American Eagle, cette marque sans histoire au cœur d’une polémique après une campagne avec Sydney Sweeney

En s’offrant l’image de l’actrice Syndey Sweeney pour une publicité, la marque de prêt-à-porter American Eagle «misait gros» pour «redynamiser» ses ventes de jeans. La portée de la campagne a probablement dépassé les espérances de la marque, dont on a parlé dans le monde entier... Mais pas forcément pour les bonnes raisons. En affirmant que «Sydney Sweeney  a de supers jeans», jouant sur la proximité du mot jean avec le mot gène en anglais, l’enseigne s’est retrouvée au cœur d’un débat qui a enflammé les États-Unis, certains l’accusant d’eugénisme, les autres - dont Donald Trump - la défendant contre un assaut «woke».

Quasiment absente en Europe, American Eagle est surtout implantée aux États-Unis, au Canada et au Mexique. L’enseigne compte 828 magasins dans le monde, dont certains franchisés dans une trentaine d’autres pays. Ciblant principalement les jeunes adultes, avec un style d’étudiant d’université américain, la marque de prêt-à-porter ne vend pas que des jeans, mais aussi des t-shirts, des sweats, des chemises... Mais sa gamme de jeans, lancée en 1997, est un des piliers de son succès : la marque se vante ainsi de proposer plus de 200 teintes de denim et 50 tailles, pour homme comme pour femme, vendus de 40 dollars à 60 dollars (35-52 euros).

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Des vêtements de randonnée aux jeunes adultes

American Eagle a mis du temps à trouver son public. Fondée en 1977 par les frères Jerry et Mark Silverman, déjà propriétaires des magasins Silverman’s Menswear, l’enseigne ouvre son premier magasin dans un centre commercial du Michigan. Au départ, la marque se positionne sur l’habillement de loisir extérieur, pour la randonnée, le camping ou le sport.

Après la vente de Silverman’s Menswear à la fin des années 1980, l’entreprise connaît des difficultés au début de la décennie suivante. Les deux frères Silverman vendent alors à la famille Schottenstein, toujours aux commandes aujourd’hui. Ce sont eux qui ont repositionné American Eagle comme une marque de prêt-à-porter du quotidien. L’argent frais amené par l’introduction en Bourse, au Nasdaq, en 1994, permet à la chaîne d’accélérer les ouvertures de magasins.

Le groupe American Eagle Outfitters (AEO) tente alors de se diversifier, lançant de nouveaux concepts. Certains ont marché, comme la marque de lingerie Aerie créée en 2016, qui partage parfois les locaux de magasins American Eagle. D’autres expériences ont coûté beaucoup d’argent au groupe. En 2006 également, AEO lance Martin + Osa, une marque visant les femmes de 28 à 40 ans, qui ferme en 2010 après avoir causé 44 millions de dollars de pertes en 2009. Autre échec avec la marque de vêtements pour enfants 77kids, créée en 2008, vendue en 2012 après avoir fait perdre 35 millions de dollars au groupe.

Bras de fer avec Abercrombie & Fitch

La polémique autour de la publicité avec Sydney Sweeney est finalement l’une des premières que connaît la marque en près de 50 ans d’existence. Tout juste a-t-elle eu un long bras de fer avec Abercrombie & Fitch, qui a plusieurs fois (mais sans succès) attaqué American Eagle pour plagiat à la fin des années 1990, trouvant le concept de son concurrent trop similaire au sien.

En 2024, le groupe AEO a enregistré un chiffre d’affaires de 5,3 milliards de dollars (4,6 milliards d’euros), dont 3,4 milliards de dollars pour la seule marque American Eagle, pour un bénéfice de 329 millions de dollars. Des résultats en croissance, qui n’empêchent pas son action d’avoir chuté de 22% entre début janvier et début août. Le cours boursier du groupe a toujours été instable, enchaînant des périodes de croissances avant de retomber, par cycles de deux ou trois ans environ, occasionnant une capitalisation boursière en dents de scie.

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Elle n’est plus que de 1,99 milliard de dollars début août contre 4,71 milliards de dollars au dernier pic en mars 2024. Au plus haut, AEO a été valorisé 5,5 milliards de dollars en 2007, juste avant la crise. Le bad buzz autour de Sydney Sweeney lui a en tout cas apporté un peu d’air, faisant bondir l’action de 20% en un week-end. Reste à voir comment en ressortira l’image de la marque sur le long terme.