Le pape François confirme officiellement sa visite en Corse le 15 décembre
Le Vatican a finalement confirmé, samedi 23 novembre, avec une semaine de retard, la venue du pape François en Corse le dimanche 15 décembre. Deux points forts marqueront cet aller-retour depuis Rome concentré sur la ville d’Ajaccio : dans la matinée, le discours de conclusion de François devant un colloque international sur « la piété populaire dans le bassin méditerranéen », thème pastoral qui lui est très cher et motivation principale de cette visite ; l’après-midi, une messe en plein air où plusieurs milliers de Corses sont attendus. Une rencontre avec le président de la République est programmée en fin d’après-midi ainsi qu’un dialogue avec le clergé en fin de matinée.
Ce voyage de François est le 47e déplacement hors d’Italie depuis le début de son pontificat le 13 mars 2013. Jamais toutefois une visite du pape n’aura soulevé une telle polémique dans notre pays. Non parce que le pape se rend en Corse mais parce que cette excursion d’une journée tombe une semaine après les cérémonies de réouverture de la cathédrale Notre-Dame de Paris, les 7 et 8 décembre, où François a été invité mais où il a refusé de se rendre. Beaucoup interprètent le court séjour à Ajaccio comme un camouflet. L’annonce du voyage, retardé d’une semaine, est liée à cet imbroglio.
La «politique» des voyages pontificaux
De fait, François n’a jamais visité officiellement la France. Quand il est venu à Strasbourg le 25 mars 2014 pour rencontrer les communautés européennes, le pape argentin a pris de soin de préciser qu’il ne visitait pas la France. De même quand il s’est rendu à Marseille les 22 et 23 septembre, il a assuré « Je viens à Marseille, pas en France » même s’il s’est rattrapé par un chaleureux « bonjour la France ! » très applaudi dans le stade vélodrome où il présidait une messe géante. Il n’a pas non plus visité d’autres grands pays européens comme l’Espagne ou l’Allemagne et a souvent exprimé des jugements très négatifs sur l’Europe qu’il considère comme une « grand-mère » repliée sur elle-même.
L’explication officielle de cette « politique » des voyages pontificaux tient à la volonté de François, premier pape jésuite, de privilégier les « petits » pays ou les États en difficulté marqués par des « fractures » et la «pauvreté».
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Quant à la Corse, il y a l’explication officielle de sa participation à un colloque sur la « piété populaire », un sujet qui le passionne. La piété populaire désigne toutes les formes les plus simples et les plus anciennes d’expression de la foi catholique : vénération dans des petits sanctuaires, processions publiques derrière des statues de la vierge et ou de saints locaux, prières simples accompagnées d’une bougie, pèlerinages.
Pour François, ces formes de spiritualité des gens du peuple qui ont été longtemps méprisées dans l’Église, y compris par le clergé après le Concile Vatican II – dans les années soixante ce Concile a ouvert une vaste réforme de l’Église, dont celle de la liturgie et l’abandon du latin – sont essentielles à la vie de l’Église. La Corse du reste, comme la Bretagne, n’a pas abandonné ces traditions. Elles unissent souvent des populations plus ou moins croyantes, mais fidèles à ces rendez-vous. François, pape réformateur s’il en est un, apparaît très traditionnel sur ce thème car il sait que l’Église catholique peut rejoindre là des populations qu’elle ne touche plus désormais.
Grand ami du cardinal d’Ajaccio
L’autre explication de ce voyage étonnant est l’amitié que le pape éprouve pour celui qu’il a nommé à l’archevêché d’Ajaccio et qu’il a promu cardinal l’an passé : le cardinal François Bustillo, 55 ans, d’origine basque espagnol, formé en Italie dans les couvents franciscains son ordre religieux d’appartenance et qui a exercé sa première vie pastorale dans le sud-ouest de la France.
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Cet homme jovial, à l’autorité naturelle, passe plus de temps dans sa Clio pour sillonner les villages corses à la rencontre des gens que dans son bureau d’évêque. Il accomplit un parcours pastoral qui suscite l’enthousiasme sur l’île de Beauté et impose le respect à beaucoup d’évêques, sur le continent mais aussi au Vatican où il a été remarqué.
Ce voyage du pape à Ajaccio envers et contre tout, même au prix d’une mini-crise avec la présidence de la République vexée par l’absence de François à Notre-Dame de Paris, est la preuve de l’amitié du pape François pour le cardinal François.