UFC Paris 4 : Nassourdine Imavov tout en force tranquille

Lors de l’UFC Paris I, Nassourdine Imavov gagna contre Joaquin Buckley au terme d’un combat laborieux. Pour le grand public, l’affaire était entendue : Nassourdine Imavov était un combattant de classe mondiale, qui n’avait pas volé sa place dans la reine des organisations, mais qui avait trop de failles pour espérer arriver dans le top cinq de sa catégorie poids-moyen ; trop de perméabilité aux provocations, perdant ses nerfs, cardio suspect ou gaspillé. Pourtant, ses partenaires d’entraînement et ses sparring-partners l’assuraient : il était d’un tout autre niveau. Sa puissance de frappe en boxe anglaise était unanimement louée. Sans doute, mais nombreux sont les combattants excellents à la salle, mais qui ne traduisent pas tout leur potentiel sous la pression d’un vrai combat. S’ensuivit une défaite (qui a bien vieilli) contre Sean Strickland, puis un no-contest face à Chris Curtis.

Tout changea en 2024, à la faveur d’un changement d’entraîneur et d’équipe. Sous la houlette de Nicolas Ott, jeune entraîneur cérébral et très tactique, Nassourdine Imavov enchaîna quatre victoires en un an, dont une contre la légende Israël Adesanya, par KO s’il vous plaît. Transformé. Qu’est-ce qui a changé ? La souplesse et l’exigence de Nicolas Ott, qui compose avec lui (ce détail est important) des plans de jeu adaptés (et adaptables) qui lui donnent une compréhension en temps réel de ce qui se passe pendant le combat. En toute situation, Nassourdine sait ce qu’il a à faire. Il le fait très bien. Par exemple, à l’UFC Paris III, l’Américain Brendan Allen le cueille à froid en l’emmenant au sol à la première reprise. Avec sang froid, Nassourdine ne prend aucun risque, verrouille son adversaire au-dessus de lui, ne cherche pas à sortir, stérilise le sol de Allen et pourrit le round. Il perd ce dernier, mais sort sans dégât et relativement frais. Il gagnera les deux suivants (et, partant, le combat) haut la main.

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Prétendant légitime à la ceinture

Parmi les éléments qui ont changé, les vacances. «J’ai compris que le repos faisait partie de l’entraînement, alors je me force à faire des pauses». Une semaine, pas beaucoup plus, lors de laquelle il reste actif sportivement : «surtout sur le cardio». Nicolas Ott étant formé à la diététique sportive, son combattant est bien suivi et son poids ne fait pas le yoyo. Une stabilité bénéfique. Les goinfres qui doivent perdre des dizaines de kilos «vont sûrement le regretter plus tard. Le corps est intelligent : quand on le soumet à des diètes intenses, il a peur que ça se reproduise et stocke tout». Alors que de plus en plus de combattants requièrent les services d’un préparateur mental, il se contente d’un laconique «pas besoin». À son doigt, une bague. Dedans, des composants mesurent son rythme et son sommeil.

De quoi devenir un prétendant légitime au titre. Cependant l’UFC ne fait pas de sentiment : peinant à faire émerger de grandes stars depuis quelques années, elle a privilégié le Tchétchène Khamzat Chimaev, lequel n’a pas déçu en martyrisant le Sud-Africain Dricus du Plessis dans un chef-d’œuvre de lutte et de jiu-jitsu hybridés. Cette fois encore, Nassourdine Imavov va devoir gagner. Pour espérer affronter le champion et lui prendre la ceinture, il devra vaincre Caio Borralho à Bercy, et ce avec la manière. S’il ne gagne que de manière victoire ennuyeuse, et qu’un vainqueur spectaculaire se dégage le 18 octobre entre Reinier de Ridder et Anthony Hernandez, Nassourdine pourrait se faire passer devant.

Gagner à Paris

Alors peut-il le faire ? Caio Borralho arrivera bien préparé. Son entraîneur Pablo Sucupira, de l’équipe Fighting nerds, a le vent en poupe. Selon toute probabilité, sa meilleure chance de vaincre Nassourdine Imavov est de «pourrir» le combat : avec des «stop kicks» pour casser la pression, lutter debout, se déplacer latéralement, et saisir les opportunités qui se présenteront pour gagner du temps de contrôle, et l’emporter à la montre. Pour Nassourdine, la victoire est largement à portée. Il lui faudra être patient, travailler en feinte et frapper fort en anglaise, anticiper les attaques en lutte et maintenir la pression. Caio Borralho est perméable aux directs au visage, il devrait pouvoir en passer suffisamment pour marquer les juges, dans un premier temps, puis finir. Ajoutons que Nassourdine Imavov a timidement commencé à ajouter les coups de pieds à son arsenal, et pourrait surprendre en en passant quelques-uns à la faveur de déplacements : sa garde relativement basse le rend perméable aux middle-kicks.

Pour préparer ce combat, Nassourdine Imavov est allé en Géorgie au Memete fight club, à Tbilissi. Les sparrings y ont «des compétences qui ressemblent à celles de mes adversaires». Nassourdine apprécie d’y être bousculé dans ses habitudes. Là-bas, «c’est un peu à l’ancienne. C’est dur. C’est ce qu’on recherche. J’ai besoin de ne pas être trop dans le confort». En villégiature dans le Caucase, il en profite pour passer une tête au Daghestan. Le soir il appelait sa famille «pour se rebooster». Les Fighting nerds ? «Surcotés» balaye Nassourdine. «Ils ont des grandes gueules mais ne font rien». Il a sa petite théorie : «les Brésiliens qui parlent tout le temps perdent, ceux qui sont humbles et restent en silence gagnent». Difficile de lui donner tort à l’UFC. Caio Borrhalo appartiendrait plutôt à la catégorie des bavards. De bon augure.