Jim Harrison, l’écrivain qui se glissait dans la tête et la peau des femmes
Jim Harrison est mort en mars 2016. Bientôt dix ans. Déjà dix ans ! Dans son registre, romancier, nouvelliste, poète, il n’avait pas d’équivalent. Ce personnage haut en couleur aimait la vie par-dessus tout. C’était une figure du nature writing. Il y a quelques années, à la question : pourquoi écrivez-vous ? il avait répondu : « J’écris comme un acte de culte envers les créatures, les paysages, les idées que j’admire ; pour commémorer les morts, pour créer de nouvelles femmes à aimer (…) J’écris pour continuer à être un fleuve inexploré. »
Depuis 1981 et Légendes d’automne, son premier vrai succès, le natif du Michigan nous enchantait avec sa prose généreuse et sensuelle, son humour désespéré, son appétit gargantuesque pour les belles et bonnes choses de la vie, sa poésie étrange et intense.
Harrison avait, comme on dit, une trogne : une tête de Viking, visage buriné, lacéré de rides, œil borgne, dents du bonheur, sur un corps massif, porté par des jambes de grand marcheur, de nombreuses fois brisées, rafistolées.
Il était cet ours qui avait choisi sa solitude au milieu des bois, des rivières, du Michigan d’abord, puis du Montana, où tout ce qui l’entourait le nourrissait, au propre comme au figuré. Un ours mais qui avait aussi besoin des autres. Pas pour qu’ils le caressent dans le sens du poil. Ça n’était pas vraiment le genre du bonhomme. Mais il aimait partager des instants rares ou juste de bons moments. Il avait ce point commun, et beaucoup d’autres (dont le Montana et la bouteille), avec James Crumley. L’un et l’autre ont créé un personnage de fiction qu’ils avaient pris plaisir, tout comme leurs lecteurs, à retrouver régulièrement.