En 2023, la réforme des retraites a provoqué les plus grandes grèves depuis 2010

Lors d’une manifestation à Nantes, en avril 2023. SEBASTIEN SALOM-GOMIS / AFP

Une étude de la Dares souligne que 2,7% des entreprises de 10 salariés ou plus ont déclaré cette année-là «au moins un arrêt collectif de travail». Un taux au plus haut niveau depuis la mobilisation contre la réforme des retraites, il y a treize ans.

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«64 ans ? C’est non !». Ce slogan, chanté à tue-tête dans de nombreuses villes de l’Hexagone, de Paris à Ajaccio, en passant par Lyon, Caen ou Mont-de-Marsan, a marqué l’actualité en 2023. Cette année-là, la mobilisation lancée par un front syndical contre la réforme des retraites portée par Élisabeth Borne a mis des centaines de milliers de Français dans la rue, provoquant, dans le même temps, les plus importantes mobilisations sociales depuis 2010.

Publiée ce jeudi, une étude du service statistique du ministère du Travail souligne ainsi que 2,7% des entreprises de 10 salariés ou plus ont déclaré «au moins un arrêt collectif de travail, quels que soient la durée et le nombre de participants». Un taux au-dessus de la moyenne sur la période - 2% - et au plus haut niveau depuis 2010, année marquée par la réforme des retraites qui avait porté l’âge légal de 60 à 62 ans. Même la mobilisation contre la première réforme des retraites sous Emmanuel Macron, en 2019, n’a pas atteint un niveau aussi élevé. Le nombre de jours de grèves pour 1000 salariés confirme ce constat : celui-ci est par exemple passé, entre 2022 et 2023, de 189 à 276 dans l’industrie, de 414 à 894 dans le transport et l’entreposage et de 83 à 157 dans le tertiaire.

Dans le détail, les grèves ont été plus nombreuses dans les grandes structures de plus de 500 salariés, où plus d’une sur trois - 35,3% - a connu une mobilisation en 2023. Elles étaient moins nombreuses dans les plus petites entreprises : 9,7% de celles comprenant entre 100 et 199 salariés ont connu une grève au moins sur l’année, par exemple. Des taux tout de même en hausse dans la quasi-totalité des catégories d’entreprises.

Les rémunérations restent un motif important de mobilisation

Sur l’année, les interruptions de travail ont concerné de nombreux secteurs, «à l’exception de la fabrication d’autres produits industriels, de la construction, de l’hébergement et de la restauration, ainsi que des autres activités de services, qui incluent les services aux ménages». Elles se sont multipliées dans certains domaines en particulier, comme la fabrication de matériels de transport, l’enseignement, la santé, l’énergie ou la gestion des déchets. Des domaines, sans surprise, qui étaient en pointe dans les manifestations.

Conséquence de la mobilisation pour les retraites, les salariés se sont surtout mis en grève, en 2023, pour des motifs externes à l’entreprise. La contestation des retraites «constitue le premier motif de grève en 2023, devant les revendications salariales. Ce motif [...] augmente de 45 points sur un an, et de 14 points par rapport à 2019», note la Dares. L’année ayant également été marquée par l’inflation, les rémunérations restaient tout de même un motif important de grève, suivi, loin derrière, par les conditions de travail.

Le retour à des chiffres de mobilisation pré-Covid va-t-il durer ? Éducation, santé, transports, services publics... En 2024, l’actualité a également été marquée par des mouvements de grève, mais plus ponctuels et limités, la dissolution, les élections législatives puis la censure ayant restreint la capacité d’action des gouvernements successifs pendant la moitié de l’année. Reste à voir comment les discussions ouvertes par le premier ministre François Bayrou sur la réforme des retraites vont être reçues, in fine, par les partenaires sociaux, et si elles pourraient aboutir sur de nouvelles manifestations.