Pilules abortives : le monopole de Nordic Pharma peut-il mener à la pénurie ?

Alors qu’aux États-Unis, l’accès à l’IVG est de plus en plus menacé, la France, devenue le premier pays au monde à reconnaître dans sa Constitution la liberté de recourir à l’avortement, fait figure d’exception. Sauf que la prépondérance de la méthode médicamenteuse – qui représente aujourd’hui 80 % des actes (contre 31 % en 2000 selon la Drees) – fait de la production et de l’approvisionnement des comprimés abortifs un enjeu central de l’accès à l’avortement.

Concrètement, pratiquer un avortement médicamenteux implique la prise de deux principes actifs administrés à 48 heures d’intervalle : le premier, le mifépristone (sous le nom de Mifegyne, plus connu sous le nom de RU486), interrompt la grossesse. Le second, le misoprostol, qui existe sous deux marques MisoOne et Gymiso, déclenche des contractions et provoque l’expulsion de l’embryon. La particularité, c’est que la production de ces médicaments est dans les mains d’un seul laboratoire, le groupe Nordic Pharma. Pour faire court, en cas de défaillance industrielle, il n’existe aucune solution alternative.

Risques de rupture de production et d’approvisionnement

Ce qui n’est pas sans risque, comme le pointe l’Institut national d’études démographiques (Ined) : « Le monopole d’un seul laboratoire pharmaceutique privé (Nordic Pharma) soulève des questions quant aux risques de pénurie, de problèmes d’approvisionnement et de pression sur les prix des comprimés abortifs. » Comme le résume Justine Chaput, chercheuse à l’Ined et coautrice d’une étude sur l’IVG parue en novembre dernier, « en creux, cela pose la question de comment garantir l’accès à l’avortement dans ces conditions ».