Affaire Théo : du sursis requis contre les policiers
Trois ans de prison avec sursis pour Marc-Antoine C., six mois de prison avec sursis pour Jérémie D., trois mois de prison avec sursis pour Tony H. Telles sont les peines requises par l’avocat général ce jeudi 18 janvier, au huitième jour du procès de trois policiers pour «violences volontaires» sur le jeune Théodore Luhaka. «Nous avons besoin d'une police qui nous protège, mais nous n'avons pas besoin de policiers comme ceux-ci, qui exercent des violences gratuites», a lancé le représentant du ministère public en désignant du doigt les trois hommes assis côte à côte à l’autre bout de la salle.
Marc-Antoine C., Jérémie D. et Tony H., qui encourent respectivement quinze ans de réclusion criminelle, dix ans d’emprisonnement et sept ans d’emprisonnement, seront fixés sur leur sort vendredi, à l’issue des délibérations de la cour d’assises de Seine-Saint-Denis.
Le 2 février 2017, peu avant 17 heures, un contrôle mené par quatre membres de la brigade de sûreté territoriale (BST) d’Aulnay-sous-Bois sur la dalle d’un centre culturel dégénérait. Dans la foulée, Théo, 22 ans, était hospitalisé et opéré en urgence pour une perforation rectale. S’en sont suivis sept ans de procédure «avec des hauts et des bas», puis le procès.
Le jeune homme «vivra toute sa vie avec une incontinence anale» et d’autres «séquelles» liées au coup qu'il a reçu à l'anus, a déclaré son conseil Me Antoine Vey lors de sa plaidoirie. «Le préjudice est irréparable. L'infirmité est permanente. Il demeurera infirme, c'est ça qui fait que [nous sommes] devant une cour d'assises.» Un avis partagé par l’avocat général, qui, évoquant la «vie brisée» de Théo, a estimé dans son réquisitoire qu’«il y a à la fois mutilation et infirmité permanente».
«Violence gratuite»
Le «coup d’estoc» porté par Marc-Antoine C. qui a provoqué la grave blessure de la partie civile à l'anus est un «geste volontaire» réalisé sur «quelqu’un qui ne représentait pas de danger immédiat à ce stade», a estimé le représentant du ministère public, aux yeux duquel «tout ça ne ressemble ni de près ni de loin à la légitime défense».
«Et puis ensuite, il y a les autres gestes. On n'en reste pas à ce coup d'estoc», a rappelé l’avocat général. Si Marc-Antoine C. encourt quinze ans de réclusion pour ce coup de bâton télescopique de défense, il comparaît en effet aussi pour «deux autres coups alors que Théodore Luhaka était assis au sol».
Jérémie D. est quant à lui jugé pour avoir «projeté violemment contre un muret» et «aspergé de gaz lacrymogène» le jeune homme, tandis qu'il est reproché à Tony H. «un coup de poing à l'abdomen», tout cela alors que Théo «se trouvait déjà au sol». Des gestes qualifiés de «gestes d’énervement, de vengeance, de violence gratuite, de violence policière» par l’avocat général.
Des gestes qui constituent une «succession de comportements absolument incompatibles avec la mission de policier», a quant à lui dénoncé Me Vey, pointant l'«absence de discernement, de maîtrise, de contrôle, d'humanité» des trois mis en cause. «Ce procès n'est pas le procès de la police, [...] de la malchance, de l'accident, [...] de la légitime défense; c'est celui de la violence illégitime. [...] Ce procès n'est pas le procès d'un coup de matraque, c'est le procès de toute cette interpellation», a insisté l’avocat de Théo.