"Le cancer, c'est pas une maladie honteuse" : Emilie Dequenne avait décidé de rendre publique sa "lutte acharnée"

Elle a mené son combat au vu et au su de tous, vaillante, éloquente et souriante. L'actrice belge Emilie Dequenne s'est éteinte dimanche 16 mars à 43 ans, après avoir lutté durant près de deux années contre une forme de cancer rare qu'elle avait décidé de médiatiser. Elle laisse derrière elle un monde du cinéma endeuillé, mais aussi un mari et une fille, née en 2002. Celle "que la caméra aimait", selon les mots du réalisateur Luc Dardenne, était restée sous le feu des projecteurs ces derniers mois pour porter à la connaissance de tous la réalité des patients atteints de cancer.

Le diagnostic posé depuis trois mois à peine, la comédienne à la carrière de près de 50 films annonçait, dès octobre 2023, la nouvelle sur Instagram. Les Français découvrent alors le corticosurrénalome, le nom du cancer du système endocrinien très rare qui la ronge. "J'ai pris le temps avant de me décider à me confier ici, s'excusait-elle presque auprès de ses 60 000 abonnés. Définitivement, j'aime partager mes projets, et celui-ci, c'est le plus important. Ce projet, c'est ma vie !" 

Depuis ce post de quelques lignes sur fond noir, l'actrice n'a cessé de prendre la parole dans les médias pour défendre ses derniers films, mais aussi pour raconter l'évolution de sa maladie. Interviewée par Léa Salamé le 13 juin, la comédienne tressaillit presque à la simple idée de garder cette épreuve pour elle : "J'en aurais été doublement malade !" "Le cancer, c'est pas une maladie honteuse", rappelait-elle encore au micro de France Inter.

Un "message d'espoir"

Après plusieurs mois de traitements, l'actrice annonce être en rémission début avril. Elle apparaît, le mois d'après, rayonnante, bras dessus bras dessous avec son mari Michel Ferracci sur la Croisette. L'occasion de célébrer les 25 ans du film Rosetta qui lui avait valu un prix d'interprétation à Cannes en 1999, à l'âge de 17 ans, mais aussi de présenter Survivre, son dernier film dans lequel son personnage combat des crabes qui envahissent la terre. Tout un symbole.

Le monde du cinéma la découvre alors les cheveux raccourcis après ses traitements. L'image est forte. "J'ai toujours été très dure avec moi-même physiquement. Et puis, d'un coup, je me suis rendu compte que le truc le plus important au monde c'est d'être vivant... Je m'en fous de mon poids et de mes cheveux", insiste-t-elle auprès du média vidéo Brut, en juin. "Pour les personnes malades et celles qui les accompagnent, je trouve que c'est une forme de message d'espoir, poursuit-elle. Il n'y a rien de courageux, j'ai juste la chance d'avoir une visibilité plus forte que d'autres."

"Si ça peut donner de la force à d'autres personnes, notamment d'autres femmes, de retirer leur perruque plus tôt que prévu, tant mieux."

Emilie Dequenne

au média Brut, en juin 2024

Parler de sa maladie était aussi pour Emilie Dequenne un moyen de redevenir maîtresse de son destin. "Il était hors de question que n'importe quoi se dise. J'avais envie de prendre le contrôle et de dire la vérité, car c'est ainsi que je fonctionne", retraçe-elle dans cette même interview qu'elle compare, dans un rire, "à sa séance chez le psy."

"Prenez soin de vous"

Le répit est de courte durée. Six mois après sa rémission complète, c'est la rechute. En décembre, elle raconte à TF1, dans l'émission "Sept à huit", combattre une maladie de plus en plus agressive, qui fera qu'elle ne vivra "pas aussi longtemps que prévu". "Je vais à nouveau perdre mes cheveux", avait-elle expliqué, se désolant à "l'idée de [s]e retrouver toutes les trois semaines pendant cinq jours à l'hôpital".

"Quelle lutte acharnée ! Et qu'on ne choisit pas...", avait posté l'actrice sur Instagram le 4 février, à l'occasion de la Journée mondiale contre le cancer. Les derniers mots de son message seront, une fois encore, pour les autres. "Tout mon amour à toutes celles et ceux qui luttent comme moi contre leur gré." Et cet appel, urgent : "Prenez soin de vous."