EN IMAGES. "Napoléon, une collection historique" : dix raretés parmi la centaine de trésors de Pierre-Jean Chalençon mis en vente par Sotheby's Paris
Mercredi après-midi 25 juin à Paris, quelque 113 pièces relatives à Napoléon Bonaparte et au Premier Empire sont proposées aux enchères par l'antenne parisienne de Sotheby's. Tableaux, dessins, sculptures, mobilier, argenterie, mais aussi certains objets intimes et personnels figurent parmi les lots mis en vente. Ce trésor, l'une des plus riches collections privées consacrées à l'Empereur, a été réuni durant près de quarante ans par l'animateur Pierre-Jean Chalençon, passionné par le plus célèbre Corse de l'histoire. L'ancienne figure de l'émission "Affaire conclue" sur France 2 a vu son image ternie par diverses affaires, parmi lesquelles des dîners clandestins en plein Covid-19. Il s'est résolu à renoncer à une partie de sa collection afin d'éponger de très lourdes dettes et d'espérer ainsi sauver un autre de ses biens, le Palais Vivienne, à Paris, menacé d'être mis en vente par ses créanciers.
En prévision de la vente, la collection, scénographiée par le styliste Jean-Charles de Castelbajac, a été présentée à Hong Kong et New York avant l'ultime étape parisienne. Marine de Cénival, responsable de vente et coordinatrice du département mobilier chez Sotheby's, se réjouit de l'éclectisme des lots proposés : "Dans cette vente, on a des objets de propagande on va dire, et puis on a des objets intimes, de la vie quotidienne. Ça, c'est vraiment très intéressant. On a beaucoup de chance." Pour franceinfo Culture, à la veille de la vente, elle a présenté certaines pièces majeures, ou simplement très touchantes, de la collection.
Le sceau personnel en or et en ébène de l'Empereur. "Ce sceau en or, où l’on peut voir les armes impériales, a été pris le soir de la défaite de Waterloo. Donc, nous sommes le 18 juin 1815. Obligé de fuir à cheval, Napoléon abandonne sa berline avec l'intégralité de ses objets à l'intérieur. Les Prussiens vont s'en saisir et la piller. Ils s'emparent ainsi du sceau personnel de l'Empereur, il était le seul à se les faire faire en or. C'est un objet très émouvant parce qu'il est personnel. On est sur une estimation de 150 000 à 250 000 euros." (SOTHEBY'S)
Épée et bâton de héraut utilisés lors de la cérémonie du couronnement à Notre-Dame de Paris (détail). "Ce bâton et ce glaive figurent parmi les lots très importants de la vente. Il faut imaginer qu'on est le 2 décembre 1804, on est à Notre-Dame, il fait un froid de canard... Vous avez des hérauts d'armes qui sont présents. Et c'est leur chef, Duverdier, qui annonce dans la nef que Napoléon est maintenant l'empereur des Français. C'est son glaive et son bâton qui sont présentés à la vente. Pierre-Jean Chalençon les a achetés en deux occasions différentes, mais désormais, ils sont réunis. On est sûr qu'il s'agit de cette épée puisqu'on a retrouvé la facture auprès de l'armurier Boutet, à Versailles, qui est de la plus grande manufacture d'armes de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècles. Ce lot phare est estimé entre 200 000 et 300 000 euros." (ELÉA LEFÈVRE)
Premier codicille du premier testament de Napoléon. "Parmi les objets importants, ce codicille est une première version du testament de Napoléon. C'est là où il exprime ses dernières volontés à Bertrand, son bras droit, et c'est signé de sa main "Nap". Il évoque ce qu'il veut laisser à ses proches, sa famille. Il y aura d'autres versions du testament, mais celle-ci est la toute première, avec la petite reliure où l'on voit les armes de l'empereur. On est dans une estimation aux alentours de 300 000 à 500 000 euros." (ANNIE YANBEKIAN / FRANCEINFO CULTURE)
Mèche de cheveu, morceau de gilet et de rideau de Napoléon (estimation : 4 000 à 6 000 euros). Des reliques de Saint-Hélène. "Dans les objets plus classiques pour les collectionneurs, on a toujours des cheveux. Cette mèche vient de la dame d'honneur de la reine Hortense [Valérie Masuyer, qui a écrit les notes manuscrites]. Hortense, c'est à la fois la belle-fille de Napoléon et sa belle-sœur. C'est la fille de Joséphine, qui a épousé plus tard l'un des frères de Napoléon." (SOTHEBY'S)
