Le président de la République a-t-il l’intention de démissionner ? Au lendemain de l’annonce du départ du premier ministre, Sébastien Lecornu -quatorze heures seulement après avoir annoncé la composition de son gouvernement - plusieurs personnalités politiques ont appelé au départ du chef de l’État, responsable selon elles de la crise politique.
Emmanuel Macron, dont le mandat doit prendre fin en 2027, n’est pas le premier président de la République à devoir faire face à des appels à la démission. Certains sont même résignés à rendre leur tablier. S’il est vrai qu’au cours des différentes républiques le rôle du président n’a pas toujours été le même institutionnellement parlant, on peut dire que depuis la proclamation de la IIIe République en 1870, sept présidents français ont quitté leurs fonctions en cours de mandat.
Passer la publicitéAdolphe Thiers (1871-1873)
La IIIe République a connu des épisodes politiques mouvementés en 70 ans d’existence. Adolphe Thiers, d’abord favorable à la mise en place d’une monarchie constitutionnelle, décide de se tourner progressivement vers une «République conservatrice» malgré les vives contestations des députés monarchistes, qui sont majoritaires à la chambre. Face à la divergence politique, le président âgé de 76 ans préfère quitter ses fonctions le 24 mai 1873.
Patrice de MacMahon (1873-1879)
Son successeur, Patrice de MacMahon, n’aura pas plus de chance. Le président monarchiste se retrouve en conflit avec une chambre à majorité républicaine cette fois-ci, mais décide tout de même de nommer, en 1877, un président du conseil - le premier ministre de l’époque - royaliste, ce qui attise la colère des républicains. Le président prend la même année la décision de dissoudre le Parlement dans l’espoir de retrouver une majorité. Mais c’est un échec. Il attend cependant que l’assemblée sénatoriale bascule elle aussi à gauche pour démissionner en 1879.
Jules Grévy (1879-1887)
La démission d’un président n’est pas toujours la cause d’une divergence politique. Par exemple, Jules Grévy qui est le premier républicain à devenir chef de l’État, est contraint à la démission le 2 décembre 1877 à cause de son gendre qui est impliqué dans un scandale politico-financier, plus connu sous le nom de «scandale des décorations».
Jean Casimir-Perier (1894-1895)
Élu à 46 ans, Jean Casimir-Perier déchante assez rapidement. Pour lui, les lois constitutionnelles empêchent le locataire de l’Élysée d’avoir suffisamment de poids politique face à son gouvernement. Il se retire le 14 janvier 1895, seulement six mois après son arrivée.
Paul Deschanel (1920)
Paul Deschanel était très anxieux après avoir subi des événements traumatisants durant la Première Guerre mondiale. Son état de santé mentale se détériore encore lorsqu’il devient président le 18 février 1920. Le 23 mai 1920, il chute d’un train après avoir essayé d’ouvrir la fenêtre, et est retrouvé titubant. Très vite, les médias le décrivent comme étant «fou». Pour ces raisons, il décide de prendre congé du pouvoir le 21 septembre 1920, un peu plus de sept mois après son arrivée.
Passer la publicitéAlexandre Millerand (1920-1924)
Alexandre Millerand décide de quitter l’Élysée le 11 juin 1924 après la défaite de la majorité sortante aux législatives. La nouvelle majorité reproche au président de s’être trop immiscé dans la campagne et d’avoir été désavoué dans les urnes.
À lire aussi Dissolution, démission : ce scénario noir qui menace la France
Charles de Gaulle (1959-1969)
Sur les huit présidents que compte la Ve République, Charles de Gaulle est le premier et le seul à avoir démissionné à ce jour. En 1969, le général avait annoncé que si le «non» remportait le référendum constitutionnel relatif à la création des régions et à la rénovation du Sénat, il quitterait l’Élysée. C’est ce qu’il se passe le 28 avril 1969.
Cas spéciaux
Deux autres, à savoir Albert Lebrun (1932-1940) ainsi que René Coty (1954-1959), ont un statut particulier puisqu’ils ont vu leur mandat interrompu. Le premier se retire et laisse le pouvoir à Philippe Pétain le 10 juillet 1940. Le second donne sa place au général de Gaulle après que ce dernier a gagné les élections présidentielles de 1958, les premières de la Ve République. À ce sujet, Coty, qui ne démissionne donc pas, déclare : «Je suis fier de lui remettre la charge de cette maison capitale».