Chute de Bachar al-Assad en Syrie : ce qu'il faut retenir de la journée du lundi 9 décembre
Le chef islamiste des rebelles en Syrie, Abou Mohammad al-Joulani, a lancé lundi 9 décembre les discussions sur le transfert du pouvoir après avoir renversé le président Bachar al-Assad, les Occidentaux se montrant prudents face à ces insurgés qui contrôlent la grande partie du pays. Voici ce qu'il faut retenir de cette journée.
Le Kremlin ne confirme pas la présence de Bachar al-Assad en Russie
"Il n'y a rien à dire sur la localisation d'Assad", a déclaré Dmitri Peskov, le porte-parole du Kremlin, à la presse lundi. Aussi, "le programme officiel de Poutine ne prévoit pas de rencontre" avec le dictateur déchu. Pourtant, les agences de presse russes, citant une source au Kremlin, ont affirmé la veille que l'ancien dictateur et sa famille se trouvaient à Moscou. "La Russie, sur la base de considérations humanitaires, leur a accordé l'asile", a rapporté cette source aux agences Tass et Ria Novosti.
La Russie, qui intervenait militairement en Syrie depuis 2015 en soutien à Bachar al-Assad, s'attend à une "période très difficile, liée à l'instabilité" dans ce pays, selon Dmitri Peskov. Dans ce contexte, "il est très important de maintenir un dialogue avec tous les pays" de la région, a-t-il asséné en assurant que la Russie avait une "forte intention de le faire".
Le "transfert du pouvoir" est en cours
Le chef du groupe armé Hayat Tahrir al-Sham (HTS), Abou Mohammed al-Joulani, s'est entretenu avec l'ex-Premier ministre Mohammed al-Jalali pour "coordonner la transition du pouvoir", ont annoncé les troupes rebelles menées par des islamistes, dans un communiqué, accompagné d'un bref extrait vidéo de leur entretien. Mohammad al-Bachir, à la tête du "Gouvernement de salut" du bastion rebelle d'Idleb, dans le nord-ouest de la Syrie, était également présent. Dans cet enregistrement, Abou Mohammed al-Joulani fait part à l'ex-Premier ministre de l'expérience acquise par les autorités locales dans la gestion de la région d'Idleb.
Paris conditionne son appui à la transition au respect des minorités
L'appui de la France à la transition politique en Syrie "dépendra du respect" des droits des femmes, des minorités et du droit international, a souligné le ministre des Affaires étrangères démissionnaire, Jean-Noël Barrot. La France a rompu ses relations avec la Syrie en 2012 à la suite de la répression d'un mouvement pacifique de contestation. L'ambassade de France à Damas est depuis fermée.
"L'instauration d'un Etat fort qui respecte les Syriens dans leur diversité ethnique, politique et religieuse est sans doute la meilleure garantie que nous puissions avoir contre le risque terroriste et les vagues migratoires", a ajouté le ministre rappelant l'exode de "centaines de milliers" de Syriens en 2015, "qui fuyaient la torture, la persécution et gazage arbitraires de Bachar".
De nombreux pays suspendent l'examen des demandes d'asile de réfugiés syriens
Dans un contexte de forte progression des partis d'extrême droite aux récentes élections sur le continent, il n'aura pas fallu 48 heures aux gouvernements allemand, autrichien, suédois, danois, norvégien, belge, britannique et suisse pour décider de la suspension des demandes d'asile des ressortissants syriens. Le gouvernement français envisage de leur emboîter le pas.
L'Allemagne, pays de l'UE qui accueille la plus importante diaspora syrienne - près d'un million de personnes -, a justifié cette décision par "l'incertitude" qui règne à Damas, a déclaré la ministre de l'Intérieur Nancy Faeser. Le Haut-Commissariat de l'ONU aux réfugiés (HCR) a appelé à faire preuve "de patience et de vigilance" sur la question du retour des Syriens dans leur pays.
L'Etat hébreu intensifie la cadence de ses frappes aériennes en Syrie
Israël a mené une nouvelle série de bombardements contre des sites militaires syriens, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme. Plus de 100 frappes ont été menées lundi par Israël contre des sites militaires des forces du président déchu Bachar al-Assad en Syrie, dont un centre de recherches à Damas, a détaillé l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). D'après le directeur de l'ONG, Rami Abdel Rahmane, "Israël intensifie ses frappes pour détruire les capacités militaires de l'ancien régime" de Bachar al-Assad.
Le Hezbollah libanais a condamné l'intensification de ces raids aériens israéliens en Syrie et assuré qu'il "soutenait" le peuple syrien, dans son premier commentaire depuis que les rebelles ont renversé le président Bachar al-Assad, allié du Hezbollah.
Les Etats-Unis se disent "déterminés" à ne pas laisser le groupe Etat islamique se reconstituer
"L'Etat islamique tentera de profiter de cette période pour rétablir ses capacités et créer des sanctuaires. Comme le montrent les frappes de précision que nous avons effectuées ce week-end, nous sommes déterminés à empêcher cela", a affirmé le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken lors d'une cérémonie au département d'Etat.
Il a déclaré à plusieurs reprises que la première puissance mondiale avait des "intérêts clairs" en Syrie, dans une allusion à peine voilée aux propos du président élu Donald Trump, selon lequel les Etats-Unis ne devaient pas "se mêler" de la situation en Syrie. Le secrétaire d'Etat américain a ajouté que les Etats-Unis avaient également "tout intérêt à s'assurer que les armes de destruction massive ou leurs composants qui restent en Syrie ne tombent pas entre de mauvaises mains".
Selon Recep Tayyip Erdogan, la Turquie ne cherche pas à étendre son territoire en Syrie
"La Turquie n'a aucune visée sur les terres et la souveraineté d'un autre pays. Le seul objectif de nos opérations transfrontalières est de protéger notre patrie et nos citoyens contre les attaques terroristes", a affirmé le président turc en référence à la Syrie, lors d'un discours après la réunion de son cabinet.
"L'intégrité territoriale de la Syrie doit absolument être préservée. (...) Une Syrie où tous les Syriens vivent en paix, qu'ils soient arabes, turkmènes, kurdes, sunnites, alévis, nusayris ou chrétiens, est le plus grand désir, rêve et objectif de la Turquie", a-t-il ajouté. Recep Tayyip Erdogan a aussi annoncé la réouverture d'un poste-frontière fermé depuis 2013 pour le retour des réfugiés syriens dans leur pays.