Lit de campagne pliant, inventé pour Napoléon (estimation de 40 000 à 60 000 euros). "Ce lit de camp est le modèle de celui dans lequel Napoléon dormait à Saint-Hélène. Napoléon ne dormait pas dans un lit confortable, c'était un militaire donc il était habitué à dormir comme ça, et il a vécu comme cela à Saint-Hélène." (HUGO GESTER / ART DIGITAL STUD)
Ensemble de vêtements ayant appartenu à l’Empereur Napoléon, 1800-1820 (détail). "Parmi les vêtements qui ont appartenu à l'empereur, il y a une chemise, des collants, un caleçon, une cravate (l'ensemble estimé à 50 000 à 80 000 euros, ndlr). Il y a aussi un madras, un bonnet en tissu, que Napoléon mettait autour de la tête (il fait l'objet d'un autre lot estimé à 20.000 à 30.000 euros, ndlr). Il était assez fragile de la tête. S'il avait froid, il pouvait porter un bonnet en dessous de ses bicornes. C'est dans cette optique qu'il les faisait faire avec un tour de taille plus large." (SOTHEBY'S)
Fauteuil de trône impérial en bois doré d'époque Empire. "Ces fauteuils pouvaient être utilisés par l'Empereur ou par la famille impériale, Joséphine, Letizia (la mère), les frères de Napoléon... Ils servaient soit de trône, soit de fauteuil de représentation, mais à l'époque on ne faisait pas la différence. La garniture est plus tardive, dont il n'y avait pas forcément le "N" à l'époque. Si on sait que ce fauteuil est d'époque Empire, on n'a pas de certitude sur sa provenance exacte. On a retrouvé dans les archives une commande pour le château de Stupinigi près de Turin, mais s'agit-il de ce fauteuil ou d'un autre, on ne peut pas le dire. Pour cette pièce, on ne donne une estimation que sur demande." (DAMIEN PERRONNET)
Manche de manteau de l’habit du Premier Consul, vers 1800 (estimation : 20 000 à 30 000 euros). Ça c'est une manche datant de l'époque où Napoléon était Premier Consul. Lors d'un repas, un serviteur fait tomber de la sauce sur la manche. Donc on découd la manche. Le tailleur du Premier Consul refait une manche, mais il conserve la manche tachée et il la passe ensuite à ses enfants. Ensuite, c'est vendu à d'autres personnes, mais à chaque nouveau propriétaire, on a un dossier avec des courriers expliquant que ça vient bien du Premier Consul. Dans les années 1930, ça a été racheté par un sous-préfet. La manche a été exposée en 1939 à Liège... Là encore c'est un témoignage très émouvant." (ANNIE YANBEKIAN)
La Bataille des pyramides, dessin de François-André Vincent. "Ce dessin du voyage en Egypte représente Napoléon Bonaparte, alors général, à la bataille des pyramides. C'est un moment phare qui évoque ses jeunes années, mais c'est également de la propagande pour vous montrer qu'il est un grand vainqueur de batailles. Ce dessin du début du XIXe siècle est estimé aux alentours de 80 à 120 000 euros." (SOTHEBY'S)
Assiette en porcelaine de Sèvres du service égyptien commandé par l'Impératrice douairière Joséphine, 1811. "Dans la thématique avec l'Égypte, cette assiette figure parmi les objets de porcelaine les plus importants. C'est un cadeau de divorce qui a été fait par Bonaparte. Quand il se sépare de Joséphine en 1809, il lui écrit qu'elle peut se faire faire un service en porcelaine de son choix, il paiera la note à la fin. Elle commande un service égyptien parce que Napoléon en avait déjà eu un dans le même style et elle l'aimait beaucoup. En fait, elle le trouvera trop dur, trop rigide... Donc elle refuse le service qui retourne dans les magasins de la manufacture et qui sera offert par Louis XVIII au duc de Wellington... Ainsi, si vous voulez voir le reste du service, il faut aller à Londres ! Lorsque Louis XVIII fait livrer ce modèle, il n'envoie pas toutes les assiettes. Donc il en reste quelques-unes qui traînent encore dans des collections privées... Cet exemplaire est estimé 80 à 120000 euros." (SOTHEBY'S)