La parole des proches de Marie Trintignant résonne dans une nouvelle série documentaire. Il y a 22 ans, l’actrice Marie Trintignant est décédée, battue à mort dans un hôtel de Vilnius en marge d’un tournage en Lituanie, par son compagnon Bertrand Cantat. Netflix va dévoiler la semaine prochaine une nouvelle série sur le parcours du chanteur, intitulée : De rock star à tueur, le cas Cantat. La production fait témoigner des proches de la victime, s’appliquant à démonter l’emploi du terme « crime passionnel ».
Invité à s’exprimer sur l’affaire, l’ancien compagnon de Marie Trintignant et père de son fils Roman, Richard Kolinka a laissé transparaître une certaine exaspération, comme si le sujet appartenait à un passé qu’il préférerait voir laisser derrière lui. « Ce que j’aurais aimé, c’est qu’on n’entende plus jamais parler de ce mec », explique-t-il. Un témoignage difficile mais indispensable tant le batteur du groupe Téléphone s’est livré « avec ses tripes », explique Anne-Sophie Jahn, journaliste et co-réalisatrice de la série, auprès de Vanity Fair .
« On a interviewé plusieurs dizaines de personnes, ce qui est absolument énorme et assez inédit », assure la co-réalisatrice qui donne notamment la parole à Lio. À l’époque, la chanteuse avait vivement condamné le chanteur de Noir Désir en utilisant le terme de « violence conjugale ». Une qualification des faits qui n’a pas plu à tout le monde à l’époque. Laurent Ruquier l’avait notamment accusée de vouloir faire du buzz, déclare Lio dans une interview accordée à Vanity Fair en 2018. À travers les témoignages de la chanteuse et de l’ancien compagnon de Marie Trintignant, l’important est de rappeler « que les violences conjugales ne touchent pas que deux personnes », soutient Anne-Sophie Jahn.
Une affaire qui a marqué l’opinion publique
Le meurtre de Marie Trintignant en 2003 a marqué profondément l’opinion publique en mettant en lumière la réalité des violences conjugales, très souvent minimisées sous le terme de « crime passionnel ». Le terme de féminicide n’arrivera que bien plus tard. L’autopsie du corps de la victime montre que l’actrice a reçu 19 coups, la majorité à la tête et au visage. Une seconde expertise confirmera les coups mortels. À l’ouverture de son procès, le 16 mars 2004, Bertrand Cantat reconnaît « deux allers-retours » et implore le pardon. La défense renonce à plaider le «crime passionnel», alors moins sévèrement puni en Lituanie. Le chanteur est condamné à huit ans de prison le 29 mars 2004, il obtiendra sa libération conditionnelle le 16 octobre 2007.
Pendant des décennies, le « crime passionnel » a servi à atténuer la responsabilité des auteurs en suggérant qu’un accès de jalousie ou un amour dévorant pouvait en partie excuser un passage à l’acte. L’affaire Trintignant a contribué à évincer cette vision. « Cette affaire permet de réaliser l’évolution énorme qui a été faite en 20 ans. À l’époque, la presse parlait de “ crime passionnel ”. Aujourd’hui on parle de féminicide. L’affaire Cantat est un des plus grands témoins de ce glissement », souligne Anne-Sophie Jahn.