«La mission qui m’a été confiée est de protéger la société et nos enfants de la haine. Les contenus racistes, antisémites, sexistes ou anti-LGBT qui prolifèrent sur Internet en font partie.» D’un ton déterminé, la ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, a rappelé ses ambitions à l’issue d’une réunion avec plusieurs grandes plateformes du numérique.
Elle avait réuni lundi à son ministère des représentants de Meta, Snapchat, TikTok, Twitch, Youtube et X pour répondre notamment de leur obligation de modération des contenus haineux sur leurs plateformes, en présence de l’Arcom, le gendarme de l’audiovisuel et du numérique, de Pharos, un dispositif gouvernemental de lutte contre les contenus illicites en ligne, et de la ministre déléguée chargée de l’Intelligence artificielle et du Numérique, Clara Chappaz. Seuls manquaient à l’appel les signaleurs de confiance, ces associations choisies par l’Arcom pour faire retirer prioritairement les contenus illicites sur les réseaux sociaux.
Aurore Bergé a mis les plateformes face à la prolifération de contenus en ligne liés à des tendances ou des influenceurs jugés «problématiques.» Ces comptes «diffusent des images de violences, de claques, de baffes, devant des mineurs. Ils font l’apologie du terrorisme. (...) Tout cela est illégal», a-t-elle énuméré devant les représentants des plateformes. L’ensemble des contenus pointés du doigt par le gouvernement figuraient dans une note détaillée présentée aux plateformes en amont, que Le Figaro a pu consulter. Dans le viseur par exemple, l’influenceur masculiniste AD Laurent, dont le compte TikTok a été suspendu le 16 mai dernier à l’appel de la ministre Aurore Bergé, ou encore la promotion de l’ultraminceur sous le #Skinnytok, retiré dimanche 1er juin de TikTok cette fois-ci sous l’impulsion de la ministre Clara Chappaz.
Responsabilité légale des plateformes
«Le temps de l’irresponsabilité est révolu», a martelé la ministre chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes, Aurore Bergé, estimant que la charge de modérer les contenus haineux revenait aux plateformes hébergeant ces contenus. «Je ne suis pas là pour imposer un point de vue moral, mais pour rappeler le cadre légal qui s’applique aux réseaux sociaux», a-t-elle expliqué. La législation européenne, conformément au Digital Services Act (DSA), prévoit des sanctions si une plateforme ne retire pas une publication manifestement illégale dans un délai raisonnable (le plus souvent 24 heures) après qu’elle a été signalée. Ces sanctions peuvent aller jusqu’à 6% du chiffre d’affaires mondial de la plateforme.
Outre ce rappel à l’ordre, le tandem de ministres a exigé des précisions quant à la politique de modération des contenus prévue par chacune des plateformes. Concrètement, elles ont cherché à connaître, par exemple, le nombre de modérateurs francophones en poste, ou du nombre d’infractions tolérées avant que le compte d’un utilisateur soit suspendu. Les plateformes ont jusqu’au 14 juillet pour formuler des «réponses écrites claires» à ces questions. Une autre convocation, pour «voir ce qui a évolué et avancer sereinement et efficacement», est prévue dans la foulée, a affirmé Aurore Bergé.