Fabien Galthié sur le rappel de Jegou et Auradou chez les Bleus : «Nous assumons très clairement»

Est-ce que vous sentez que c’est l’année pour gagner un titre ?

Fabien Galthié. -C’est toujours l’année pour gagner le Tournoi. Dans les cinq compétitions qu’on a faites précédemment, on a toujours été très proches de le gagner, ou on l’a gagné, on a fait égalité mais on était deuxième.

Sentez-vous toujours cette pression de résultats autour de l’équipe de France ?

Je sens toujours cette attente de résultats. C’est sûrement dû à nos bons résultats entre-temps mais aussi à cette popularité que je peux constater autour de l’équipe de France, qui génère beaucoup d’attentes par le biais de la passion. Tout ça, et c’est cohérent, on le ressent vraiment.

Vous allez disputer votre sixième Tournoi aux manettes de l’équipe de France. L’expérience acquise vous permet-elle d’aborder la compétition différemment ?

Oui. Indéniablement. J’ai connu ça à mon premier Tournoi en tant que joueur en 1992 lorsque cela se jouait entre six nations puis à six par la suite. Il est clair que chaque Tournoi m’a permis, nous a permis, d’essayer de faire mieux et de nous préparer mieux, d’être plus matures.

Sur la ligne de départ, placez-vous l’Irlande en tant que favorite ?

Ils reçoivent aussi des adversaires importants. Ils commencent d’ailleurs par l’Angleterre. C’est une équipe qui est sur une dynamique et une consistance très solides depuis quelques années. Indéniablement, ils vont être difficiles à manœuvrer. Mais, comme je le disais, je crois que l’histoire du Tournoi a toujours montré que tout peut changer. C’est-à-dire qu’une équipe qui était moribonde peut remporter la compétition et, a contrario, une équipe qui a remporté le Tournoi peut se retrouver en difficulté.

Il semble plus complexe de performer les années impaires mais ça n’enlève pas la beauté du challenge et la volonté qu’on a de faire quelque chose de grand

Fabien Galthié

La particularité cette année, c’est que vous allez disputer trois matchs à l’extérieur. Qu’est-ce que cela change pour vous ?

En fait, si vous regardez bien, depuis que le Tournoi est devenu un tournoi à six nations, la France l’a gagné une fois sur les années impaires, en 2007, et c’était une victoire et non un Grand Chelem. Donc, il semble plus complexe de performer les années impaires mais ça n’enlève pas la beauté du challenge et la volonté qu’on a de faire quelque chose de grand. 

Vous avez été élu meilleur joueur du monde (2002), vous étiez demi de mêlée mais aussi capitaine, finalement comme Antoine Dupont. Quelles sont les choses qui vous rapprochent et quelle est votre relation avec lui ? 

Déjà, nous sommes du Sud-Ouest. On a, je crois, la même éducation rurale, un peu le même parcours de vie, à savoir étudiants à Toulouse. Il y a aussi une culture toulousaine même si moi c’est plutôt Colomiers. Je pense qu’on se connaît bien, on se comprend très bien.

Ça change beaucoup de choses de l’avoir comme capitaine par rapport à l’année dernière ? 

C’est clair que pour nous, c’est un retour important dans le groupe. Il est revenu à l’automne déjà, et il porte avec lui, au-delà de la qualité du joueur de rugby et le capitaine qu’il est, un style et une aura. Il montre la voie.

L’autre retour important, c’est celui de Romain Ntamack. À quel point, ce retour vous enthousiasme ? 

C’est un joueur qui a quitté l’équipe de France dans un match préparation Coupe du Monde. Ça a été très dur. On a vécu des moments difficiles. Celui-là, ça en était un, pour lui, bien sûr, mais pour nous aussi. Il a beaucoup travaillé, il est revenu. Il est revenu très fort même. Il s’est blessé de nouveau pour la tournée d’automne, donc ça a été un nouveau complexe. Il semble prêt et déterminé maintenant. On a quand même une charnière qui joue à Toulouse et qui performe. Cela donne une stabilité. Sans mettre de côté, bien sûr, les autres joueurs qui jouent à ce poste et qui sont très importants aussi. 

Justement, même on verra ce que donnent les premières tendances dans la composition mais cet axe 9-10-15 avec Thomas Ramos à l’arrière, qu’est-ce que cela apporte ? 

Une grande stabilité. Une expérience, aussi, de l’équipe de France parce que les trois joueurs ont une grande expérience en bleu. Il y a un gros vécu, une expérience, une stabilité et un savoir-faire.

Gonzalo Quesada, le sélectionneur de l’Italie, ici en discussion avec Fabien Galthié. Guglielmo Mangiapane / REUTERS

Pensez-vous disposer des meilleurs ailiers du monde avec Penaud et Bielle-Biarrey ?

En France, vous avez très vite fait de qualifier nos joueurs français les meilleurs du monde. C’est intéressant d’ailleurs, mais ça veut dire que vous êtes très supporters (sourire). On va dire que ça va nous aider pour le score. N’oubliez pas que ceux qui décident de la victoire, ce sont les avants. Les ailiers et les trois-quarts contribuent à décider du score et uniquement du score. 

Mais ils sont assez performants ces dernières semaines... 

Ils signent de belles additions (rires), oui. 

Est-ce que cet élan des clubs français en Champions Cup peut vous servir ?

C’est très intéressant. Nous, l’enjeu, ça va être de récupérer cette énergie qui vient des clubs et d’arriver à la recentrer sur une seule et même équipe. Avec cela, on veut recréer en très peu de temps une harmonie, une composition d’équipe et récupérer cette énergie des clubs. Si on arrive à récupérer ça, sans qu’il y ait trop de déperdition, on va pouvoir «matcher». Mais ce n’est pas gagner d’avance.

Ce sont des joueurs qui ont beaucoup travaillé pour traverser cette période très complexe qui n’est d’ailleurs pas terminée

Fabien Galthié au sujet d’Hugo Auradou et Oscar Jégou 

Vous parliez de popularité de l’équipe de France, notamment au niveau de la société, assumez-vous et comprenez-vous, comme vous l’avez expliqué à Midi Olympique , la polémique autour de la sélection d’Oscar Jégou et Hugo Auradou ?

Exactement. Je répète, je comprends, j’entends et nous prenons des décisions que nous assumons très clairement.

Pouvez-vous nous dire, sur le plan sportif, ce qui les rend aujourd’hui indispensables dans les 42 meilleurs joueurs français ? 

Uniquement la performance. Nous, on a un staff qui est très compétent, fait d’experts avec 32 personnes et nos choix ne sont jamais des décisions simples. C’est assez complexe. C’est même parfois chaotique, méchant douloureux. Donc le résultat, il est là. C’est vraiment la performance et bien sûr la possibilité de les sélectionner. Il y avait des conditions nécessaires et évidentes à leur sélection. Elles sont aujourd’hui acquises. 

Même si aujourd’hui l’équipe de France a une exposition différente, qui ressemble un peu à l’exposition des équipes de football, est-ce seulement la performance qui compte ? Il n’y a pas d’autres critères qui rentrent en jeu ? 

Je crois que je me suis bien exprimé sur le sujet. 

Sur l’aspect sportif, est-ce que vous avez été bluffé par le retour au niveau d’Oscar Jégou ?

Il a été bien entouré, je crois. Comme Hugo. Et puis ce sont des joueurs qui ont beaucoup travaillé pour traverser cette période très complexe qui n’est d’ailleurs pas terminée.