REPORTAGE. "Cela fait un an et quatre mois que l’on vit loin de chez nous" : dans le sud du Liban, les civils désespèrent de rentrer après un cessez-le-feu compromis

En vertu de l'accord qui a mis fin à la guerre le 27 novembre, l'armée israélienne devait achever dimanche 26 janvier son retrait du sud du Liban, mais Israël a annoncé vendredi que l'opération se poursuivrait au-delà. Des centaines d'habitants ont bravé dimanche l'armée israélienne et tenté de revenir dans leurs villages. Les militaires ont ouvert le feu, faisant plusieurs morts et des dizaines de blessés, selon les autorités libanaises. 

Abu Youssef, 70 ans, contemple les gravats d’une maison ou il avait trouvé refuge au début de la guerre, mais qui a été détruite l’année dernière par l’armée israélienne. Son village d'origine, Markaba, se trouve à quelques kilomètres à peine. "Cela fait un an et quatre mois que l’on vit loin de chez nous, que l'on voit tout ce qu’il s'est passé ici et à Gaza. Nous avons perdu beaucoup de vies, ce n’est pas pour qu'Israël reste indéfiniment sur nos terres. J’espère qu’il y aura un consensus vers la paix", souhaite-il. Mais ce n'est pas aujourd’hui qu'Abu Youssef pourra retrouver son village. 

"Les Israéliens n’ont pas changé d’attitude"

La situation interroge les civils, qui craignent que cette mise en péril du cessez-le-feu ne ravive les hostilités. Dans la ville de Tyr un peu plus à l’Ouest, les habitants racontent une trêve qui ne tient qu’à un fil. Hoda habite près de la côte. Son mari a été tué dans le bombardement de leur maison, survenu après l’annonce de la trêve. "Le cessez-le-feu n’a pas arrêté les bombardements, dénonce-t-elle vivement. On s’est presque habitués à tout ça maintenant. Nous continuons à descendre sur nos plages malgré les tirs israéliens, et nous resterons coûte que coûte". 

Dans le reste de l’immeuble où elle s’est réfugiée, les habitants s'interrogent :  le nouveau président libanais nommé en début d’année va-t’il faire intervenir l’armée, ou est-ce le Hezbollah qui profitera de ce vide pour crier vengeance ? Abu Khalil, la soixantaine, s’inquiète des tirs israéliens qui se sont multipliés ces derniers jours. "Après 60 jours, les Israéliens n’ont pas changé d’attitude", observe-til.

"Ceux qui pourraient les arrêter sont les puissances étrangères. Mais ici ils ne jouent que les observateurs et font seulement des rapports sur la situation."

Abu Khalil, réfufié à Tyr

à franceinfo

"Il faudrait que le tracé de la frontière soit clairement établie, que l’on laisse l’État libanais suffisamment armé pour assurer sa défense, avance Abu Khalil. Sinon la guerre et les bombardements sont condamnés à se répéter".

L’armée libanaise appelle au retrait des troupes israéliennes pour pouvoir se déployer. Dans un appel téléphonique avec Emmanuel Macron, le président libanais Joseph Aoun a demandé à la France d’intervenir pour faire appliquer l'accord de cessez-le-feu.