«Je me suis accrochée au siège et j’ai fermé les yeux»: le témoignage poignant de Gwenaëlle, passagère du bus de l’accident sur l’A6
«Vous voyez ce que vous ressentez quand vous êtes dans un manège à haute sensation ? Physiquement, c’était ça. Sauf qu’on attend la mort, au lieu d’un deuxième tour.» Quelques heures après l’accident, Gwenaëlle est encore bouleversée. Ce jeudi 21 novembre soir la jeune femme de 27 ans quitte Paris à bord d’un bus Blablacar pour rejoindre Lorient, en Bretagne, où l’attendait son petit garçon de 5 ans. Mais aux alentours de 23h20, soit après à peine vingt minutes de trajet, un grave accident se produit sur l’autoroute A6b, à hauteur de Chevilly-Larue dans le département du Val-de-Marne, placé en vigilance orange neige-verglas toute la journée. Le bus qui transporte Gwenaëlle et 36 autres passagers, ainsi que quatre voitures, et une moto sont impliqués dans le drame.
«Il y a eu un premier choc. J’avais mon casque sur mes oreilles pour écouter de la musique, mais j’ai quand même entendu des passagers crier. Je me suis accrochée au siège, et j’ai fermé les yeux», raconte la jeune femme. Avant de poursuivre : «Quand j’ai ouvert les yeux, ma vitre était brisée, mon visage a quelques centimètres du toit d’une des voitures écrasées. Je n’ai pas compris tout de suite que c’était une voiture. J’étais quelque peu désorientée.» En prenant conscience qu’elle marche sur le toit d’une voiture accidentée, Gwenaëlle se crispe. «J’étais jusque-là très calme, j’avoue qu’à cet instant je me suis tétanisée, me suis dit “je marche sur la tête de quelqu’un, peut-être d’enfants”. La femme devant moi m’a fait reprendre mes esprits car elle était prise de panique. Il a fallu reprendre mon sang froid pour tenter de la calmer», ajoute Gwenaëlle.
«C’était catastrophique»
Une fois sortie avec les autres passagers, la Bretonne constate les premiers dégâts. Parmi les clients de Blablacar, plusieurs sont blessés. Un nez en sang, une jambe égratignée, des sentiments d’étourdissements pour d’autres, constate Gwenaëlle, avant de préciser que les autres passagers blessés bien plus gravement sont également évacués du véhicule. «J’ai remercié mon voisin qui était assis à côté de moi de s’être attaché pendant le voyage. S’il ne l’avait pas fait, il m’aurait écrasé.»
Je suis heureuse d’être en vie. J’ai une compassion évidente pour toutes les personnes pour qui ce fut un drame. Je sais que psychologiquement, ça sera difficile pour bon nombre des victimes
Gwenaëlle
En attendant les secours, les rescapés tentent de se rendre utiles. Gwenaëlle prête son téléphone portable au chauffeur pour qu’il prévienne Blablacar. Elle gère ensuite les appels avec la compagnie. «Nous avons tenté d’aider comme nous pouvions. C’était catastrophique», déplore la témoin. Pendant que Gwenaëlle téléphone, une femme s’occupe d’un passager d’une des voitures accidentée. Plus loin, les passagers découvrent dans un autre véhicule un homme inconscient. «Je n’ai rien pu faire d’autre que lui mettre mon écharpe pour tenter de le garder au chaud, surveiller sa respiration et lui parler», assure Gwenaëlle.
Nuit blanche
Les 84 pompiers dépêchés sur les lieux du drame ainsi que les policiers arrivent ensuite rapidement, «et gèrent très bien la situation». Les victimes blessées sont transférées dans les hôpitaux alentour. Les autres sont installées par les pompiers sous une tente chauffée, toujours sur la route, vers 2h30 du matin. «Un bus devait ramener ceux qui n’étaient pas blessés à Bercy. Nous étions une dizaine. Cependant, il n’est jamais venu. Je ne pense pas que ce soit la faute de la compagnie Blablacar, qui m’a semblé de bonne foi. La route était tout simplement inaccessible. Et puis, il y a eu au moins un autre accident sur la voie d’à côté.»
C’est seulement à 3h30 qu’une ambulance et un taxi conduits par la protection civile les transfèrent dans leur centre pour leur donner de quoi boire et manger. Par la suite, cinq passagers repartent en voiture vers Montparnasse, à Paris. Cinq autres parviennent à rejoindre Bercy. Gwenaëlle rejoint ensuite un hôtel mais ne trouve pas le sommeil. Elle rentre finalement chez elle ce vendredi soir. «Je suis heureuse d’être en vie. J’ai une compassion évidente pour toutes les personnes pour qui ce fut un drame. Je sais que psychologiquement, ça sera difficile pour bon nombre des victimes», conclut Gwenaëlle.