Les travaux du Musée Lorrain de Nancy suspendus par la justice... et peut-être pour toujours

Le sort du chantier de rénovation et d’extension du Musée Lorrain de Nancy pourrait être scellé. Le tribunal administratif a statué mercredi, en référé, après un recours visant l’arrêt des travaux déposé par des associations de défense du patrimoine. Les plaignants s’opposaient à la destruction d’édifices du XVIIIe et du XIXe siècle. En attendant une décision sur le fond, la justice a demandé mercredi la suspension des travaux engagés depuis novembre.

Le palais des Ducs de Lorraine - Musée Lorrain a fermé ses portes le 1er avril 2018 pour un grand projet de rénovation qui devait s’achever en 2023. Initié par Laurent Hénart (Parti radical), maire de Nancy jusqu’en 2020, le projet a été repris par son successeur Mathieu Klein (PS). Il prévoit une rénovation du bâtiment historique mais aussi une extension sur l’arrière, ainsi qu’un réaménagement du jardin. Le chantier s’annonce comme le plus grand chantier de rénovation d’un musée français situé en région.

Un projet à 56,5 millions d’euros

Mais le projet ne s’est pas déroulé comme prévu, en raison de l’opposition de plusieurs associations de défense du patrimoine. En 2020, un premier recours est déposé, contestant le projet initial. Cette action a conduit à une révision du projet, avec des espaces souterrains et dans les jardins dont les surfaces sont revues à la baisse. En juin 2023, le maire Mathieu Klein lance un nouvel appel d’offres pour un chantier de 56,5 millions d’euros, financés par la région, la ville et l’État. « C’est le plus grand enjeu patrimonial pour la ville de Nancy », expliquait-il à l’époque à France 3.

Le futur musée a été conçu comme un musée-promenade, ouvert sur le quartier et la ville historique. Agence Dubois & Associés/Olivier Defaye

C’était sans compter l’opposition des associations Défense et avenir du patrimoine nancéen et Sites & Monuments. Parmi les griefs : la démolition de l’ancienne gendarmerie du XIXe siècle et la déconstruction d’un mur de clôture du XVIIIe siècle et de la petite écurie du XVIIIe siècle. Ces structures, classées monuments historiques, seraient remplacées par une nouvelle construction en verre sérigraphié. Les associations estiment que cette intervention porte atteinte à l’intégrité du patrimoine architectural existant. « Les bâtiments sont déjà là. Nul besoin de creuser ou de construire pour agrandir le musée », déclare Julien Lacaze, président de Sites & Monuments.

Ils ont remporté une première victoire en référé mercredi. Alors que le chantier du nouveau Musée Lorrain a été engagé depuis novembre 2024, les associations ont déposé un référé-suspension le 20 janvier 2025. Le tribunal administratif de Nancy leur a donné raison et a demandé l’arrêt des travaux au niveau de l’ancienne gendarmerie du XIXe siècle, en attendant de statuer sur le fond du contentieux. Pour Christian Raczkevi, président de Défense et avenir du patrimoine nancéen, la décision du tribunal « empêche l’irréparable ».

Le projet en suspens

Le tribunal administratif de Nancy estime qu’il existe un doute sérieux sur la légalité de l’autorisation de démolir délivrée par la direction régionale des affaires culturelles et du permis de construire délivré par la ville. Le juge a estimé qu’il y a eu une erreur d’appréciation « quant à l’absence d’intérêt patrimonial » de l’ancienne gendarmerie et « l’incompétence du préfet de région pour autoriser des travaux de démolition équivalant à un déclassement de la partie du bâtiment protégée au titre des monuments historiques ».

Le chantier doit donc s’interrompre. Sera-t-il repris un jour ? Rien n’est moins certain. Selon L’Est Républicain , Mathieu Klein a été clair. « Si pour des raisons X, Y ou Z, le projet devait faire l’objet d’une nouvelle suspension, je proposerai au conseil municipal de l’abandonner », a déclaré le maire de Nancy en juillet. Le chantier, qui devait initialement s’achever en 2023, a déjà été beaucoup retardé. La date officielle de réouverture est maintenant 2029, ce que cette suspension des travaux menace encore. D’autant que chaque retard fit gonfler encore facture. Une nouvelle audience devrait lieu dans quelques mois pour statuer sur le fond du recours.