«On se sent abattu mais le combat continue» : Maxime Gleizes entend bien redoubler d’effort pour faire libérer son frère Christophe

Maxime Gleizes était à des centaines de kilomètres du tribunal algérien de Tizi-Ouzou lors de l’annonce de la condamnation de son frère, Christophe. Le choc n’en était pas moins brutal. Toute la journée, il était retranché dans les locaux de Reporters sans frontières (RSF) au cœur de Paris. En début de soirée, ce mercredi 3 décembre, il s’y est exprimé lors d’une conférence de presse. Sa tante, sa cousine et son mari étaient à ses côtés pour le soutenir pendant que sa mère, son beau-père ainsi que la compagne de Christophe Gleizes se tenaient, eux, toujours en Algérie.

Le journaliste de 36 ans, spécialiste du football africain qui travaillait pour So Foot et Society, a été condamné en appel à sept ans de prison ferme pour «apologie du terrorisme» et «possession de publications dans un but de propagande nuisant à l’intérêt national».


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LE FIGARO. - Comment vous sentez-vous ?

Maxime GLEIZES. - Avec ma famille, on se sent abattu et sidéré, parce qu’on ne s’attendait pas à ça. On a l’impression d’avoir pris un mauvais coup de boxe et d’être tombé du ring. On essaye de se lever avant le décompte mais on a ce sentiment d’avoir été mis K.O.

Ce matin on était dans un état d’esprit plus jovial, on croyait à la clémence de la justice algérienne. On se sentait soutenus par RSF et le reste de la famille. Le résultat de la condamnation en appel a été un choc. J’ai appelé ma mère, mon beau-père et la compagne de Christophe. Ils sont combatifs malgré la journée terrible qu’ils ont affrontée. C’est vrai que ça donne de la force de les entendre vouloir se battre et aller jusqu’au bout pour libérer mon frère le plus rapidement possible.

Ils nous ont dit à quel point les avocats avaient été extraordinaires durant leurs plaidoiries. 40 questions ont été posées à mon frère pendant l’audience et il a répondu avec honnêteté. Il a craqué... ce qui n’arrive jamais. Je l’ai rarement vu pleurer sauf à l’enterrement de notre grand-père. Il était toujours celui qui nous consolait, ça m’a fait comprendre que c’était un moment périlleux pour lui.

Vous gardez espoir ?

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On garde espoir, bien sûr, du moment qu’il y a une issue possible. Au-delà des canaux juridique et diplomatique, on appelle à la mobilisation du canal démocratique : du peuple français, du peuple algérien et de n’importe quel peuple qui veut nous soutenir dans cette cause. Je pense aussi au monde du foot. Si ça peut faire écho et jouer le rôle d’une troisième instance dans cette balance pour libérer mon frère.

Quelles sont les possibilités pour faire sortir votre frère ?

Il y a deux issues : soit se pourvoir en cassation, mais c’est une procédure qui est très longue et périlleuse. Je ne suis pas spécialiste de la question, mais je dirais que ça peut durer à peu près un an. Soit, d’accepter la condamnation de la justice et d’attendre une grâce présidentielle du président Tebboune. Une grâce ne peut être accordée si on fait appel de la décision du tribunal.

On a une dizaine de jours pour prendre une décision. On va se réunir ce soir avec RSF, les avocats de mon frère et la famille proche, lorsque l’on aura la tête un peu plus froide pour savoir quelle sera la meilleure option. Mon frère, lui, est retourné dans sa cellule, on ne pourra pas échanger avec lui. Mais je crois que l’un de ses avocats pourra le voir demain matin pour discuter des suites.

Mes parents ont prévu de rester encore quelques jours en Algérie, ça nous fait un bien fou de pouvoir voir Christophe, ne serait-ce qu’une demi-heure pour lui dire tout l’amour qu’on a pour lui et que le combat continue. Si j’ai la possibilité et un visa, je m’y rendrai également.

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Avez-vous pu lui rendre visite depuis son incarcération ?

Je l’ai vu une fois. J’avais fait une demande qui est longtemps restée sans suite. J’ai finalement pu aller le voir à partir de septembre. Pendant une demi-heure au mois d’octobre, on s’est vu, séparés par un plexiglas et on a passé un très bon moment. C’était assez dur, mais c’était beau de le voir rayonnant.

Comment allait-il ?

Il allait très bien. Il était très bien traité. Il avait la peau bronzée, le corps athlétique. Il lit beaucoup. Il était dans un bon état d’esprit, sans ressentiment envers personne et dans l’acceptation de son destin, avec de la grandeur. Et moi, je lui avais dit qu’à son prochain procès, on le sortira de là. Malheureusement, on n’a pas pu tenir cette promesse, c’est donc pour ça qu’on va continuer le combat.

Comment vous mobilisez-vous pour sa libération depuis le début ?

On a un groupe avec les dirigeants de RSF, la famille proche, les amis proches de mon frère et le groupe de magazines So Press. C’est avec ce groupe que nous prenons les décisions de manière commune. Et après, il y a un groupe composé d’à peu près 250 personnes qui s’appelle «Free Gleizes», qui recense toutes les actions possibles.

Après la confirmation de la condamnation en appel, votre mobilisation va-t-elle prendre un autre tournant ? Ces dernières semaines vous aviez notamment fait le choix de «l’apaisement» en refusant de vous exprimer dans la presse par peur d’entraver la décision de justice. Allez-vous changer de stratégie de communication ?

Oui, on a été très peu présents dans les médias pour ne pas heurter la sensibilité du jugement, en se disant que tout allait bien se passer. On s’est un peu fait avoir. J’ai pris conscience que cette affaire ne s’arrêtera pas aujourd’hui. Donc je pense que notre présence dans les médias, et celle de notre combat, sera doublée, triplée, quadruplée jusqu’à ce qu’il sorte.