", détaille le Dr Alhadji Adam Yaya, représentant régional du ministère de la Santé.

Dans ce district, 70% des bébés ont reçu une première dose de vaccin contre le paludisme en 2024. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)
Dans ce district, 70% des bébés ont reçu une première dose de vaccin contre le paludisme en 2024. (SOLENNE LE HEN / FRANCEINFO / RADIO FRANCE)

Une adhésion en hausse alors que la vaccination reste contraignante, puisqu'elle suppose d'étaler quatre doses sur un an et demi. Le calendrier vaccinal entre dans les habitudes des parents. Plus de 3 000 bébés sont vaccinés dans ce district, une majorité. Et déjà des premiers résultats, se félicite le Dr Abdoul Nasser, chef du district de Santé. 

"En 2024, nous avons eu 0 décès d'enfants de moins de 5 ans lié au paludisme grave dans l'ensemble du district. En 2023, nous avions eu 8 décès, et en 2022 douze décès d'enfants. Nous pouvons dire avec objectivité que la mortalité a vraiment drastiquement baissé. Nous saluons vraiment l'introduction de ces vaccins et leur effet dans notre communauté".

Dr Abdoul Nasser, chef du district de santé

à franceinfo

Moins de décès, mais aussi moins de formes graves, observent les autorités locales de santé. À l'échelle de tout le pays, des études épidémiologiques sont menées et devraient permettre d'ici quelques années de valider ces premières observations. Mais pour le moment, et faute d'argent, le vaccin contre le paludisme est réservé à seulement 20 % des districts de santé. "On y travaille avec le gouvernement pour que ce soit disponible au même titre que tous les autres vaccins, sur toute l'étendue du territoire, et pour tous les enfants", explique Linda Maiwanso, responsable régionale vaccination à l'Unicef.

Selon le ministère de la Santé, toutes les zones du pays et donc tous les enfants du Cameroun restent potentiellement exposés à la maladie.